En troisième lieu, le texte ne précise pas comment l'avocat doit être mis en mesure d'être effectivement présent lors des auditions de son client.
Quatrième point, le texte ne prévoit pas que l'avocat puisse poser des questions ni formuler des observations orales pendant les auditions de son client. Cette disposition se trouve à cet égard en retrait par rapport à l'avant-projet de réforme de la procédure pénale, rendu public le 1er mars 2010, lequel transposait aux auditions de gardes à vue les règles régissant aujourd'hui les interrogatoires du mis en examen par le juge d'instruction.
Il s'agit à nos yeux d'une régression importante qui vise à réduire les avocats au silence. Outre qu'elle n'est pas acceptable au regard de la nature du métier d'avocat – métier qui destine celui qui l'exerce à parler, autant que je sache – et des avantages qu'il y aurait au contraire à laisser l'avocat s'exprimer afin qu'il puisse contribuer activement à la défense de son client et ainsi à la manifestation de la vérité, elle ne semble pas conforme aux prescriptions des arrêts rendus le 19 octobre par la Cour de cassation, dont il résulte que l'avocat doit pouvoir « participer » à ces auditions.
Une simple présence ne saurait être considérée comme une réelle participation et ne répond pas davantage à plusieurs notions consacrées par la Cour européenne des droits de l'homme au titre du droit à « l'assistance effective » par un avocat, à « la discussion de l'affaire », à « l'organisation de la défense », à « la recherche des preuves favorables à l'accusé » ou encore au « soutien de l'accusé en détresse ».
Il conviendrait donc d'appliquer aux auditions du gardé à vue les règles prévues par l'article 120 du code de procédure pénale en ce qui concerne les interrogatoires et les confrontations pratiqués par le juge d'instruction, à savoir, pour l'avocat, la possibilité de poser des questions et de présenter de brèves observations.
Le texte limite l'assistance de l'avocat aux seules auditions de la personne gardée à vue, à l'exclusion de tout autre acte. Or il peut être retenu de la jurisprudence européenne, comme l'a fait Marc Robert, avocat général près la Cour de cassation, en se fondant sur de nombreux arrêts de la Cour de Strasbourg, que « le droit à l'assistance effective par un avocat concerne, outre les interrogatoires, l'ensemble des actes d'enquête auxquels participe activement le gardé à vue, notamment la confrontation et la reconstitution des faits ».
Il conviendrait donc à tout le moins que le texte prévoie la participation de l'avocat aux confrontations et reconstitutions auxquelles participe son client, dans les mêmes conditions que pour les auditions.
Notons également que le projet de loi ne propose aucune évolution de l'autorité chargée de contrôler la garde à vue. Il est pourtant difficilement contestable que le ministère public, actuellement chargé du contrôle de la garde à vue, a en partie failli dans cette mission : incapacité à endiguer le flot montant des gardes à vue et absence de volonté réelle d'en limiter la durée.