Nous le savons aujourd'hui, la loi seule ne suffit pas. Si l'égalité ne progresse plus en France c'est qu'elle connaît un blocage culturel, un blocage des mentalités, un blocage lié à une vision sexuée de notre société.
Les stéréotypes sur l'image de la place de l'homme et de la femme dans la société, sur la spécialisation des rôles et des tâches qui existent dès l'école, dans la famille, à l'arrivée des enfants, dans l'entreprise – et je ne parle pas de la vie politique – créent des verrous. Ce sont les principaux freins à l'égalité, des facteurs très puissants de discrimination.
Dans un rapport rendu en 2009, Mme Grésy soulignait déjà que les stéréotypes créent des blocages très difficiles à dépasser sur la place des femmes et des hommes dans la vie privée et au travail. En réalité, disait-elle – sans doute n'avons-nous pas fait suffisamment attention à cela – la clé de l'égalité ne se trouve pas dans les lois, mais dans le partage de toutes les tâches, des soins apportés aussi bien aux enfants qu'aux personnes dépendantes. Cette déspécialisation des rôles passe par l'éducation, la vie à la maison, où les femmes assurent encore 80 % des taches ménagères et les deux tiers de la parentalité, par l'école, dans le choix des métiers et de l'orientation, mais aussi et surtout au travail.
De nombreuses études, que nous n'avons pas assez exploitées, montrent que les femmes et les hommes souhaiteraient accorder plus de place à leur vie familiale et avoir un équilibre entre vie familiale et vie professionnelle. La revue de la CFDT adressée aux cadres au mois de décembre 2010 avait un intitulé ainsi formulé : « Égalité, paternité, liberté ». Quelle belle devise qui cherche à concilier parité et parentalité !
Il faut dire et redire que la répartition sexuée des rôles est historique et sociale. Elle n'a pas de base naturelle. L'homme et la femme peuvent parfaitement partager les rôles et les responsabilités, sans remettre en cause leur identité.
C'est un nouveau modèle social que nous devons inventer et c'est pourquoi les politiques publiques y ont toute leur place – il ne s'agit pas que de la sphère privée – d'autant que ces questions de conciliation ont souvent conduit à des politiques et des aménagements en direction des femmes.
Il est prouvé aujourd'hui que les mesures ciblées sur les femmes depuis une vingtaine d'années sous forme d'incitation au retrait temporaire du travail aboutissent à des carrières interrompues, aux promotions moins favorables, aux parcours chaotiques. Elles se retournent contre les femmes et deviennent discriminatoires. Le congé parental issu de la loi de 1994 a fait chuter le taux d'activité des femmes.