Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Lionel Tardy

Réunion du 11 janvier 2011 à 21h30
Hommage de l'assemblée — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLionel Tardy :

Si cette réforme constitutionnelle n'a pas revalorisé le rôle du Parlement autant que certains l'auraient espéré (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC), elle contient au moins deux véritables révolutions : la question prioritaire de constitutionnalité et le défenseur des droits.

Notre Ve République souffre d'un véritable problème d'équilibre des pouvoirs : le poids de l'exécutif est excessif et il n'existe pas de réels contre-pouvoirs. Ce n'est malheureusement pas le Parlement, dont la majorité est forcément très liée à l'exécutif, qui peut jouer ce rôle de contre-pouvoir qui lui est normalement dévolu par la pensée politique libérale. Il faut donc trouver autre chose.

Le problème est particulièrement sensible en ce qui concerne la question des libertés publiques. La France est en effet beaucoup trop souvent condamnée par la Cour européenne des droits de l'homme. Il aura ainsi fallu une impressionnante série de décisions convergentes du Conseil constitutionnel, de la Cour de cassation, du Conseil d'État et de la Cour européenne des droits de l'homme pour en finir avec la garde à vue à la française. Et encore, il me semble que certaines administrations continuent de faire de la résistance, alors même que la situation est devenue inacceptable.

Depuis que je siège dans cette assemblée, je constate que, trop souvent, les libertés publiques sont le parent pauvre des débats, et je le déplore. Que l'administration demande des moyens importants et le moins de contraintes possible, je peux le comprendre. Néanmoins c'est à nous, politiques, d'arbitrer entre ces demandes et d'autres considérations qui pourraient s'y opposer. Or nous ne le faisons pas assez, voire pas du tout.

Les débats sur la LOPPSI en ont été un exemple flagrant. Nombre des dispositions de ce texte – le filtrage d'internet ou la vidéosurveillance, par exemple – répondent uniquement à des demandes de l'administration, sans que l'on se soit posé la question de l'équilibre à trouver avec les droits des citoyens. En tant que libéral, cela ne me satisfait pas. Oh, je ne me fais guère d'illusions : les ministres continueront à être trop souvent les porte-parole de leurs administrations et ils seront suivis par les députés de leur majorité, quelle que soit sa couleur politique. C'est le système de la Ve République qui veut cela.

La solution qui consiste à instituer des contre-pouvoirs extérieurs me paraît donc plus pertinente en ce qui concerne la protection effective des libertés publiques et des droits des citoyens. On a ainsi renforcé un des contre-pouvoirs existants, le Conseil constitutionnel. Je ne m'y attarderai pas, mais les effets de cette réforme se font déjà sentir, et nous n'en sommes encore qu'au début. On a également créé un autre contre-pouvoir, le Défenseur des droits. Le Conseil constitutionnel veille au respect des libertés publiques lors du vote des lois ; le Défenseur des droits contrôlera la manière dont elles seront respectées par l'administration.

Pour cela, il faut des moyens, à la fois juridiques, matériels et symboliques. Le texte qui nous est présenté ce soir me paraît comporter les dispositions nécessaires. Outre les moyens matériels, obtenus grâce au regroupement d'entités existantes et qui garantissent au Défenseur des droits des pouvoirs suffisants vis-à-vis de l'administration, il confère à celui-ci un poids très important par rapport à ses adjoints et aux différents collèges.

Le choix de la personnalité qui occupera ce poste jouera un rôle important. Celle-ci devra être absolument incontestable, choisie pour son autorité morale et son attachement aux libertés. Très souvent, le premier titulaire d'un tel poste donne une orientation, une place, une visibilité que ses successeurs ont souvent du mal à infléchir : nous devrons donc être particulièrement attentifs lors de ce choix.

Toutefois, quelques interrogations subsistent. Fallait-il fusionner autant d'institutions au sein de la nouvelle entité ? Si la question ne se pose pas pour le Médiateur de la République, le contrôleur des lieux de privation de liberté et la CNDS,…

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion