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Intervention de Xavier Breton

Réunion du 8 février 2011 à 21h30
Bioéthique — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaXavier Breton :

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission spéciale, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, depuis plus de deux ans maintenant, la révision des lois de bioéthique est au coeur de nombreuses réflexions.

Plusieurs rapports et études ont apporté des éclairages scientifiques, juridiques ou sociologiques sur des sujets délicats et souvent complexes. De leurs côtés, les états généraux de la bioéthique organisés par le Gouvernement, ont donné lieu à un débat riche et animé au sein de notre société. Enfin, la mission d'information parlementaire, qui nous réunissait autour d'Alain Claeys et de Jean Leonetti, a publié, en janvier 2010, un rapport très complet après avoir procédé à plus de cent auditions.

Avec l'ensemble de ces travaux préparatoires, qui vont largement nourrir nos débats, notre pays reste fidèle à l'esprit des lois de 1994 et de 2004 : oui, notre pays est à l'avant-garde dans la réflexion éthique. Je crois que, collectivement, nous pouvons en être fiers.

La préparation de la révision des lois de bioéthique a donc été une formidable occasion de débats. Elle doit nous conduire d'ailleurs à nous interroger sur l'abandon de la clause de révision automatique et périodique de cette loi. Certes, la contrainte d'une révision peut susciter ce que nous pourrions appeler l'angoisse de la feuille blanche et conduire ainsi à l'adoption précipitée de mesures quelque peu spectaculaires mais, d'un autre côté, nous ne pouvons, en tant que parlementaires, nous dessaisir de ce sujet et déléguer la question bioéthique aux seuls scientifiques, l'abandonner entre les mains d'une technocratie scientifique qui concentrerait, autour de sa seule expertise, les enjeux bioéthiques.

Nous pourrions chercher au cours de ce débat à améliorer la gouvernance de la bioéthique en favorisant la participation permanente des citoyens à la réflexion bioéthique et en formalisant une implication plus forte des parlementaires dans nos missions tant de débat que de contrôle.

Le bilan de l'application de la loi de 2004 que nous avons pu établir a montré que si certaines dispositions de cette loi n'appellent pas d'évolutions majeures, d'autres nécessitent que nous nous interrogions sur les améliorations qui pourraient être apportées.

Quatre grandes questions ont ainsi progressivement émergé :

La première concerne le don d'organe. Comment pouvons-nous favoriser la mobilisation de nos concitoyens en faveur de cette grande cause ? La commission spéciale propose que des efforts importants soient consacrés à l'amélioration de l'information sur les différents dons et je souhaite que nos débats confirment ces orientations.

La deuxième question a trait au diagnostic prénatal. Pouvons-nous raisonnablement, c'est-à-dire avec raison, continuer à cautionner l'évolution du DPN qui conduit aujourd'hui à programmer l'élimination du handicap plutôt qu'à privilégier sa prise en charge collective par une société véritablement solidaire ? Je crois que nous adresserions un signal fort si nous amendions le projet de loi pour refuser la systématisation du diagnostic prénatal.

La troisième question concerne l'assistance médicale à la procréation. Allons-nous raisonnablement, c'est-à-dire avec raison, poursuivre la production d'embryons surnuméraires, production qui place les parents devant des choix impossibles tout en attisant dans le même temps les convoitises de la recherche pharmaceutique, ou, au contraire, allons-nous afficher clairement un objectif de diminution des embryons conservés et nous donner véritablement les moyens d'atteindre cet objectif ?

Enfin, nous devrons débattre, une nouvelle fois, de la recherche sur l'embryon. Raisonnablement, c'est-à-dire avec raison, saurons-nous privilégier les recherches alternatives à la recherche sur l'embryon et sur les cellules souches embryonnaires ? Nous savons en effet que ces dernières, outre les problèmes éthiques qu'elles posent, n'ont aucunement fait la preuve de leur intérêt thérapeutique et de leur pertinence scientifique.

Nous allons donc avoir de nombreuses occasions de débattre, de confronter nos conceptions et nos convictions mais aussi nos doutes et nos interrogations. Il me semble que nous devrions avoir à coeur d'éviter au cours de nos débats deux écueils :

D'une part, l'écueil de l'individualisme, du chacun pour soi, qui consisterait à organiser notre société autour du seul désir des adultes. Notre société doit avoir le courage de savoir dire non à la demande de tel ou tel, le courage de savoir dire non à un prétendu droit à l'enfant car ce qui est en jeu avec cette loi de bioéthique ce n'est pas la satisfaction de désir particulier mais l'expression d'une volonté partagée dans la recherche du bien commun.

D'autre part, l'écueil de la pression affichée ou dissimulée de ceux qui ont un intérêt, notamment financier, à l'utilisation de tel ou tel procédé scientifique. À plusieurs reprises au cours de l'examen de ce texte, nous aurons l'occasion de constater que, derrière des arguments prétendument scientifiques, se cachent parfois des intérêts particuliers, bien éloignés de toute préoccupation éthique.

Pour conclure, cette loi de bioéthique peut être une formidable occasion de dire dans quelle société nous voulons vivre et chacun d'entre nous mesure sans aucun doute la lourde et noble charge qui nous est confiée. Pour ma part, je souhaite que, tout au long de ce débat, nous sachions conserver au sein de notre société une place pour les plus fragiles et les plus vulnérables. Avec ce texte, nous avons l'occasion de traduire avec des choix forts et courageux cette éthique de la vulnérabilité que nous sommes beaucoup ici à appeler de nos voeux. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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