Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, cette proposition de loi est difficilement acceptable, sur la forme comme sur le fond.
Sur la forme, ce texte conforte notre opposition à votre réforme constitutionnelle de 2008. En effet, après le texte sur le travail du dimanche, vous récidivez en passant à nouveau par une proposition de loi et non un projet de loi, afin d'éviter de présenter une étude d'impact et de recueillir l'avis du Conseil d'État. En outre, nous avons appris avec étonnement que le Gouvernement avait engagé, le 17 mars dernier, la procédure accélérée sur ce texte, réduisant ainsi la durée des échanges entre les deux chambres.
Sur le fond, ce texte instaure des dérogations au droit existant pour permettre aux collectivités territoriales d'aider au financement de la construction ou de la rénovation d'enceintes sportives et d'équipements connexes, afin de répondre aux exigences du cahier des charges de l'UEFA. Au regard de ces dernières, nos équipements actuels, Stade de France compris, sont déjà obsolètes.
Sollicitées de nouveau, les collectivités territoriales, qui – comme à l'accoutumée avec votre gouvernement – n'ont malheureusement pas été consultées, devront mettre la main au porte-monnaie, alors même que les effets de la crise se font encore sentir et que l'État ne cesse de se désengager.
Le poids économique total du sport en France est de 35 milliards d'euros : 50 % de ce montant est à la charge des ménages, 30 % incombe aux collectivités, dont une grosse part au bloc communal, 10 % à l'État et 10 % aux acteurs privés. Ainsi, alors que l'État avait contribué à hauteur de 30 % au financement de la Coupe du monde de football en 1998, il ne participera à l'Euro 2016 qu'à hauteur de 7 %.
Malgré les demandes incessantes d'un budget permettant de financer les stades qui accueilleront le championnat, le Gouvernement n'a pas souhaité engager de nouveaux crédits pour construire les structures d'accueil. Ainsi, sur 1,7 milliard d'euros d'investissement, il ne fournira que 153 millions d'euros, financés par un prélèvement de 0,3 % sur les jeux en dur de la Française des jeux entre 2011 et 2014. Le reste à charge pèsera directement sur les contribuables locaux, qui n'auront même pas la jouissance des équipements en question, car les profits engendrés seront finalement confisqués par les intérêts privés, qu'il s'agisse des clubs sportifs professionnels ou des entreprises dont dépendront la construction et l'exploitation des équipements.
De grandes villes telles que Rennes, Nantes ou Strasbourg ont préféré renoncer à juste titre à ce projet en raison de son coût exorbitant. La Cour des comptes, dans ses recommandations, s'était du reste montrée réservée, conseillant de concevoir avec la plus grande prudence l'économie globale de la construction d'équipements dont la rentabilité n'apparaît pas nécessairement au cours de la durée de vie prévisible de l'investissement.
Il ne tient qu'à nous de ne pas céder à cette facilité. Si les collectivités territoriales sont amenées à participer aux projets de construction ou de rénovation des enceintes sportives destinées à accueillir l'Euro 2016, ce sont autant de crédits qui ne pourront plus être alloués à des projets structurants. Les équipements sportifs de proximité en pâtiront, ces stades, ces salles, ces piscines qui sont porteurs d'un véritable intérêt général et essentiels pour soutenir le mouvement sportif et contribuer à l'aménagement du territoire, en prenant en considération les spécificités du milieu rural, des zones sensibles ou des bassins de vie dépourvus d'infrastructures. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)