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Intervention de Marie-Line Reynaud

Réunion du 5 avril 2011 à 15h00
Protocole au traité sur l'union européenne. Élection des représentants au parlement européen. — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-Line Reynaud :

Nous examinons, ce soir, un projet de loi plutôt singulier puisque le Gouvernement nous demande d'adopter un texte qui permettra à deux de nos collègues de devenir parlementaires européens.

Lors des négociations sur le traité de Lisbonne, les États membres ont décidé que le nombre des députés au Parlement européen passerait de 736 à 754, évitant ainsi à l'Allemagne de perdre trois sièges. Cette disposition permet à la France d'obtenir deux sièges supplémentaires ; en outre onze autres pays de l'Union voient leur nombre de députés augmenter.

Le Conseil européen des 11 et 12 décembre 2008 avait prévu l'éventualité d'une entrée en vigueur du traité de Lisbonne après les élections européennes de juin 2009, éventualité qui est devenue une réalité, puisque le peuple Irlandais n'a finalement ratifié le traité que le 2 octobre 2009.

Afin de pourvoir ces sièges supplémentaires, chacun des douze États concernés doit désigner de nouveaux parlementaires. Un protocole, signé à Bruxelles le 23 juin 2010, offre aux États membres le choix entre trois procédures que je rappelle : soit une élection européenne partielle, procédure qui n'est retenue par aucun pays ; soit une désignation par référence aux dernières élections de 2009, méthode que la majorité des pays va retenir et, enfin, une désignation par le Parlement national qui est la solution retenue et voulue par le Gouvernement français. Six États – l'Espagne, l'Autriche, la Suède, la Bulgarie, la Lettonie et Malte – ont pris des dispositions avant les élections européennes de juin 2009 afin d'élire ces futurs députés. Parmi ceux qui n'ont pas pris de dispositions avant l'élection, cinq États vont tenir compte des résultats de la dernière élection. Au final, non seulement la France est le seul pays qui va utiliser l'élection par l'Assemblée nationale, mais notre pays est clairement celui qui est le plus en difficulté dans cette désignation.

Sur ce sujet, comme sur bien d'autres d'ailleurs, le Gouvernement fait preuve depuis le début d'un manque d'anticipation évident. Nous savons tous, depuis décembre 2008, qu'il est nécessaire de résoudre cette désignation et voilà que nous débattons de ce sujet deux ans et demi après dans cet hémicycle. Ce retard est inacceptable, monsieur le ministre, et ne venez pas nous dire que l'ordre du jour de notre assemblée est trop chargé car, quand il s'agit de faire voter des lois, le Gouvernement Fillon nous a démontré, depuis juin 2007, qu'il possédait un talent certain dans ce domaine !

Deux députés nationaux élus en 2007 le seront donc pour sept ans au lieu de cinq, et ce en contradiction avec la durée du mandat de député national et sans que les électeurs n'aient eu leur mot à dire ! Sur le fond, l'option retenue n'est pas acceptable. J'en veux pour preuve que les onze États vont recourir à l'option « 2 », laquelle peut facilement être retenue par notre pays. Une nouvelle fois, la France se singularise et pas de la meilleure des façons, car ce projet de loi revient à faire élire deux députés européens non plus au suffrage universel direct, mais par un Parlement national, ce qui, je le rappelle, est l'ancien système de désignations des parlementaires européens.

Cette option retenue par la France est aussi contraire à l'esprit des institutions européennes, car le Parlement européen représente les citoyens de l'Union et non les États.

Monsieur le rapporteur, vous avez indiqué que, si l'option de la désignation en fonction des dernières élections était retenue, cette mesure se heurterait à de sérieuses difficultés juridiques d'ordre constitutionnel ou à des problèmes démographiques. Mais croyez-vous vraiment être à l'abri d'une censure du Conseil constitutionnel avec ce projet de loi ? Si la méthode que vous avez choisie a été validée par Bruxelles, la Haute juridiction n'est pas soumise aux décisions bruxelloises, quelle qu'en soit la nature juridique. Cette option est susceptible de se heurter au principe d'égalité. Peut-on, en effet, faire siéger dans une même enceinte parlementaire des députés désignés par deux méthodes différentes : certains au suffrage universel direct et à la proportionnelle et d'autres élus par l'Assemblée nationale, cette dernière étant élue au scrutin majoritaire à deux tours ?

Pour conclure, ce projet de loi est une belle illustration de l'action brouillonne du Gouvernement. Vous êtes dans l'erreur depuis le début dans ce dossier : erreur sur le calendrier et erreur sur la méthode. Ce nouveau projet de loi, qui va apparaître aux yeux de l'opinion comme un tour de passe-passe, n'est pas de nature à renforcer le lien entre les Français et les institutions européennes et je le regrette. Le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche se prononcera, en conséquence, contre ce texte.

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