Madame la présidente, monsieur le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, mes chers collègues, nous entamons la deuxième lecture du projet de loi relatif à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité. Ce texte avait suscité de nombreux débats lors de son premier passage à l'Assemblée, en octobre dernier, et les nombreuses avancées obtenues au cours des discussions l'avaient considérablement enrichi. Nos collègues sénateurs l'ont examiné il y a quelques semaines. Des modifications ont été apportées et la commission des lois de l'Assemblée est revenue sur certaines d'entre elles.
Tout d'abord, je tiens à rappeler que le projet de loi s'inscrit dans la continuité de la politique menée par le Gouvernement depuis 2002. L'immigration est un sujet complexe avec un principe clé : il s'agit de rechercher l'intégration des étrangers en situation légale et de lutter contre l'immigration illégale.
Les flux migratoires ont changé et il est indispensable de trouver des réponses législatives adaptées aux nouvelles problématiques. La France a le droit de choisir, comme tous les pays du monde, qui elle veut et qui elle peut accueillir sur son territoire : nous ne demandons ni plus ni moins que l'application de la règle qui prévaut dans tous les pays.
Tout étranger en situation irrégulière a vocation à être reconduit dans son pays d'origine, sauf situation particulière, notamment sur les plans humanitaire, politique, sanitaire ou social, qui exige un examen individualisé de la demande. Un étranger accueilli légalement sur notre territoire a, pour l'essentiel, les mêmes droits économiques et sociaux que les Français. La France entend mener une politique migratoire non seulement humaine et fidèle à sa tradition d'accueil, mais aussi ferme dans sa lutte contre l'immigration clandestine.
Contrairement à ce qui a souvent été dénoncé par l'opposition, ce texte est nécessaire, tout d'abord pour transposer trois directives européennes, ensuite pour répondre à une évolution de la société.
Le présent projet s'inscrit dans la logique européenne en permettant la transposition de trois directives européennes, participant ainsi à la construction progressive d'une politique européenne de l'immigration et de l'asile, complément de l'espace de libre circulation issu des accords de Schengen. Ces trois textes ont une incidence sur le droit national : la directive « sanctions » renforce l'arsenal juridique destiné à lutter contre le travail illégal d'étrangers sans titre de séjour ; la directive « carte bleue européenne » conduit à créer un nouveau titre de séjour sans remettre en cause les principales règles de l'admission au séjour des travailleurs salariés ; enfin, la directive « retour » impose d'adapter le droit national en raison d'une nouvelle approche du droit de l'éloignement des étrangers.
Nos voisins européens mènent des politiques d'immigration en phase avec le droit européen et la France doit impérativement s'y conformer en transposant ces directives. Je tiens, à ce titre, à rappeler que le texte transcrit dans notre droit une partie du pacte européen sur l'immigration et l'asile que le Gouvernement avait fait adopter lors de la présidence française de l'Union européenne et je rappelle que nos partenaires s'étaient prononcés à l'unanimité en sa faveur.
La société change et évolue. Nous ne pouvons que le constater avec les révolutions qui se déroulent actuellement en Afrique du Nord. Il est nécessaire de repenser la politique d'immigration pour s'adapter aux nouvelles donnes sociales. Les flux migratoires ont changé et il est indispensable de trouver des réponses législatives adaptées aux nouvelles problématiques.
Voilà donc tout l'enjeu de ce texte : adapter la législation en vigueur aux évolutions sociétales et s'inscrire dans la continuité de la politique menée en matière d'immigration.
Je tiens à saluer l'implication et le travail du rapporteur Claude Goasguen. De manière plus générale, je remercie l'ensemble des parlementaires du groupe UMP qui portent ce projet de toutes leurs convictions. Il s'agit d'une deuxième lecture et je vous demande, chers collègues de l'opposition, de ne pas faire d'obstruction et de participer à ce débat de manière claire et intelligible afin de parvenir à un texte utile et équilibré.
Nous devons nous attacher à revenir sur certaines décisions prises par le Sénat.
S'agissant de la réforme du contentieux judiciaire pour l'expulsion des sans-papiers, la mesure approuvée en première lecture par les députés prévoyait de retarder l'intervention, en rétention, du juge des libertés et de la détention à cinq jours au lieu de deux actuellement. Elle visait à une meilleure efficacité des procédures d'éloignement puisque, actuellement, moins de 30 % des sans-papiers placés en rétention sont finalement reconduits aux frontières. La commission des lois de l'Assemblée nationale a rétabli la modification procédurale rejetée par le Sénat.
De même, le Sénat a supprimé la pénalisation des « mariages gris », définis comme « fondés sur une tromperie volontaire ». Les sénateurs ont en effet choisi d'intégrer le fait de « dissimuler ses intentions à son conjoint » dans la législation sur les mariages frauduleux ou blancs et de conserver l'actuelle échelle des peines de cinq ans d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende, contre sept ans d'emprisonnement et 30 000 euros d'amende votés initialement par les députés. La commission est revenue sur cette disposition.
J'en viens aux conditions de délivrance d'un titre de séjour accordé à un étranger malade. Cette disposition a été supprimée par le Sénat puis réintégrée par la commission des lois de l'Assemblée. L'article 17 ter, introduit par l'Assemblée en première lecture, conditionne la délivrance d'un titre de séjour accordé à un étranger malade à l'inexistence de soins appropriés dans l'État d'origine. Cette disposition fait suite à une jurisprudence du Conseil d'État qui adopte – le rapporteur l'a rappelé – une interprétation très extensive de la notion d'accès aux soins. Cette jurisprudence faisait en effet peser sur le système de santé français une obligation déraisonnable, ouvrant un droit au séjour potentiel à tout étranger ressortissant d'un pays ne bénéficiant pas d'un système d'assurance social comparable au nôtre.
L'article 17 ter visait donc à mieux encadrer les conditions de délivrance de la carte de séjour temporaire accordée en raison de l'état de santé en reprenant dans la loi l'interprétation initiale de cette disposition par le Conseil d'État. Il est essentiel d'encadrer strictement les conditions de délivrance d'un titre de séjour accordé à un étranger malade et la suppression de cette disposition par nos collègues sénateurs n'est pas justifiée.
Le texte voté par l'Assemblée en octobre dernier était complet, utile et équilibré. Il est indispensable de voter un projet fidèle à la politique menée par le Gouvernement et cohérent avec la réalité de la société. Ce texte constitue une étape supplémentaire fondamentale et contient les outils nécessaires à la réalisation des objectifs fixés en matière d'immigration.
Il s'agit d'enclencher une politique crédible et efficace. Le projet de loi met en place une politique d'immigration ferme mais généreuse. Ferme car, comme tous les autres pays, la France a le droit d'accueillir sur son territoire qui elle veut, mais elle doit aussi lutter contre les filières clandestines. Une politique généreuse, ensuite, car notre pays reste une terre d'accueil et en est fier. Le grand projet de ce texte est donc de proposer un nouveau modèle pour l'immigration sur le territoire national, dans la continuité de la politique gouvernementale, tout en s'adaptant aux évolutions européennes et sociétales. La France respecte les immigrés par sa tradition d'accueil et d'intégration, et, dans le même temps, lutte fermement contre l'immigration irrégulière.
Mes chers collègues, je ne peux que souhaiter une discussion efficace et des débats intéressants sur un sujet aussi important et sensible que l'immigration. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)