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Intervention de Anne-Marie Brocas

Réunion du 9 février 2011 à 10h00
Commission des affaires sociales

Anne-Marie Brocas, directrice de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques, DREES :

Les différentes sources statistiques développées par la DREES sont de trois ordres.

Tout d'abord, l'enquête Handicap-Santé, menée avec l'INSEE, tend à évaluer le nombre de personnes âgées dépendantes, ainsi que leurs caractéristiques en termes d'état de santé et de relations sociales.

Ensuite, un ensemble de sources vise à décrire l'offre de services et de structures capables de répondre aux besoins des personnes âgées dépendantes. Notre enquête sur les établissements pour personnes âgées, en particulier sur les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), rééditée tous les quatre ans, a été complétée en 2007 par une analyse sur les professionnels intervenant à domicile auprès des personnes âgées. La même année, nous avons collecté des données qui nous permettent de mieux connaître les résidents en établissement pour personnes âgées, au travers de leurs types de pathologies et de leurs caractéristiques sociales. Nous disposons également de données sur les personnes dépendantes à domicile.

Enfin, nous disposons de recueils portant sur les aides financières. Tous les ans, le recueil sur les aides sociales départementales traite de l'APA versée par les départements. Depuis la création de cette prestation, un recueil trimestriel de suivi des bénéficiaires permet de suivre sa montée en charge. Un recueil plus récent, contenant toutes les données relatives aux personnes bénéficiaires de l'APA dans 34 départements, a permis de réaliser les études qui vous ont été distribuées ce matin – notamment celles permettant d'évaluer la durée de dépendance – et d'éclaircir le problème de la saturation des plans d'aide ; il nous servira également de base pour traiter de la question du rapport entre les ressources des bénéficiaires de l'APA et les prestations qu'ils perçoivent.

Mon exposé s'articulera en quatre points : les projections, les données financières recueillies au niveau des départements, l'offre et l'APA.

Les projections sur lesquelles nous nous basons sont issues de l'enquête « Handicap invalidité dépendance 1999 » (HID). Elles ont été ajustées au regard de l'évolution de l'APA, dont la montée en charge a été beaucoup plus importante que prévu, et des dernières projections démographiques de l'INSEE. Sur la base de l'enquête « Handicap-Santé 2008-2009 », de nouvelles projections seront réalisées par la commission présidée par M. Charpin.

Conformément à la dynamique résultant de l'évolution démographique, la croissance jusqu'en 2020 du nombre de personnes de plus de 80 ans – âge où l'on est censé entrer dans la dépendance – sera relativement soutenue, puis ralentira entre 2020 et 2030, pour à nouveau s'accélérer à partir de 2030.

La prévalence de la dépendance parmi les personnes de plus de 80 ans renvoie à des hypothèses sur l'évolution de la durée de vie en bonne santé ou en situation d'incapacité – ou sur ce que les démographes appellent la « compression de la morbidité ». Les projections antérieures ont abouti à l'hypothèse centrale d'une stabilité de la période passée en dépendance. Les travaux récents de l'Institut national des études démographiques (INED) mettant en évidence une augmentation des incapacités des quinquagénaires nous amèneront sans doute à revoir les scénarios antérieurs sur l'évolution de la période en incapacité.

Les besoins des personnes dépendantes renvoient à l'évolution du nombre d'aidants familiaux, c'est-à-dire les conjoints pour la moitié d'entre eux et les enfants âgés de 50 à 80 ans pour un tiers – sachant qu'il s'agit massivement de femmes. Leur nombre diminuera très probablement du fait de la dynamique démographique, de l'évolution des structures familiales et des taux d'activité féminins.

Les départements consacrent 40 % de leurs prestations d'aide sociale – soit 1,3 million de prestations – aux personnes âgées. L'APA est versée à 1 150 000 personnes, et l'aide sociale à l'hébergement à 116 000 personnes.

D'après notre dernière analyse publiée en 2007, les disparités départementales en termes d'aides sociales ont eu tendance à se réduire depuis la fin des années 1990, probablement grâce à la mise en place de l'APA. Ces disparités, la DREES a tenté de les expliquer : un département distribue davantage d'aides s'il compte beaucoup de personnes âgées de 75 ans, d'autant plus si les ressources de ces dernières sont peu élevées ; dans les départements riches, les bénéficiaires sont moins nombreux et touchent un montant d'APA plus élevé ; enfin, les départements fortement urbanisés accordent des aides moyennes plus importantes. Ces divers facteurs expliquent 60 % des disparités liées au nombre de bénéficiaires par département et 40 % des écarts en termes d'aide moyenne attribuée par habitant. Ainsi, une part des disparités observées est due à des facteurs sociodémographiques propres aux départements.

La dernière enquête sur les établissements pour personnes âgées a été réalisée en 2007, et nous nous apprêtons à mener une nouvelle enquête dont les résultats seront disponibles l'année prochaine.

Sur la période 2003-2007, l'augmentation des places en maison de retraite – 36 500 – conjuguée à une diminution des places en foyers-logements et en unité de soins de longue durée (USLD) a abouti à la création nette de 9 500 places supplémentaires – qui correspondent au solde entre ouvertures et fermetures résultant de la transformation d'établissements ou de leur regroupement.

Durant la même période, le nombre de places médicalisées – en EHPAD, en USLD non EHPAD et dans certains établissements non conventionnés – a augmenté de 90 000. Le fait marquant est donc la transformation en EHPAD d'un certain nombre d'établissements, associée à leur médicalisation. La prochaine enquête révélera probablement une augmentation de la capacité d'accueil, dans la mesure où trois à quatre ans s'écoulent entre les plans annonçant des créations de places et les places effectivement ouvertes. Ce mouvement de médicalisation s'est traduit par une augmentation du taux d'encadrement des personnels, de 44 équivalents temps plein (ETP) pour 100 places en 2003 à 50 ETP pour 100 places en 2007 – ce taux étant plus élevé en EHPAD (– 57 ETP –) et dans les établissements dont le GIR (groupe iso-ressources) moyen pondéré est supérieur à 800 (– 66 ETP). Cette augmentation concerne principalement les infirmiers et les aides soignants, dont l'encadrement est passé de 22 à 25 ETP, sachant que 400 000 personnes au total sont employées dans les établissements pour personnes âgées.

Le taux d'équipement par habitant a, quant à lui, diminué. Le nombre de places dans les établissements pour personnes âgées est passé de 165 pour 1 000 habitants de plus de 75 ans au milieu des années 1990, à 127 en 2007 : l'augmentation – continue – du nombre de places a, en effet, été inférieure à celle du nombre de personnes âgées. Cette diminution doit être relativisée au regard du recul de l'âge moyen d'entrée en établissement de six mois entre 2003 à 2007 – il est de 80 ans à l'heure actuelle –, de l'alourdissement de la dépendance des personnes en établissement – plus de la moitié d'entre elles relevant aujourd'hui des GIR 1 et 2 –, ainsi que de la forte augmentation des services à domicile, ajoutée à la création de 17 000 places de soins infirmiers à domicile (SSIAD) sur la même période.

S'agissant de l'offre à domicile, notre enquête a porté sur les intervenants au domicile de personnes fragilisées, y compris les personnes handicapées. Le nombre de ces intervenants, à peu près comparable à celui en établissements, est de 515 000 : 36 % relèvent de services prestataires, 24 % d'emplois directs et 40 % d'emplois mandataires, la majorité de ces derniers étant employés par des associations d'aide aux personnes âgées ou aux personnes handicapées. Une de nos publications détaille la qualification de ces personnels : les deux tiers sont employés à temps partiel, un tiers à temps plein, avec un salaire médian de 840 euros par mois, de 1 200 euros pour un temps plein ; ils travaillent cinq jours par semaine, les plus diplômés se trouvant dans les services prestataires et les moins diplômés dans l'emploi de gré à gré ; le nombre de personnes qu'ils prennent en charge sur une semaine est plus élevé dans le cadre d'un service prestataire.

D'après nos dernières enquêtes, les bénéficiaires de l'APA sont très âgés, la moitié ayant plus de 80 ans, et un quart plus de 90 ans. Il faut noter un accroissement significatif du nombre de bénéficiaires de l'APA à domicile au détriment de celui en établissement : cette situation traduit, en grande partie, la préférence exprimée par les personnes pour le maintien à domicile. La population concernée est à dominante féminine, mais l'entrée en établissement des hommes est plus précoce, car elle est due le plus souvent à l'isolement, à la perte ou à l'absence de conjoint, les femmes étant plus nombreuses à rester à domicile, même sans conjoint.

D'après notre dernière enquête réalisée sur 34 départements, la durée de perception de l'APA est de quatre ans en moyenne, mais avec des disparités dans la mesure où 5 % des bénéficiaires peuvent le rester plus de dix ans.

Enfin, la saturation des plans d'aide préoccupe un grand nombre d'entre vous. Une des difficultés est de comprendre le mode d'attribution de l'APA dans les départements dans un contexte de contraintes financières pour ces derniers, mais aussi pour les personnes, compte tenu du « ticket modérateur » qui restera à leur charge. D'après nos calculs effectués à partir des données individuelles, la probabilité d'avoir un plan d'aide saturé augmente avec le niveau de GIR, le besoin d'aide supérieur au plafond étant plus élevé pour les dépendances lourdes à domicile et pour les personnes isolées sans aidant familial.

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