Elle montre à l'évidence qu'il est nécessaire, et je rejoins en cela Mme Zimmermann, de faire entrer un jour dans le réel les habituelles incantations que nous entendons chaque fois que nous avons à débattre de ces sujets.
Beaucoup de mes amis ont développé des points particuliers. Je n'en prendrai qu'un seul, celui de la précarité professionnelle, qui touche plus particulièrement les femmes.
Entendons-nous précisément sur cette notion de précarité. Il s'agit d'un phénomène de morcellement du temps de travail : un travail émietté entre une multitude d'employeurs, éparpillé sur une multitude de lieux de travail, disloqué sur des plages horaires disparates.
Ces journées chaotiques sont le sort des travailleurs pauvres. Or 80 % des travailleurs pauvres sont des travailleuses. Chers collègues de la majorité, non seulement les lois ne sont pas appliquées, mais celles que vous votez aggravent cette situation. Je ne prendrai qu'un exemple, celui de la loi, récemment adoptée, relative au développement des services à la personne.
On a beaucoup dit que ces services à la personne constituaient l'espoir de nouveaux emplois. Mais force est de constater que c'est justement dans ce secteur qu'il y a le plus d'emplois précaires, lesquels concernent d'abord les femmes.
Cette résolution aurait pu être l'occasion d'indiquer quelques pistes pour lutter contre le travail précaire, mais elle ne le fait pas.
Le débat sur la dépendance s'ouvrira dans quelques mois. Il va inévitablement, du moins je l'espère, nous amener à accroître les possibilités d'intervention visant à accompagner les personnes âgées dépendantes. Mais si l'on n'a pas corrigé les travers dont souffrent les emplois dans ce secteur des services à la personne, le risque est d'aboutir à une loi qui aggravera ce problème, et qui aggravera donc, par là même, la situation des femmes.
L'INSEE indique qu'en 2009, 697 000 femmes sont dans la situation d'employés pauvres, alors que 11 000 hommes sont dans ce cas.
Cette résolution pouvait être l'occasion d'indiquer des pistes permettant de contrarier la politique qui rend possible cette précarité. Si tel avait été le cas, nous aurions sans doute pu vous suivre un peu plus.
Mais le 8 mars dernier, alors que j'interrogeais le ministre du travail à l'occasion des questions d'actualité, il me répondit qu'il fallait s'en remettre aux accords de branche. Or, mes chers collègues de la majorité, vous-mêmes disiez tout à l'heure que les accords de branche ne suffisaient pas. Il va donc bien falloir que, sur certains points, une loi soit adoptée afin d'empêcher la fragmentation du travail par la professionnalisation des travailleuses pauvres, d'aborder la question de leur formation qualifiante, ou encore celle du renforcement de l'intermédiation.
Il est parfois nécessaire d'imposer des contraintes aux employeurs, et de se donner les moyens de vérifier si elles sont observées. Certains collègues ont évoqué l'inspection du travail mais, en même temps, le budget pour 2011 a diminué ses moyens.
Au bout du compte, mon sentiment, c'est que cette résolution, dont une collègue a dit tout à l'heure qu'on ne pouvait pas voter contre – et on ne peut pas, en effet, voter contre ce qu'elle contient –, on ne peut pas non plus l'approuver. Franchement, je le repète, j'ai le sentiment que c'est un message interne que la majorité s'adresse à elle-même, un message que nous voulons bien soutenir, d'ailleurs, sur certains points, parce qu'il faut se mobiliser pour faire comprendre à certains qu'il y a des évolutions nécessaires. Mais s'il s'agit de cela, disons-le entre nous. Personne ne le saura. Ce sera utile pour convaincre certains membres du Gouvernement, si j'ai bien compris les messages subliminaux.
En tout cas, ce que nous voulons, c'est travailler de manière forte, comme cela a été fait sous la présidence de Mme Zimmermann, pour aboutir, avec de vraies capacités d'intervention. C'est ainsi que nous pourrons enfin oeuvrer pour l'égalité entre les femmes et les hommes, ce que ne permettra pas, malheureusement, l'adoption de cette résolution. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)