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Intervention de Christophe Caresche

Réunion du 5 avril 2011 à 15h00
Protocole au traité sur l'union européenne. Élection des représentants au parlement européen. — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristophe Caresche :

Vous nous dites, ensuite, qu'il n'était possible de choisir la procédure consistant à désigner les députés européens en référence aux élections européennes ni avant ni après le scrutin de juin 2009. Cela signifie, soit dit en passant, que cette procédure, retenue par tous les pays européens concernés, n'aurait pas été applicable.

Avant le scrutin de juin 2009, il n'était, selon vous, monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, pas possible, de prendre des dispositions législatives qui prévoient la désignation des parlementaires européens en référence aux élections européennes, car le traité de Lisbonne n'était pas encore ratifié. Soit, mais six pays européens, à ma connaissance, ont pourtant fait ce choix avant les élections européennes. Sans doute ont-ils été plus clairvoyants que la France qui – je le rappelle – a été à l'origine du traité de Lisbonne, mais dont on apprend qu'elle ne croyait pas vraiment à sa ratification.

Au demeurant, si cet argument vaut pour le passé, il vaut aussi pour le présent et devrait conduire le Gouvernement à retirer son projet de loi. En effet, si le traité de Lisbonne a bien été ratifié, le protocole dont nous discutons ne l'est toujours pas. En bonne logique, vous devriez attendre qu'il le soit avant de légiférer. Pourquoi attendez-vous, dans un cas, que le traité soit ratifié, alors que, dans l'autre, vous n'hésitez pas à anticiper la ratification ?

J'évoquerai, à ce stade, une hypothèse qui montre l'absurdité de votre projet.

Imaginons que la ratification par les États européens du protocole européen n'intervienne qu'après les élections législatives de 2012 ; cette hypothèse est envisageable. Cela signifierait qu'il faudrait demander à deux députés nouvellement élus à l'Assemblée nationale en 2012 d'abandonner leurs postes pour aller siéger au Parlement européen jusqu'en 2014. Je vous souhaite bon courage.

Il sera sans doute très difficile, en effet, de trouver des candidats acceptant de renoncer à leur mandat pour devenir député européen. En tout état de cause, si cette hypothèse se confirmait et que la gauche soit alors en responsabilité, elle n'hésitera pas – je n'en doute pas – à revoir la procédure de désignation des deux parlementaires européens.

Vous nous dites qu'il n'était pas possible de prévoir une procédure de désignation en référence aux élections européennes avant les élections européennes, mais vous nous dites aussi qu'il n'est pas possible de le faire après ! Il n'était pas possible de le prévoir avant parce qu'il fallait le faire après, mais il n'est pas, non plus, possible de le faire après parce qu'il fallait le faire avant ! Ni avant, ni après ; telle est, en résumé, votre position qui aurait fourni matière au regretté Raymond Devos !

Vous considérez que prévoir la désignation des députés européens supplémentaires en référence aux élections européennes a posteriori serait une atteinte à la sincérité du scrutin. Si cet argument vaut pour les élections européennes – ce que, personnellement, je ne crois pas –, il vaut a fortiori pour le projet que vous nous soumettez.

En effet, les deux députés nationaux qui seront désignés pour siéger au Parlement européen n'ont pas été élus pour cela. Les électeurs qui ont élu ces députés ne les ont pas élus pour les représenter au Parlement européen. À aucun moment, ils n'ont été informés que le député élu de leur circonscription deviendrait parlementaire européen. S'il y a une atteinte au principe de sincérité, elle figure bien dans la procédure que vous nous soumettez.

En revanche, ce problème n'existe pas, selon moi, pour les élections européennes, même si cette désignation est prévue a posteriori. Dès lors que la procédure tiendrait compte fidèlement du résultat des élections européennes, la désignation de deux parlementaires européens supplémentaires, dans ces conditions, serait conforme aux souhaits des électeurs. C'est la seule voie possible si l'on exclut, pour des raisons évidentes, l'organisation d'une nouvelle élection.

Pour accroître un peu plus la confusion, vous introduisez un débat sur la référence démographique à prendre en compte pour l'attribution des sièges, l'élection européenne se déroulant dans plusieurs circonscriptions. Faut-il considérer la démographie constatée le jour de l'élection ou prendre en compte la démographie d'aujourd'hui, date d'examen du projet de loi ? En fonction de l'évolution démographique, serait privilégiée telle ou telle région ou formation politique. La réponse à cette question ne mérite pas les arguties que vous lui consacrez. Il est évident que s'il s'agit de respecter fidèlement le résultat des élections européennes, la seule référence concevable est la situation démographique constatée le jour de l'élection. En réalité, il n'y a pas, selon moi, de véritable débat sur ce point.

Avec toute la bonne volonté du monde, il est difficile de voir dans ce projet autre chose qu'une manoeuvre. Aucun des arguments avancés pour le justifier ne peut convaincre. Pis encore, ce projet représente un véritable déni de démocratie, monsieur Deflesselles, un détournement électoral qui vise, pour la majorité, à s'attribuer un ou plusieurs sièges qu'elle n'a pas gagnés dans les urnes. Certains ont pu penser que le parti socialiste, se voyant « généreusement » attribuer un siège par la méthode proportionnelle retenue, la cautionnerait.

Je suis désolé de les décevoir. Il n'est pas question, pour le groupe auquel j'appartiens, de suivre la majorité et le Gouvernement dans leurs dérives et de fouler aux pieds les principes auxquels nous croyons. Nous combattrons votre projet, aujourd'hui en votant contre, demain en le déférant devant le Conseil constitutionnel, monsieur le ministre, et après-demain en refusant de présenter un candidat à la désignation de notre assemblée.

Pour conclure, je souhaite évoquer un autre sujet dont nous avons l'intention de saisir notre assemblée à l'occasion de ce débat, à travers un amendement que j'ai déposé avec Jérôme Lambert. Il s'agit du « retour» de M. Hortefeux au Parlement européen. Je n'épiloguerai pas sur les conditions dans lesquelles a été jugée recevable par le Parlement européen la nomination d'un candidat, certes, élu au Parlement européen, mais qui n'a jamais, semble-t-il, manifesté clairement sa volonté d'y siéger. En revanche, je conteste l'interprétation du ministre des affaires européennes dans sa lettre au président du Parlement européen, qui estime que M. Hortefeux doit remplacer celle qui lui succédait sur la liste aux élections européennes. Celle-ci ayant démissionné avant la notification par le Gouvernement, ce n'est pas M. Hortefeux qui devrait la remplacer mais le suivant de liste.

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