Je vous remercie de votre invitation ; pour répondre à vos questions, je suis accompagné du vice-président de l'ASMEP-ETI, M. Philippe d'Ornano, directeur général du groupe de cosmétiques Sisley, ainsi que du secrétaire général et par ailleurs président de la commission fiscale de notre organisation, M. Georges Gaspard, président de Lyreco, un groupe spécialisé dans la distribution de fournitures de bureau. J'ai moi-même fondé avec mon frère, en 1952, la société d'électronique Radiall dont je préside encore le conseil de surveillance.
Avant d'aller plus loin, je souhaite rappeler ce que sont les entreprises de taille intermédiaire – les ETI. Le premier critère, vous l'avez mentionné M. le Président, est celui du nombre de salariés compris entre 250 et 5 000. L'entreprise doit également réaliser un chiffre d'affaires inférieur à 1,5 milliard d'euros. Enfin, le bilan de l'entreprise doit faire apparaître un total ne dépassant pas 2 milliards d'euros pour être qualifiée d'ETI. Ces critères stricts posent quelques difficultés dans la pratique, ce qui a justifié une appréciation assez souple.
Cette catégorie nouvelle est née en 2008, par la volonté du Président de la République et avec l'aide du secrétaire d'État aux PME d'alors, M. Hervé Novelli. Elle complète ainsi la typologie constituée par les très petites entreprises, les TPE, petites et moyennes entreprises, les PME, et grands groupes.
Ces ETI ont très majoritairement un caractère patrimonial, c'est-à-dire que les dirigeants effectifs disposent d'une part significative du capital. On peut distinguer les entreprises familiales, dans lesquelles il existe un lien de parenté entre les actionnaires, les entreprises personnelles, dirigées exclusivement par leurs fondateurs ou via une fondation, et les entreprises nouvellement créées par des associés non apparentés.
Dans notre pays, il n'y a aujourd'hui pas plus de 4 600 ETI alors que le Royaume-Uni en compte près de 10 000 et l'Allemagne plus de 12 000. Pourtant, ces entreprises représentent 21 % de l'emploi salarié, 30 % des exportations, un tiers des innovations et 61 % des entreprises cotées. Ce sont des entreprises assez grandes pour être fortes mais encore suffisamment petites pour demeurer indépendantes. Cette souplesse est un gage d'adaptabilité.
J'en viens maintenant aux remarques de l'ASMEP-ETI sur la fiscalité des entreprises, qui justifient cette audition.
En premier lieu, la fiscalité française ne tient pas suffisamment compte de la taille des entreprises. Il ne faut pas, selon nous, assimiler les ETI aux grands groupes et appliquer aux unes les mêmes règles qu'aux autres.
La stabilité des règles fiscales paraît insuffisante. Chaque modification de ces règles devrait être accompagnée d'un engagement de durée minimale de cinq ou dix ans. Cette instabilité est la raison qui pousse certains entrepreneurs à s'exiler à l'étranger.
Notre système fiscal gagnerait à être simplifié. Croyez-moi, les chefs d'entreprise préfèrent par-dessus tout la simplicité ! L'allègement de la fiscalité est également une priorité : c'est le seul moyen de stopper les expatriations à visée fiscale, qui s'accélèrent encore à l'heure actuelle. Je recommande de remettre en cause les centaines de niches, qui pèsent sur notre fiscalité.
Je vais détailler davantage nos propositions concernant la fiscalité du patrimoine. Il s'agit, vous l'avez compris, d'un enjeu décisif pour des entreprises patrimoniales comme les nôtres.
Tous les chefs d'entreprise que nous avons consultés s'accordent à préconiser la suppression de l'impôt de solidarité sur la fortune, l'ISF, le jugeant nocif pour la stabilité de l'actionnariat des entreprises.
S'agissant des droits de succession, la problématique est similaire mais la situation est moins défavorable, en comparaison des pays étrangers, grâce à la mise en place d'engagements de conservation des titres – dits pactes fiscaux « Dutreil » – qui permettent de transmettre un actif professionnel en bénéficiant d'un abattement de 75 % sur la valeur des titres.
Enfin, j'en termine avec le sujet majeur qu'est la fiscalité des plus-values. Il me semble qu'il faut se garder, en la matière, de confondre l'investisseur et le spéculateur. Le premier conserve ses parts dans l'entreprise pendant des décennies quand le second ne vise que le gain de court terme. L'ASMEP-ETI préconise plutôt d'appliquer aux plus-values sur les valeurs mobilières un régime fiscal inspiré de celui des plus-values sur cessions immobilières, à savoir un amortissement linéaire sur quinze ans.