Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Catherine Coutelle

Réunion du 8 mars 2011 à 15h00
Hommage de l'assemblée — Explications de vote communes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCatherine Coutelle :

Grâce aux sénateurs, vous avez compris que le contrôleur général des lieux de privation de liberté ne pouvait être dissous dans cette superstructure. Mais pour toutes les autres autorités, vous avez refusé d'admettre les nombreux problèmes posés par ces dispositions.

Je prendrai l'exemple du Défenseur des enfants. En dépit de l'alarme donnée par l'actuelle Défenseure, des interpellations du réseau européen de défense des droits des enfants, de l'important travail mené par l'Unicef, de nos protestations et des amendements déposés par certains députés de la majorité en deuxième lecture, vous n'avez pas voulu modifier ces textes.

La suite de l'histoire est connue. En procédant ainsi, c'est-à-dire en arrachant un vote dans la protestation générale, vos textes ne sont guère durables. S'ils ne sont pas sanctionnés par le Conseil constitutionnel, ces projets de loi connaîtront une application difficile. Dans quelques mois, vous constaterez les erreurs commises et vous devrez peut-être procéder à des ajustements, comme ce fut le cas pour d'autres textes.

Notre première interrogation a porté sur la lisibilité et l'efficacité du Défenseur des droits aux missions si larges. Alors que les comités internationaux saluent les efforts faits en France depuis dix ans pour entendre la voix des enfants, nous serons le premier pays d'Europe à supprimer l'indépendance de leur défenseur. La HALDE, que l'un d'entre vous citait comme « une étape fondamentale pour notre pacte républicain », a rendu plus compréhensible la notion de discrimination et traite un nombre considérable de plaintes, 10 000 par an. Les dispositions des deux textes affaiblissent des autorités qui commençaient à trouver toute leur place.

Ensuite, notre principale inquiétude porte sur la question démocratique : la concentration du pouvoir et l'indépendance du Défenseur.

Le rapporteur au Sénat disait qu'il « ne fallait pas que le Défenseur des droits se transforme en un dictateur des droits ayant tous les pouvoirs ». Les conditions de nomination ne sont pas de nature à nous rassurer tout comme elles inquiétaient, il y a un an déjà, la commission nationale consultative des droits de l'homme.

En désignant le Défenseur en conseil des ministres sur proposition du Président de la République, vous le privez d'une autorité, d'une légitimité et d'une indépendance indispensables qu'aurait pu garantir une élection à la majorité positive des trois cinquièmes du Parlement.

Non seulement vous n'avez pas entendu l'opposition, mais vous avez surtout cherché à renforcer le contrôle que vous exercerez sur le Défenseur.

Le Sénat avait rétabli la consultation systématique des collèges, renforcé le rôle des adjoints et obligé le défenseur à motiver ses avis. Dans un bras de fer déroutant, vous avez rétabli le pouvoir absolu et solitaire de l'homme ou de la femme qui aura à traiter tous les dossiers sans avoir à justifier ses refus.

Encore ces dernières semaines, des députés de votre majorité ont tenté d'apporter un peu de collégialité dans les décisions et d'éviter l'arbitraire en demandant de motiver les refus de saisines.

Malgré quelques améliorations, le texte final vous conforte dans votre objectif de faire taire ceux qui dérangent.

Je m'adresse aux parlementaires de la majorité qui ont pu parfois être gênés par ces dispositions. Je veux leur dire que le texte, dans sa version finale, reste dangereux pour notre République, et qu'il constitue, comme nous l'avions craint, un vrai recul pour les droits et les libertés des citoyens.

Vous deviez convaincre et rassembler. Or la population et ceux qui oeuvrent pour la défense des droits s'inquiètent de cette réforme.

Aussi, le groupe socialiste, radical et citoyen votera contre ces deux projets de loi. Nous vous donnons rendez-vous dans un an pour voir si le Défenseur des droits aura travaillé sur les discriminations dont sont victimes les femmes au travail, comme le fait aujourd'hui la HALDE. Pour voir si le Défenseur des droits aura publié un rapport sur l'enfance et la précarité, comme vient de le faire la Défenseure des enfants, et continuera à dénoncer la présence d'enfants en centres de rétention. Pour voir si le Défenseur des droits s'emparera de la question de la garde à vue.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion