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Intervention de Xavier Bertrand

Réunion du 29 mars 2011 à 17h30
Commission des affaires sociales

Xavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la sant :

La loi HPST, réforme majeure, a modifié l'organisation territoriale de notre système de santé, en même temps qu'elle visait à le moderniser. Son adoption a été précédée d'une longue concertation : commission Larcher, états généraux de l'organisation de la santé, rapport Ritter sur la création des ARS, rapport Flajolet sur les disparités territoriales des politiques de prévention sanitaire, entre autres. Et les débats, tant en commission qu'en séance publique, devant les deux assemblées, ont été longs et approfondis.

Le texte était d'ampleur avec quatre titres et 135 articles. Les huit ordonnances nécessaires à son application ont été prises. Sur les 154 décrets prévus, 112 ont été publiés. Une vingtaine sont en cours d'élaboration et devraient être publiés d'ici mai. Les autres font encore l'objet d'une concertation, dont pas moins de dix concernant la biologie, dans l'attente de l'examen par le Sénat du projet de loi relatif à la bioéthique, qui aura lieu la semaine prochaine. Enfin, quelques dispositions du texte, notamment celles relatives aux contrats santé solidarité, demeurent en suspens dans l'attente de l'adoption de la proposition de loi de M. Jean-Pierre Fourcade. La proposition de loi déposée par le sénateur Fourcade, adoptée par le Sénat et que l'Assemblée va examiner, permettra d'avancer.

Le travail accompli par les services du ministère de la santé, dont je salue le professionnalisme des personnels, a donc été considérable. Pouvions-nous aller plus vite ? L'un des plus sûrs moyens de parvenir à publier tous les textes réglementaires en temps utile est, comme je l'avais fait lors de la réforme de l'assurance maladie en 2004, alors que j'étais secrétaire d'État à la santé, de les préparer et de les soumettre à la concertation en même temps que le projet de loi – sachant qu'en moyenne à peine 5 % d'un texte est modifié par voie d'amendement. On gagne ainsi un temps considérable. Je m'étais engagé en juin 2004, lors du vote de la loi, à ce que 80 % des décrets soient publiés à la fin de l'année : à l'échéance, 92 % l'avaient été !

Venons-en au fond.

La loi HPST a modifié en profondeur l'organisation interne de l'hôpital, lequel s'inscrit désormais clairement dans une offre de soins territoriale, et décloisonné notre système de santé. Le changement est en marche : l'hôpital prend sa place dans les filières de soins, en relation avec l'ensemble des acteurs de santé. Le plus important aujourd'hui pour les établissements est de s'adapter à leur environnement pour être au plus près des besoins sanitaires de la population et y répondre au mieux. La réforme de la gouvernance des établissements de santé a également été menée à bien.

Nous allons prochainement célébrer le premier anniversaire des ARS, ce qui nous donnera l'occasion de dresser un premier bilan. J'ai des réunions de travail mensuelles avec leurs directeurs généraux. Depuis le début, je ne cesse d'appeler leur attention sur l'importance pour les ARS de n'être pas perçues comme des structures administratives repliées sur elles-mêmes – sur ce point, je partage tout à fait l'avis du président Méhaignerie. Établissements publics placés sous la tutelle des ministres chargés de la santé, de l'assurance maladie, des personnes âgées et des personnes handicapées, les ARS se sont, dans chaque région, substituées à sept structures : l'agence régionale de l'hospitalisation (ARH), les directions régionale et départementale des affaires sanitaires et sociales (DRASS et DDASS), le groupement régional de santé publique (GRSP), l'union régionale des caisses d'assurance maladie (URCAM), la mission régionale de santé (MRS) et les caisses régionales d'assurance maladie (CRAM). Elles se sont au début concentrées sur leur mission qui était de faire se fondre toutes ces structures en une seule entité. Des questions légitimes se sont fait jour, tant de la part des élus que des professionnels de santé. Ceux-ci notamment s'interrogeaient : ces nouvelles structures seraient-elles un animateur du système de santé en région, ou un ennemi ?

Le périmètre de compétences des ARS intègre tous les secteurs du champ de la santé. En un mot, il recouvre tout le parcours de soins, très diversifié, des patients. Un patient qui consulte un jour dans une clinique privée peut fort bien se rendre plus tard à l'hôpital public. Dans le même temps, il voit divers professionnels de santé en ville et quand, plus âgé, il entre en maison de retraite, établissement médico-social, ses soins y sont pris en charge par l'assurance maladie. Les ARS, qui ont compétence en tous ces domaines, ont un rôle d'animateur et contribuent ainsi au décloisonnement de notre système de santé. Loin de se refermer sur elles-mêmes, elles ont vocation à se tourner vers l'ensemble des acteurs de la santé.

La proposition de loi du sénateur Fourcade permettra de revenir sur certaines incompréhensions sur lesquelles j'aurai d'ailleurs l'occasion de m'exprimer lors du débat parlementaire des 12 et 13 avril. Elle comporte notamment des mesures issues de la concertation sur la médecine de proximité que Nora Berra et moi-même avons engagée avec l'ensemble des professionnels. L'enjeu est bien de renforcer l'attractivité de la médecine de premier recours et de revaloriser la médecine générale. En la matière, après la période 2004-2007 et l'institution du médecin traitant, nous avons franchi une étape supplémentaire. Il y a maintenant une véritable reconnaissance de la spécificité de la médecine générale, laquelle était attendue depuis longtemps. Les différents acteurs ne se plaignent évidemment pas de ce point qui est essentiel pour l'avenir de notre système de santé.

Pour que la loi HPST soit efficace, il convient en effet qu'elle soit simple et que l'ensemble des outils qu'elle préconise soit mis en place. C'est précisément ce à quoi vise la création de la société interprofessionnelle de soins ambulatoires (SISA), une adaptation du droit de la société civile de moyens (SCM) ou de la société civile professionnelle (SCP) étant fiscalement problématique : nous ne savions pas, en effet, comment prendre en compte et reverser l'ensemble des rémunérations. Quoi qu'il en soit, si le nom diffère, l'esprit n'en demeure pas moins identique.

Les maisons de santé sont quant à elles désormais dotées de la personnalité juridique et peuvent accueillir différents professionnels de santé – le Gouvernement et le rapporteur vous proposeront d'y inclure également les pharmaciens.

S'agissant du contrat santé solidarité, j'assume pleinement la volonté d'en retirer la partie coercitive et d'en conserver la partie incitative, seule garante d'efficacité. Je crains que, si l'on commence à toucher à la liberté d'installation, les professionnels de santé ne s'interrogent sur un encadrement à venir de la liberté de prescription ou sur la mise en place de nouvelles modalités de rémunération. Ébranler l'un des piliers de la médecine libérale, c'est la déstabiliser avant de la détruire, et ce n'est ni mon intention, ni mon ambition. Tant que j'occuperai mes fonctions, je demeurerai dans cette logique.

Par ailleurs, notre système de santé a besoin de confiance et ceux qui prétendent le réformer sans les professionnels de santé font fausse route : il est fallacieux de croire que nous saurions mieux faire qu'eux, sans eux, et c'est pourquoi nous avons besoin d'outils nouveaux.

Je précise également que je tiens à supprimer l'obligation de déclaration des absences programmées.

S'agissant du développement personnel continu (DPC) – pour lequel je souhaite l'organisation d'une gestion paritaire –, les textes sont prêts, mais j'ai d'autant moins l'intention de les publier pendant que se déroulent les assises du médicament que nous pouvons nous permettre d'attendre le mois de juin.

Monsieur Christian Paul, il n'est pas question d'entrer dans la logique des objectifs quantifiés de l'offre de soins (OQOS) telle qu'imaginée par certains services : je ne crois ni au rationnement des soins ni à l'application de mesures coercitives. Aucun hôpital n'a fermé le 30 octobre faute d'argent et cela ne se produira pas. Je préfère proposer une progression de l'ONDAM à hauteur de 2,8 % – ce qui demande des efforts, j'en ai conscience – plutôt que d'être contraint d'imposer un jour des sacrifices avec un ONDAM qui serait en baisse d'autant, comme tel est d'ailleurs le cas dans certains pays.

En outre, le nombre de personnels médicaux a augmenté dans les hôpitaux ces dernières années. Leurs postes seront préservés et les effectifs garantis. Le non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux ne s'y applique pas et il serait pure folie qu'il en aille autrement quand les besoins de santé de la population évoluent, notamment en raison de son vieillissement.

En ce qui concerne les contrats de bourses d'études, je tiens à mettre fin à plusieurs aberrations. Nos services doivent être plus rapides afin de les débloquer, de les valoriser et de garantir qu'un étudiant signant un contrat et souhaitant par exemple exercer en Picardie pourra le faire. Cela n'étant pas le cas aujourd'hui, il ne faut pas s'étonner que les jeunes soient peu nombreux à s'y précipiter.

Quelques mois après la mise en oeuvre de la loi, il est possible d'en pointer les imperfections. J'assume ce travail d'évaluation et de correction, lequel doit d'ailleurs être permanent.

S'agissant des indicateurs de performance, aucun directeur d'hôpital ou d'ARS ne se métamorphose en costkiller ou n'ambitionne d'être bien noté parce qu'il réduirait l'accès aux soins. Aucun responsable politique, quel que soit son camp, ne saurait raisonner de la sorte.

En ce qui concerne les ARS, j'ai veillé à ce que, dans le cadre de la campagne tarifaire des établissements de santé, des garanties soient prises quant aux dotations affectées aux missions d'intérêt général et à l'aide à la contractualisation (MIGAC). D'aucuns assurent, dont les fédérations nationales des établissements de santé, que cela ne s'est jamais vu. D'ordinaire, la visibilité des MIGAC – qui offrent pourtant sur le terrain de véritables moyens de négociation et de restructuration – est nulle du début à la fin de l'année. Désormais, compte tenu de l'évolution de l'activité et des tarifs, les budgets augmenteront, mais les directeurs d'ARS disposeront des moyens qui leur sont nécessaires afin de promouvoir la contractualisation. Notre seule logique est de faciliter un développement harmonieux et décloisonné de l'ensemble du système.

Par ailleurs, j'ai l'intention de travailler au problème des incidences des prescriptions hospitalières sur la médecine de ville, la question de la pertinence des actes ne constituant en rien un tabou à mes yeux, bien au contraire.

Je répète ce point essentiel : la loi HPST contribue à moderniser, à optimiser et à réorganiser notre système de soins, tout en le décloisonnant.

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