Deux motifs avaient été mis en avant. Il s'agissait de donner un ancrage territorial aux députés européens et de faire reculer l'abstention.
En fait, l'étendue nécessairement considérable de ces circonscriptions et leur configuration géographique souvent étrange font que le député européen reste toujours un inconnu pour le citoyen, où qu'il réside.
Quant à l'abstention, au lieu de la faire baisser, le nouveau mode de scrutin l'a, au contraire, fait croître significativement. Elle est passée de 47 % à près de 60 % entre 1994 et 2009. Cette érosion n'était pourtant pas écrite d'avance. On voit bien que la participation est liée à une claire conscience des enjeux et au sentiment que voter peut avoir un impact réel. Lorsque la responsabilité lui apparaît éclatée et diluée, alors l'électeur ne se sent pas concerné et ne se mobilise pas.
Si les objectifs avancés n'ont pas été atteints, le nouveau mode de scrutin a produit par ailleurs une série d'effets extrêmement négatifs. Cette cassure du territoire national, qui fausse le jeu de la logique proportionnelle, produit un effet d'aubaine favorable aux grands partis et marginalise les listes plus minoritaires qui peuvent être porteuses de conceptions originales sur la construction européenne. La circonscription nationale permettait donc une représentation plus juste des grandes options en matière européenne sur lesquelles l'électeur est appelé à se prononcer, beaucoup plus que sur l'envoi d'une majorité politique à Strasbourg. Le nouveau mode de scrutin ne permet pas d'assurer une représentation plus équitable des familles politiques. Au contraire, il rétrécit la diversité de l'offre, porte ainsi atteinte au pluralisme démocratique et réduit l'intérêt du scrutin pour l'électeur.