Les textes soumis à notre examen dans le cadre de ce « paquet électoral », en particulier le texte de la proposition de loi de nos collègues M. Warsmann et M. de la Verpillière, avaient originellement pour objectif de reprendre certaines des recommandations formulées par le groupe de travail dirigé par Pierre Mazeaud sur le financement des campagnes électorales, et de prendre en compte les propositions de réforme formulées dans les rapports successifs de la Commission pour la transparence financière de la vie politique.
Le texte initial de nos collègues proposait des modifications, qui, bien qu'insuffisantes, allaient manifestement dans le bon sens.
Malheureusement, les débats en commission comme dans notre assemblée en décembre avaient été ternis par l'attitude de certains de nos collègues qui, au sein de la majorité, avaient manoeuvré afin d'amoindrir la portée du texte. MM. Copé et Jacob ont donné libre cours à leurs réflexes corporatistes. Nombre des demandes formulées de longue date, rapport après rapport, par la Commission des comptes de campagne, des financements politiques et la Commission pour la transparence financière de la vie politique ont ainsi été balayés d'un revers de main par la majorité.
L'article 4, qui prévoyait initialement d'exiger que la déclaration de fin d'exercice des fonctions comprenne le détail des revenus perçus, a été supprimé par notre assemblée. Celle-ci a également, par voie d'amendement, soustrait toute peine de prison à l'incrimination pénale des députés fraudeurs. C'est un autre scandale. Il est vrai que MM. Copé et Jacob proposaient d'aller plus loin encore et de supprimer l'incrimination pénale elle-même ! Peut-être la réaction de votre groupe, monsieur le président de la commission, a-t-elle permis que les choses se tassent…
Ce débat aurait pu être l'occasion de garantir une plus grande transparence du financement de la vie politique et de donner à la Commission pour la transparence financière de la vie politique les moyens qu'elle réclame à juste titre afin d'assurer convenablement ses missions.
Nous sommes au final assez loin du compte, notamment pour ce qui concerne le régime des sanctions, puisque le montant des pénalités financières en cas de fausse déclaration reste insuffisant et qu'il n'est plus non plus prévu de peine d'emprisonnement en cas d'omission volontaire par le député d'une part substantielle de son patrimoine.
D'une manière générale, la plupart des recommandations formulées par la Commission des comptes de campagne et la Commission pour la transparence financière de la vie politique ont été délibérément ignorées.
Ce n'est pas acceptable. Il n'est pas acceptable de tenter de soustraire les députés qui ont fait de fausses déclarations aux sanctions pénales, de jeter le voile sur la corruption ainsi que vous le faites, comme si celle-ci n'existait pas !
Croyez-vous que vous redonnerez ainsi confiance à nos concitoyens dans leurs élus ? Croyez-vous que c'est en agissant de la sorte que ceux-ci retourneront aux urnes ou cesseront de prêter l'oreille aux propos démagogiques du Front national ?
Vous portez déjà une lourde responsabilité dans la dégradation du climat politique, dans la montée du Front national et dans le peu de confiance que nos concitoyens manifestent à l'égard des institutions et de leurs représentants, dont l'abstention est l'une des manifestations parmi d'autres.
Nos concitoyens attendent de leurs élus l'exemplarité et la transparence. Vous leur envoyez avec ce texte le message selon lequel il y a deux poids deux mesures, que les députés fraudeurs doivent échapper aux peines de prison, quand un simple vol à la tire peut valoir à son auteur trois ans d'emprisonnement.
Nous n'acceptons pas semblable injustice !
Ajoutons que nos discussions augurent mal du futur projet de loi de lutte contre les conflits d'intérêts. Le rapport de la commission chargée de réfléchir à une moralisation de la vie politique a déjà fait couler beaucoup d'encre. On ne compte plus le nombre de députés de la majorité qui l'ont critiqué ouvertement, à commencer par Jean-François Copé, lui encore, qui déclarait, en dépit des lourdes affaires qui entachent ce quinquennat, qu' « il n'y a pas besoin d'une loi » en la matière. Votre refus de renforcer les compétences et les pouvoirs d'investigation de la Commission pour la transparence de la vie financière souligne combien la volonté politique est absente sur vos bancs. Ces compétences et pouvoirs nouveaux sont le préalable à la lutte contre les conflits d'intérêts, sauf à vouloir, comme vous le faites, se payer de mots.
Pour toutes ces raisons, et en dépit de modestes avancées – notre collègue socialiste l'a dit, nous aurions pu pourtant voter ces dispositions – proposées çà et là, au fil des différents dispositifs, nous ne pourrons approuver les présents textes.