Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Michel Vaxès

Réunion du 8 février 2011 à 21h30
Bioéthique — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Vaxès :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme le note très justement le comité consultatif national d'éthique pour les sciences de la vie et de la santé dans son avis du 9 octobre 2008 : « La recherche de la connaissance est une valeur fondamentale et la science, malgré des erreurs et des dérives, a contribué et contribue toujours à l'amélioration du bien-être de l'homme. Quelle influence peut avoir aujourd'hui la science sur les valeurs de notre société pluraliste et laïque ? »

Ce n'est effectivement pas la recherche en soi qui pose problème, mais ses applications lorsqu'elles contrarient les valeurs spécifiquement humaines qu'elles devraient pourtant servir.

Il faut donc rappeler que toutes les applications possibles de la recherche scientifique ne sauraient être nécessairement et systématiquement autorisées. Le rôle du législateur est de dégager un cadre qui concilie la libre pensée scientifique et le respect de la dignité des personnes et du bien commun.

Consentement, anonymat, gratuité et indisponibilité du corps humain, tels sont les principes qui ont constitué et constituent aujourd'hui encore le socle de notre législation relative à l'éthique biomédicale

Plus de quinze ans après les premières lois bioéthiques, nous sommes depuis plusieurs mois mobilisés pour remettre l'ouvrage sur le métier, pour nous demander si les équilibres prévalant sont toujours d'actualité compte tenu des évolutions scientifiques, médicales et juridiques intervenues depuis lors et des revendications qui se sont ça et là exprimées ces cinq dernières années.

En dehors même de l'obligation légale de révision, l'intervention du législateur se justifie donc au seul regard de ces évolutions.

L'un des enjeux de cette révision législative est de trouver, lorsque cela est possible, le meilleur équilibre entre les oppositions qui se sont fait jour autour des principales questions qui se posent en ce domaine : remise en cause de l'anonymat des dons de gamètes, autorisation de la recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires, élargissement de l'accès à l'assistance médicale à la procréation à d'autres indications que celles strictement médicales et gestation pour autrui.

Je reviendrai successivement sur ces questions à la fois délicates, complexes et passionnelles.

La levée de l'anonymat du don de gamètes pour les cas d'assistance médicale à la procréation avec tiers donneur soulève de nombreuses questions. Le professeur David écrivait déjà en 1984 : « La procréation demeure le refuge de l'intimité et du naturel. L'irruption, dans ce domaine, de la médecine posera peut-être plus encore qu'ailleurs des problèmes difficiles d'interférence du social et du médical. » C'est bien, me semble-t-il, ce à quoi nous sommes confrontés aujourd'hui.

Les enfants nés d'un don de gamètes représentent environ 6 % de l'ensemble de ceux conçus par AMP. L'un des principes fondamentaux sur lequel repose ce don, l'anonymat, est aujourd'hui contesté.

Face à cette contestation, il convient, tout d'abord, de constater que toutes les personnes issues de ce don n'éprouvent pas de difficultés liées aux questionnements sur leur origine. Alors que certaines souffrent, d'autres vivent parfaitement heureuses, sans que leur mode de conception ni l'anonymat de leur donneur ne les préoccupent. On peut donc, heureusement, a priori pleinement s'épanouir sans s'interroger sur les éventuels bienfaits ou méfaits du principe d'anonymat. De ce constat une première évidence s'impose : on ne peut en aucun cas généraliser le besoin de lever de l'anonymat des personnes conçues par ce don.

Dans la vie, chacun doit se construire avec ce qui est et qui n'est pas forcément ce qu'il aurait souhaité. Chacun doit s'adapter aux épreuves de la vie : séparation, deuil, handicap ou maladie. Il n'en va pas différemment pour ce qui est de la construction de sa filiation. Il me semble évident que cette filiation appartient à ceux qui ont la responsabilité effective de l'enfant, de son éducation, de ses relations affectives et que, dans ces conditions, pour reprendre l'appréciation du pédopsychiatre Lévy-Soussan, toute société, toute loi qui valoriserait le pilier biologique le ferait toujours au détriment de la certitude de la filiation psychique.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion