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Intervention de Laurent Heynemann

Réunion du 11 janvier 2011 à 17h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Laurent Heynemann, président de la Société des auteurs et compositeurs dramatiques, SACD :

La SACD, fondée par Beaumarchais – qui ne supportait plus que les acteurs, faisant la quête à la sortie des théâtres, privent les auteurs de leur part des recettes –, a pour mission de veiller à ce que l'argent des auteurs ne soit confisqué à aucun moment lors des opérations dont il fait l'objet. Elle a la particularité d'être exclusivement composée d'auteurs et donc de ne compter ni éditeurs de musique, ni producteurs. Parmi les vingt-cinq membres du conseil d'administration que je préside, on trouve ainsi des cinéastes, des réalisateurs et scénaristes de télévision, des auteurs de théâtre, de chorégraphies et de spectacles de rue, des musiciens – et même un clown !

Société d'auteurs, la SACD défend donc le point de vue de ces derniers et c'est à ce titre qu'elle est favorable au contrôle des sociétés de perception. Ce contrôle est en effet dans l'intérêt des auteurs ! Du reste, nous avions mis en place dès avant la loi Tasca une commission de contrôle du budget, composée uniquement d'auteurs et élue par l'assemblée générale indépendamment du conseil d'administration. Cette commission, qui se réunit une fois par mois, s'est déjà montrée capable d'être très virulente en cas de problèmes.

Nous avons changé à plusieurs reprises nos statuts pour nous conformer aux recommandations de la commission de contrôle et nous ne voyons aucun inconvénient, puisque nous assurons un rôle de perception et de répartition, à être soumis à une obligation de transparence qui suppose la vérité des comptes.

La transparence des recettes des producteurs de cinéma est un autre problème. La loi française prévoit en effet que l'auteur doit être rémunéré proportionnellement à la fortune de son oeuvre, c'est-à-dire au prix payé par le public. Malheureusement, dans le cinéma, le calcul de la recette à partir de laquelle cette rémunération est décomptée relève jusqu'à présent du seul producteur, qui détermine le coût du film et l'amortissement à déduire des recettes générées, par exemple, par les entrées en salle, les recettes à l'étranger ou les ventes aux télévisions. L'accord conclu après une longue négociation menée avec la médiation de Roch-Olivier Maistre a pour objet de fixer le mode de calcul de ce coût et de son amortissement, et de permettre la transparence des comptes qui devront être communiqués aux ayants droit.

Jusqu'à présent, les auteurs ne bénéficient donc réellement que des revenus générés par de la gestion collective prévue par la loi sur le droit d'auteur. Permettez-moi d'évoquer à cet égard mon expérience personnelle : je n'ai jamais eu communication des comptes correspondant aux épisodes de Maigret que j'ai réalisés pour la télévision – qui ont pourtant rencontré un large succès auprès du public et se sont vendus dans le monde entier. Je n'ai jamais reçu que le produit de la gestion collective des droits, et jamais la rémunération que je serais en droit de percevoir en proportion du succès de Maigret, car le calcul de l'amortissement du film est d'une totale opacité. Dans un petit métier comme le nôtre, un réalisateur ou un auteur qui engagerait un procès pour faire valoir ses droits s'exposerait à ne plus pouvoir travailler : inutile donc de jouer les héros. L'intérêt suprême de la gestion collective réside ainsi dans l'automaticité des recettes qu'elle assure aux ayants droit.

Cependant, la SACD ne considère pas les problèmes du droit d'auteur sous le seul angle de la rémunération, mais elle a toujours également pris en compte l'intérêt économique de notre secteur d'activité. Ainsi, pour ce qui concerne la diffusion sur internet, nous voulons certes être payés, mais nous militons aussi pour la survie de notre industrie, qui est une industrie culturelle, et des mécanismes qui la soutiennent. Si notre approche n'était que corporatiste ou limitée à des revendications poujadistes, je ne serais pas ici ce soir.

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