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Intervention de Serge Blisko

Réunion du 22 mars 2011 à 15h00
Droits et protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSerge Blisko :

… qui suivra la personne bien des années après sa sortie de l'hôpital, sans que nous ayons pu obtenir la moindre indication sur la durée de ce suivi, qui constitue en réalité une surveillance policière.

Il a fallu une décision du Conseil constitutionnel pour imposer le droit de regard du juge des libertés ; et nous avons été très surpris et déçus de constater que plusieurs amendements ne visaient qu'à encadrer ce droit de regard et à le subordonner à l'autorité administrative ou au procureur de la République.

Enfin, vous avez prestement étendu la notion de soins sans consentement, au-delà de l'hôpital, au suivi en ambulatoire. Du fait de ce changement de philosophie, que vous avez tous signalé, les équipes soignantes aborderont les malades avec défiance et crainte plutôt qu'en usant du dialogue, qui, si difficile puisse-t-il être, aurait permis de faire adhérer le patient à un traitement parfois très long et lourd. En outre, le contrôle et la pratique de ces soins sans consentement en ambulatoire n'ont fait l'objet d'aucune indication. Dès lors, l'intimité et le secret professionnel risquent d'être facilement piétinés.

Enfin ce texte ne remédie pas aux situations dramatiques que vivent des patients hospitalisés d'office dans des conditions qui ne sont ni éthiques, ni contrôlées juridiquement, ni validées médicalement, comme en a témoigné, récemment, le cri d'alarme du contrôleur général des lieux privatifs de liberté.

Nombre de ces mauvaises pratiques doivent être mises en rapport avec le manque criant de moyens humains dont souffre l'offre de soins psychiatriques dans notre pays. Ainsi, mille postes de psychiatres ne sont pas pourvus dans nos hôpitaux publics ; des demandes de consultation pour des patients en crise ne sont pas satisfaites avant plusieurs semaines, voire plusieurs mois pour les adolescents, par exemple ; les lits d'hospitalisation aiguë sont de plus en plus rares et les structures d'aval – foyers thérapeutiques, appartements d'accueil, hôpitaux de jour, consultations en centre médico-psychologique – de plus en plus souvent victimes de restrictions budgétaires graves. Les crédits de recherche alloués à la psychiatrie sont insignifiants.

De ce fait, nos rues et nos prisons sont remplies de personnes malades, abandonnées, pas du tout ou très mal suivies alors que leur état de santé mentale est très dégradé.

Il y a cinquante ans, la psychiatrie française, en ouvrant résolument les portes de l'asile, comme l'on disait à l'époque, et en fondant le soin de santé mentale sur l'organisation en secteurs psychiatriques, entamait un parcours novateur, qui a donné l'exemple à bien des pays. Aujourd'hui, la psychiatrie française est sinistrée et ce projet de loi, par ses présupposés sécuritaires, nous renvoie en arrière, avant même la loi fondatrice de 1838.

Face à cette déconvenue, qui ne causera que souffrances aux patients, à leurs familles et aux professionnels de la santé mentale, le groupe socialiste vous appelle, mes chers collègues, à refuser ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur plusieurs bancs du groupe GDR.)

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