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Intervention de François Fillon

Réunion du 22 mars 2011 à 15h00
Déclaration du gouvernement sur l'intervention des forces armées en libye et débat sur cette déclaration — Application de l'article 35 alinéa 2 de la constitution

François Fillon, Premier ministre :

Le Président de la République, fidèle aux valeurs qui fondent notre nation, s'est refusé à une telle indignité. Avec le soutien déterminant du Royaume-Uni, il a su faire appel au courage de la communauté internationale et imposer au régime de Kadhafi une épreuve de force.

Pourquoi la France s'est-elle ainsi mobilisée ? Parce que la répression du peuple libyen se nouait sous nos yeux. Parce que cette répression ne doit pas sonner la fin d'une espérance qui transcende les frontières.

Toute la région est en effet parcourue par une puissante onde de choc démocratique, dont la portée peut se révéler historique. Même s'ils ont chacun leurs spécificités, ces mouvements révèlent la force des idéaux universels, ces idéaux humanistes trop souvent moqués, trop souvent accusés d'être le privilège de nos vieilles démocraties.

Eh bien non, ces idéaux sont présents dans les coeurs de tous les peuples et ils peuvent se dresser et changer l'histoire ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Le mur de la peur est tombé ! Et en tombant, il démontre qu'il n'y a pas de fatalité, pour les populations de cette région, à être enfermées dans un choix binaire entre pouvoir autoritaire et régime islamiste.

Bien sûr, le chemin vers la démocratie sera sans doute long et difficile et ses conséquences sur la stabilité de la région sont encore incertaines.

Mais ce mouvement représente, pour les peuples concernés, un formidable espoir de pouvoir vivre libres et dignes. Formidable espoir pour nous aussi, car ces mouvements sont porteurs d'une nouvelle relation entre l'Occident et l'Orient. Entre les rives nord et sud de la Méditerranée, c'est bien une nouvelle donne politique, économique et culturelle qui peut se dessiner. Notre responsabilité est d'accompagner ce « printemps des peuples arabes » et de tout faire pour qu'il réussisse.

Ne pas intervenir en Libye, c'était donner un blanc-seing à Kadhafi et à ses séides. C'était signifier à tous ceux qui ont soif de démocratie et de respect des droits de l'homme que les changements en Tunisie et en Égypte n'étaient finalement qu'un feu de paille. Ne pas intervenir, c'était constater que le mur de l'oppression reste plus fort que le souffle de la liberté.

Nous ne pouvions pas accepter ce scénario.

L'usage de la force, mesdames et messieurs les députés, ne s'est pas imposé du jour au lendemain. Il est le résultat d'une longue série d'actions diplomatiques destinées à enrayer la violence. Il est le résultat d'une dérive meurtrière que rien ne semblait pouvoir arrêter.

Dès le début de la crise en Libye, la France a pris l'initiative d'exiger des sanctions contre le régime libyen aux Nations unies comme au sein de l'Union européenne ; d'impliquer la Cour pénale internationale qui, pour la première fois, a été saisie dès le début d'une crise à l'unanimité du Conseil de sécurité, pour des actes pouvant relever du crime contre l'humanité ; d'acheminer une aide humanitaire massive à l'hôpital de Benghazi et à la frontière tuniso-libyenne ; d'aider au retour des milliers de réfugiés fuyant les combats avec un pont aérien entre la Tunisie et leur patrie d'origine.

La France s'est battue sans relâche pour convaincre, dans toutes les enceintes internationales comme avec tous ses partenaires occidentaux, arabes et africains : au Conseil de sécurité des Nations unies, qui a adopté une première résolution, dès le 26 février ; lors du Conseil européen du 11 mars sous l'impulsion de Nicolas Sarkozy et David Cameron ; lors de la réunion des ministres des affaires étrangères du G8 à Paris, les 14 et 15 mars.

Parallèlement, d'autres organisations régionales se sont aussi mobilisées.

L'Union africaine a souligné la légitimité des aspirations du peuple libyen à la démocratie et à la justice.

Le 12 mars, et c'est là un des tournants de la gestion de cette crise, le Conseil des ministres de la Ligue des États arabes lançait un appel au Conseil de sécurité afin qu'il impose immédiatement une zone d'exclusion aérienne et qu'il assure la protection des populations civiles.

Le Secrétaire général de l'Organisation de la Conférence islamique a lui-même condamné les violations graves des droits de l'homme et du droit international en Libye.

Tous ces appels pressants de la communauté internationale, tous ces avertissements, toutes ces sanctions, n'ont malheureusement pas infléchi la froide détermination du régime libyen. Dès lors, l'emploi de la force devenait la seule solution.

Vis-à-vis des États qui, il y a quelques jours encore, hésitaient sur la nécessité d'une intervention en Libye, nous avons toujours été clairs.

Clairs en rappelant que le temps et l'inaction jouaient en faveur du régime libyen.

Clairs en précisant que toute intervention en Libye devait avoir pour objectif de protéger les populations civiles.

Clairs en conditionnant toute intervention à quatre préalables :

Un besoin avéré sur le terrain. Qui ne le constate ?

Un appui des pays de la région. L'appel de la Ligue arabe nous l'apporte.

Une base juridique solide. Nous l'avons avec l'adoption de la résolution 1973 du Conseil de sécurité, en faveur de laquelle le Président de la République avait lancé un appel solennel la veille du vote et Alain Juppé joué un rôle clé en se rendant à New York pour la défendre. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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