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Intervention de Serge Blisko

Réunion du 16 mars 2011 à 21h30
Droits et protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques — Article 3, amendement 120

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSerge Blisko :

J'essaie de vous décrire ce qu'est la chambre d'un hôpital psychiatrique !

Évidemment, dans cette chambre, il n'y a aucun objet tranchant. Certaines personnes sont soumises à des contentions, dorment même dans des espèces de sacs de couchage extrêmement primitifs et non dans des draps pour éviter qu'elles ne se suicident. Au mieux, leur espace de sortie se résume à un petit bout de jardin – cela ne ressemble ni au parc de Sceaux, ni à celui du château de Versailles – où elles fument plus que de raison parce qu'elles s'ennuient mortellement.

J'ajoute que, si elles peuvent regarder la télévision dans une salle commune, elles sont tellement abruties par les médicaments qu'elles ne lui prêtent qu'une attention flottante.

Monsieur le président, pardonnez-moi de me livrer à une telle description, mais c'est la réalité que vivent beaucoup de nos concitoyens dans les hôpitaux. Ils prennent des médicaments et au bout de quelque temps on regarde s'ils vont mieux. Bien évidemment, tout cela s'accompagne de grandes souffrances morales car ils se rendent bien compte, une fois l'épisode critique aigu passé, qu'ils ne sont pas libres d'aller et venir. Ils n'ont pas le téléphone et la famille rencontre toujours des difficultés en matière de visite, même si sur ce point des progrès ont été faits récemment.

Ces personnes font confiance à l'équipe soignante parce qu'elles savent qu'un jour on va discuter de leur cas, qu'elles vont pouvoir passer dans un autre secteur de l'hôpital ou aller dans un foyer ou un appartement thérapeutique faute de pouvoir rentrer chez elles. Elles savent que, pour leur santé, il sera important qu'elles voient chaque semaine un psychiatre ou une équipe d'infirmiers dans un centre médico-psychologique, et qu'elles pourront toujours appeler si elles ne vont pas bien.

À la sortie, il faut affronter le regard de la famille, des collègues de travail, de la collectivité. Ce n'est pas facile. Je reste persuadé qu'il faut aider ces personnes avant de leur faire subir des coercitions supplémentaires.

L'équipe soignante ne prend jamais de décision à la légère. Si c'était le cas, il y aurait beaucoup plus de drames que nous n'en connaissons. Certes, on ne parviendra jamais à un niveau de protection maximum, à un risque zéro, car on ne peut jamais être certain de ce qui peut se passer avec certains patients, mais faisons un peu confiance à cette équipe, très consciencieuse, je dirai même très angoissée quand elle prend des décisions.

Le préfet qui n'est pas psychiatre, qui ne connaît pas les conditions de travail ni d'hospitalisation, peut boucler des gens hors de tout avis médical au seul motif qu'il a reçu un ordre du ministère de l'intérieur qui émane lui-même du Président de la République. Or, si les patients restent enfermés alors qu'un avis médical les autorise à sortir, ils n'adhéreront plus au traitement. Ils auront le sentiment, à juste titre, d'être maintenus dans une situation qui n'est plus une hospitalisation sous contrainte mais une situation, extrêmement dommageable, de rétention, voire d'emprisonnement et ils n'auront de cesse de tout faire – y compris ce qu'il ne faut pas faire – pour sortir.

Si le préfet n'est pas d'accord avec l'avis des psychiatres, il faut faire en sorte que la décision tende à favoriser au maximum la sortie pour la réinsertion et la guérison éventuelle.

(L'amendement n° 120 est adopté.)

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