Le Fonds vert n'est pas le seul résultat de Cancun, monsieur Chassaigne. Cette conférence a permis d'autres avancées, telles que le transfert de technologie, et surtout l'obligation pour les pays du Sud d'enregistrer et de publier leurs émissions de manière transparente, étape absolument nécessaire sur la voie des engagements de réduction.
En ce qui concerne le financement du Fonds vert, je ne vous cache pas que l'abondement de cent milliards de dollars annuels à compter de 2020 n'est pas acquis. Je pense que l'essentiel viendra de modes de financement innovants, domaine dans lequel la France a lancé, sous l'autorité de Philippe Douste-Blazy, des expériences intéressantes qu'elle doit partager au niveau mondial. Quant au financement du fonds d'amorçage, la France en prend sa part, comme l'Union européenne en général, à l'exception des Italiens à la contribution desquels il manquait quelques millions d'euros.
Si Cancun n'a pas permis de donner une suite au protocole de Kyoto, il a apporté une nouveauté en ce qui concerne la trajectoire de réduction : s'accorder sur un pic d'émissions de gaz à effet de serre au niveau mondial. Cette nouveauté, qui peut paraître quelque peu absconse à qui n'a pas suivi ces discussions, est cependant importante, en ce qu'elle traduit la prise de conscience collective de la nécessité de définir une trajectoire contraignante de réduction des émissions de gaz à effet de serre. En effet, si le protocole de Kyoto prévoyait des engagements contraignants pour certains pays, il n'assignait aux autres que des objectifs lointains, parfois à l'horizon 2050. À cet égard, une trajectoire sur un horizon court, avec un pic d'émission avant 2020, constitue aussi une avancée.
La France est réservée sur la plantation de palmiers à huile et des critères ouvrant droit à crédits dans le cadre du processus de reforestation. La question n'est pas simple, ce dispositif visant à associer les pays du Sud en les intéressant à l'opération. Or ils sont très peu à envisager la forêt comme quelque chose qui peut être conservé en l'état – c'est le cas du Costa Rica ou d'une partie des pays du bassin du Congo. Mais ils sont nombreux à rechercher des modes d'exploitation plus ou moins durables, à condition qu'ils soient financés par le Nord. C'est un équilibre à trouver.
Nous avons transmis à votre commission un calendrier de publication des décrets d'application du Grenelle II, et je ne vois aucun inconvénient à ce qu'il soit plus largement diffusé. Pour certains, il s'agit de dates cibles, le processus de concertation ou l'interministériel pouvant demander un peu plus de temps. Les trois quarts doivent être publiés avant le mois de juillet 2011.
Les effectifs des personnels chargés du contrôle sont en augmentation dans certains cas, par exemple pour le contrôle des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) ou des sites Seveso. Avec Benoist Apparu, nous travaillons au moyen de contrôler la qualité du diagnostic de performance énergétique, obligatoire à l'occasion de la vente ou de la location d'un bien, qui ouvre droit à certaines majorations du prêt à taux zéro plus.
S'agissant du Canal Seine-Nord Europe, monsieur Demilly, le bouclage financier est aujourd'hui assuré à 97 %, même s'il s'est heurté à quelques difficultés. Les dossiers pour le dialogue compétitif sont prêts à être envoyés. Reste à trancher la question de la somme versée aux soumissionnaires dans le cadre du dialogue compétitif au cas où le projet ne serait pas mené à son terme. Le dossier sera envoyé à l'issue de la dernière réunion interministérielle de lancement. En dépit des réticences que Bercy – ce n'est pas un secret – a toujours manifestées vis-à-vis de ce projet, j'ai bon espoir d'obtenir un arbitrage rapide sur ce dossier.
En ce qui concerne le photovoltaïque, je comprends l'exaspération des professionnels face à des règles du jeu qui changent tous les trois mois, au point que certains ont engagé des procédures contentieuses contre l'État. C'est précisément la raison de la décision de suspension. Celle-ci prélude à la mise en place, après concertation, d'un nouveau dispositif pérenne. Cela ne signifie pas qu'il ne sera pas ajustable, mais qu'il le sera selon des règles fixées à l'avance. Chacun conviendra que le dispositif actuel n'est pas satisfaisant. Parmi les projets déposés, certains sont purement spéculatifs. Surtout, ce système n'a pas permis la création d'emplois industriels. Les emplois créés, peu nombreux, se concentrent dans les bureaux d'études et dans l'installation des panneaux. La plupart des sociétés françaises ont perdu des parts de marché, et l'essentiel des panneaux utilisés est importé.
La France n'est pas la seule à subir les effets de la très forte baisse du prix du panneau photovoltaïque chinois. L'extension par l'État américain du Buy American Act au secteur photovoltaïque vise à éviter à la délocalisation de centaines de milliers d'emplois industriels, notamment vers la Chine.
Laisser ce dispositif dériver vers une bulle spéculative n'aurait abouti qu'à augmenter dès 2012 la contribution au service public de l'électricité, la CSPE, acquittée par tous les Français. Que leur dira-t-on alors ? Croit-on qu'ils seront heureux d'apprendre que l'augmentation de leur facture d'électricité a permis de subventionner l'emploi industriel en Chine ? Ce n'est pas ça, le Grenelle de l'environnement. Certes, celui-ci vise à développer nos capacités productives, et les objectifs fixés en termes de volume seront atteints, voire dépassés. Mais c'est aussi une espérance d'emplois et de croissance verte chez nous.
Cette exigence sous-tend tous les projets du Grenelle, et c'est dans cette perspective que s'inscrit le travail que nous menons actuellement pour définir des modalités d'appel à projets pour la construction d'éoliennes en mer. Ces projets doivent permettre la création d'emplois industriels en France, et pas seulement pour assembler des pièces fabriquées ailleurs.
Je sais dans quelle situation dramatique la baisse du tarif de rachat a placé certains agriculteurs, qui s'étaient, en toute bonne foi, endettés pour financer ce type d'investissement. C'est pourquoi j'ai proposé à Christine Lagarde que nous réfléchissions à la définition de critères de transition qui permettraient de faire droit à ces dossiers. Je ne vous cache pas qu'il sera assez délicat de mettre en place un dispositif propre à préserver la compétitivité de l'exploitation qui soit inattaquable sur le plan juridique, mais cela fait partie de nos préoccupations.
S'il n'y a plus d'avancée sur la chasse depuis juin dernier, la responsabilité en est imputable aux chasseurs eux-mêmes : ils ont choisi de quitter la table ronde, alors que celle-ci venait clore un processus extrêmement positif, grâce à l'investissement personnel de Jérôme Bignon. Ce processus avait abouti à des accords, même si les parties n'ont pas toujours respecté leur engagement. Mais après ce départ, les tensions se sont ravivées et les positions se sont à nouveau durcies – ainsi les dates de chasse aux oies sont aujourd'hui attaquées.
Je pense que rouvrir le contentieux sur les dates de chasse, c'est jouer « perdant-perdant ». Devant conclure les « États généraux » de la chasse le 16 février, j'ai demandé au Conseil général de l'environnement et du développement durable de m'adresser un bilan de la table ronde sur la chasse. Il s'agit de rétablir les conditions du dialogue, cette situation de conflit ne bénéficiant à personne.
Bien que je ne sois pas spécialiste de foot-ball, je crois savoir que la FIFA étudie la possibilité de jouer en hiver.
Sur le photovoltaïque, monsieur Pancher, rien n'est encore décidé. Parmi les pistes explorées, il y a la combinaison d'un tarif de rachat spécifique à certains types d'installation, éventuellement ajustable, et et d'une procédure d'appel d'offres pour les projets les plus importants. Cette procédure présenterait l'avantage de favoriser le développement d'une filière industrielle et la création d'emplois sur notre territoire.
La définition du seuil donnant lieu à application de la RSE fera l'objet d'un arbitrage interministériel. Certains lobbies demandent qu'on remonte ce seuil à 5 000, mais je suis favorable au maintien du seuil de 500. C'était d'ailleurs ce que prévoyait le projet de loi initial Grenelle II, avant que le Parlement n'opte pour le renvoi à un décret.
Il est vrai, monsieur Chanteguet, que les entreprises du secteur de l'énergie relèvent désormais de la responsabilité de Bercy, et vous conviendrez que le jeu de mécano capitalistique autour d'Areva, par exemple, n'est pas vraiment au coeur des préoccupations du Grenelle de l'environnement. Le climat, en revanche, relève exclusivement de la compétence de mon ministère, et les énergies renouvelables sont une compétence partagée, notamment en matière tarifaire. J'ai veillé à ce que les décrets d'attribution précisent expressément ce point.
Je salue par ailleurs l'intérêt que vous portez à l'initiative de Christine Lagarde. Pour ma part, je me félicite que mes collègues s'expriment sur les énergies renouvelables, et je les incite moi-même à s'exprimer plus souvent encore sur cette question à l'occasion des concertations interministérielles.
Quant à ma vision, j'adhère pleinement à la proposition d'Edgar Morin de passer du concept de révolution, qui ne se pose pas la question des traditions, des rituels, des origines et des racines, à celui de métamorphose. Je vois dans le Grenelle de l'environnement un projet de métamorphose positive de notre société.