Si l'impôt sur la fortune faisait perdre à l'État plus de recettes qu'il n'en fait gagner, je serais évidemment favorable à sa suppression immédiate. C'est bien parce que je pense le contraire que je défends l'ISF. Contrairement à ce que laisse entendre Philippe Bruneau, personne n'aime l'idée d'un impôt punitif.
La seule étude systématique que je connaisse sur l'évolution des bases de l'ISF en France depuis vingt ans est due à Gabriel Zucman, un jeune chercheur de l'École d'économie de Paris. À l'inverse, je n'ai jamais eu connaissance du moindre élément permettant de vérifier l'estimation traditionnellement avancée selon laquelle le volume de capitaux délocalisés atteindrait 250 milliards d'euros.
Si, en prenant pour référence les patrimoines déclarés au début des années quatre-vingt-dix, on tente de retracer l'évolution qu'ils auraient dû connaître en vingt ans, compte tenu de l'évolution des cours de la bourse et de l'immobilier, on s'aperçoit que le montant total des patrimoines déclarés aujourd'hui est légèrement supérieur à ce qu'il aurait dû être. En tout cas, il n'est pas inférieur, ce qui aurait été le cas s'il y avait eu un mouvement de délocalisation massif. On pourra objecter que ce montant aurait dû, pour diverses raisons, être encore plus important que ne le laissait entrevoir l'évolution des valeurs mobilières et immobilières.