Je me réjouis que la commission des Finances de l'Assemblée nationale s'intéresse à UNITAID. L'impact de la crise sur les budgets provoque un affaissement de l'aide au développement. Pourtant, les besoins, eux, sont de plus en plus importants : pour atteindre les objectifs du Millénaire pour le développement, il faut trouver 150 milliards de dollars par an et faire accéder le milliard d'individus qui vit avec moins d'un dollar par jour aux biens publics mondiaux. Il est donc impératif de trouver des financements nouveaux.
Le seul atout d'UNITAID est d'avoir été le premier laboratoire des financements innovants, le premier à avoir transformé une taxe perçue dans un cadre national en instrument multilatéral. Pourquoi pas l'AFD ? Parce que l'AFD est franco-française. UNITAID est certes au départ une idée française – mais aussi brésilienne – et moins de pays que prévu nous ont rejoints, mais il y a tout de même le Chili et la Corée du Sud. Et, au Japon, tous les présidents de groupe de la Diète ont accepté le principe d'une taxe sur les billets d'avion. Petit à petit, nous avançons.
Quant à la fondation Clinton, jamais UNITAID n'a payé de billet d'avion à ses membres, ni même un dollar de ses frais de fonctionnement. Nous réunissons une fois par an quinze experts de santé publique mondiale pour décider où doivent aller les 300 millions d'euros que nous collectons, en fonction des propositions que nous recevons. C'est ainsi que, de même que l'UNICEF a remporté le marché du programme destiné aux femmes enceintes atteintes du sida, la fondation Clinton a remporté l'appel d'offres concernant les enfants atteints du sida. Nous finançons le programme, mais c'est la fondation de Bill Gates qui prend en charge les frais de fonctionnement.
La visibilité, de la France, ou d'UNITAID d'ailleurs, parlons-en. Qui sait que la France donne plus de 150 millions d'euros via UNITAID ? Personne ! La raison en est que les 300 millions d'euros que nous mettons sur la table vont à des opérateurs. Or, en France, depuis que Médecins sans frontières a pris la décision de ne jamais demander de l'argent public, il n'y en a malheureusement plus. Le Quai d'Orsay devrait aider à la création d'un tel outil. La France pourrait alors bénéficier non seulement de l'argent d'UNITAID mais aussi de celui du multilatéralisme. Pour faire savoir que la France donne 300 millions d'euros au Fonds mondial de lutte contre le sida, il faut avant tout des opérateurs de terrain parce que celui qui se préoccupe d'où vient l'argent, c'est celui qui le reçoit. Quand les médicaments sont donnés par des Américains, UNITAID est américaine, mais elle serait française si les Français étaient sur place. Plutôt que de la remettre en cause, il faudrait faire en sorte que la France ait les moyens d'utiliser l'argent. Comparé au bilatéral, le multilatéral a fait la preuve de son efficacité, et rien n'empêche le ministère de la coopération de travailler avec UNITAID pour voir pays par pays comment valoriser l'apport de la France.