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Intervention de Hervé Schricke

Réunion du 2 mars 2011 à 11h15
Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Hervé Schricke, président de l'Association française des investisseurs en capital :

Il ne s'agit pas de prélever immédiatement un montant significatif sur le stock de 75 milliards d'euros que représente la partie non centralisée des livrets d'épargne, mais de mettre en place un système évolutif pour investir quelques points en fonds propres. Aux termes du dispositif actuel, les banques ou le réseau collecteur ne peuvent affecter ces montants qu'au crédit. On pourrait encourager leur affectation à des fonds propres ou à des quasi-fonds propres, auxquels on associerait des revenus afin de rassurer les investisseurs. De leur côté, les PME qui hésitent à sauter le pas et à s'en remettre à un actionnaire, seraient plus à l'aise si elles pouvaient disposer de capitaux en s'habituant progressivement à être en relation avec des tiers.

L'innovation est une notion difficile à définir. Au sein des pays développés, caractérisés par l'accumulation de matière grise, la France se caractérise par le fait qu'en vingt ans elle n'a pas vu la création de grands groupes liés aux technologies, alors qu'aux États-Unis le classement des 500 premières entreprises a été fortement bousculé par ce qu'on peut appeler l'« innovation » ou la « technologie », encore que le second terme soit réducteur, car le monde d'Internet et de la mobilité n'est pas conduit par la seule technologie.

Notre économie, qui dispose d'importantes capacités scientifiques et d'innovation, est cependant soumise aux risques. La France est un pays relativement petit, et son marché est restreint. Or l'accès aux marchés voisins n'est pas aussi aisé qu'il pourrait le paraître. Malgré notre appartenance à l'Union européenne, il reste difficile et risqué de vendre en Allemagne. Depuis dix ans, les performances du capital-risque européen, qui avaient été convenables au cours de la décennie précédente, se sont révélées décevantes. Même si cette situation renforce les réticences, la prochaine décennie me semble encourageante du fait que les individus, à titre professionnel ou privé, entendent élaborer de nouvelles formes d'échanges et de transactions, qui se développeront très vite.

Il est important que notre pays soit dans la course. Il existe un potentiel important en Europe, qui permettra d'améliorer les performances des fonds.

On peut faire la même analyse en ce qui concerne le secteur des biotechnologies. Les groupes pharmaceutiques ont peu investi depuis dix ou vingt ans, laissant les start-up le faire à leur place. Au cours des dernières années, la capacité financière ou le désir d'acheter les entreprises technologiques à des valorisations suffisantes leur a manqué mais, dès lors qu'ils disposent de capacités financières, ils les rachètent ou les rachèteront.

Innovation et technologie constituent donc un vrai sujet. Le seul soutien à l'investissement dans les petites entreprises, pour s'en tenir à la définition européenne, ne me semble pas une réponse appropriée à cet enjeu mondial.

Les règles de Solvabilité 2 s'appliquent à nos souscripteurs. Historiquement, les compagnies d'assurance représentaient environ 30 % des souscriptions à nos fonds, mais le chiffre est tombé à 10 % en 2009, et celui de 2010 est catastrophique, d'autant qu'il n'existe aucune solution de remplacement. Certes, on peut imaginer des incitations pour orienter l'épargne, mais elles devront s'adresser aux mêmes souscripteurs. Pénalisées par Solvabilité 2, les compagnies d'assurance, qui avaient déjà eu du mal à tenir leur engagement d'investir à 2 %, sont plus que jamais réticentes à maintenir ce taux dans les secteurs où se trouvent les gisements à long terme.

Une manière de résoudre le problème réglementaire serait de créer un effet de levier, grâce à un système de garantie géré par OSÉO. Le dispositif s'apparenterait à une caution mutuelle, sans qu'il soit nécessaire de disposer de la totalité du montant garanti. On réduirait ainsi le besoin en fonds propres des compagnies d'assurance et des banques. Puisque la Banque européenne d'investissement a prévu un programme dédié à l'innovation, une partie des capitaux pourrait être orientée vers un fonds de caution mutuelle, qui réduirait l'impact des ratios de solvabilité. On traiterait ainsi le mal à la racine, car c'est bien le ratio qui est en cause, plus que le risque. L'investissement en capital investissement désensibilisant les compagnies d'assurance au risque, le système actuel va à l'encontre de la réalité économique.

Les critiques que j'ai formulées à l'égard du dispositif DSK et du renforcement du dispositif Madelin sont dictées par l'expérience. L'intention était intéressante, d'autant que, comme l'a suggéré M. de La Porte du Theil, on peut utiliser des unités de compte en support. Les compagnies d'assurance ont quelques réticences à cet égard, parce qu'elles craignent que les produits ne soient difficiles à vendre, mais les unités de compte ont pour avantage de ne pas figurer au bilan des compagnies d'assurance, et donc de ne pas être soumises aux règles de Solvabilité 2. Pour orienter vers elles une partie des capitaux, il faudrait instaurer un avantage fiscal significatif, sans doute à l'entrée, alors que le dispositif DSK permettait seulement, à terme, de réduire de 7,5 % l'impact fiscal sur les contrats contenant 50 % d'actions, dont 5 % sur le nouveau marché ou le non-coté. L'avantage n'était pas visible pour les souscripteurs, lesquels ont en revanche fort bien perçu le risque, les Français étant particulièrement réticents au risque action.

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