Au-delà des polémiques de la vie politique, nous nous devons, en Commission des affaires étrangères, de nous attacher à la dignité de la politique étrangère de la France et à l'intérêt de notre pays.
Vous vous demandez, monsieur Gorce, pourquoi les ministres n'étaient pas présents à Paris vendredi après-midi ? Je vais donc vous l'expliquer.
J'avais moi-même fait à treize heures le point de la situation avec non seulement notre ambassade mais aussi les autorités tunisiennes : les manifestations qui s'étaient tenues le matin s'étaient bien déroulées, et si nous savions que la situation était relativement instable, nous pensions que le week-end se passerait normalement. Cela dit, comme vous, mesdames et messieurs les députés, le ministre de l'intérieur, le porte-parole du Gouvernement et moi-même sommes des élus locaux, ce qui nous impose de nous rendre là où nous sommes élus pour remplir nos obligations. Toutefois, informée à cinq heures et demie des événements en cours, j'ai alors pris le premier avion pour Paris.
Pourquoi la première réaction a-t-elle eue pour auteur l'administration américaine ? Êtes vous sûrs que si des tels événements s'étaient déroulés au Mexique, l'administration américaine aurait réagi ainsi et aussi vite ? Beaucoup d'Américains résident dans ce pays ! La présence de milliers de nos concitoyens au coeur d'une situation pour le moins confuse sur le plan de la sécurité impliquait de notre part, tout en organisant le soutien nécessaire, de ne réagir qu'avec retenue et prudence.
Monsieur Muselier a souligné à juste titre la rapidité du basculement des événements. Eu égard aux informations dont nous disposions, nous pensions que, quoi qu'il arrive, la situation allait évoluer. Cependant, entre mercredi et vendredi les événements se sont précipités. Si l'action de l'armée a sans doute été un facteur déclenchant, je continue à penser que les morts dus à la répression, ainsi qu'Internet et les réseaux sociaux, ont contribué également à la rapidité de l'évolution.
J'ai été aussi beaucoup frappée par la référence faite à la Constitution, pourtant critiquée par certains. Cette démarche donne une grande confiance dans la suite des événements, et nous allons les surveiller avec attention.
Même s'ils ont parfois conduit des tentatives de récupération, les mouvements islamistes n'ont pas été à la tête du mouvement. Il reste que de tels mouvements, plus ou moins radicaux, plus ou moins organisés, sont présents dans tous les pays de la région. Cette situation justifie une grande attention de notre part envers tous les événements qui s'y produisent, dans le cadre du respect de nos principes d'action. Compte tenu de nos relations historiques avec ces pays, nous devons à la fois être très proches de leurs peuples et faire preuve de retenue et de réserve dans notre expression : la France ne peut pas prêter le flanc à de – faciles – accusations d'intervention dans leurs choix. Ce qui m'intéresse dans l'action que je mène aujourd'hui, c'est la défense de l'image, de l'action et des valeurs de la France.