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Intervention de Françoise Hostalier

Réunion du 11 janvier 2011 à 21h30
Hommage de l'assemblée — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançoise Hostalier :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, la France, pays des droits de l'homme, se veut toujours exemplaire en la matière, mais les droits de l'homme prennent aujourd'hui, dans nos pays riches et démocratiques, tellement de définitions, que l'on a vu se multiplier des défenseurs spécifiques de ces droits au risque parfois de leur faire perdre leur sens fondamental.

Si la création progressive de structures ad hoc pouvait s'apparenter à un progrès, à l'évidence, il devenait nécessaire de redonner une lisibilité forte à la place des droits fondamentaux dans notre société. En effet, la multiplication des structures de défense des droits en fonction de leurs thèmes ou des catégories de personnes à défendre, a fini par brouiller considérablement le message le plus important – la préservation des droits fondamentaux – et le plus utile : la manière pour les victimes de faire reconnaître leur droit.

Entre la HALDE, la CNIL, le Médiateur de la République, le Défenseur des enfants, la commission nationale de déontologie de la sécurité et le contrôleur général des lieux privatifs de liberté, dans l'imbroglio des tribunaux ou des cours diverses, il est difficile effectivement de savoir à qui s'adresser quand on veut faire valoir un droit ou quand on a le sentiment de subir une injustice.

Le danger était aussi de voir ces structures s'apparenter davantage à des annexes de l'administration pour traiter des dossiers complexes, ou pour accélérer de traitement de dossiers plutôt que d'être des garants indépendants du droit et des instances de proposition et de progrès.

Il était donc indispensable de clarifier et de simplifier cette situation.

Aussi, à travers la modification de la Constitution du 23 juillet 2008, une nouvelle entité a-t-elle été créée, le Défenseur des droits, qui regroupera à elle seule les cinq structures que j'ai citées à l'échéance de 2014.

Cependant, si, chaque fois que c'est possible, nous ne devons pas nous priver de simplifier la vie de nos concitoyens il ne faut pas que ce soit au détriment de l'efficacité et de la préservation de leurs droits, surtout les droits fondamentaux. Il faut donc s'assurer que la création de cette nouvelle structure sera un réel progrès et que les missions des organismes qu'elle remplacera seront non seulement maintenues mais mieux définies et mieux traitées.

Le texte présenté par le Gouvernement et enrichi par le Sénat semble répondre à ces conditions sauf en ce qui concerne la problématique très spécifique des droits de l'enfant.

En effet, les droits de l'enfant ne sont pas des droits ordinaires parce que les enfants sont des êtres humains nécessitant une protection particulière. Ils ont tous les droits des adultes, particulièrement le droit à la dignité, à l'intégrité morale et physique, à la liberté, mais ils ont des droits supplémentaires à cause de leur vulnérabilité, comme le droit à une famille, ainsi que des droits reconnus par la plupart des civilisations comme le droit à l'éducation et à l'école. Les enfants sont des êtres humains particuliers parce qu'ils sont aussi notre avenir, et la protection particulière que nous leur devons est une obligation envers notre propre condition humaine. Il nous faut donc prendre en compte l'intérêt supérieur de l'enfant, qui ne se résume pas à de simples droits.

C'est pourquoi, même si la spécificité de cette fonction de l'un des adjoints du Défenseur des droits est mentionnée dans le texte, il m'a semblé indispensable d'établir plus précisément cette distinction entre les droits des adultes et les droits des enfants en identifiant clairement le Défenseur des enfants par rapport aux deux autres adjoints du Défenseur des droits.

J'ajoute que cette reconnaissance d'un défenseur spécifique de l'intérêt supérieur de l'enfant permettra à la France de rester en cohérence avec plusieurs conventions, traités ou textes internationaux qu'elle a ratifiés ou signés.

Pour conclure, je veux appeler l'attention du futur Défenseur des droits mais aussi la vôtre, monsieur le ministre, sur l'usage que vous pourriez faire des différents hauts comités, conseils supérieurs, commissions spéciales, et autres institutions, composés d'éminentes personnalités qui ne demandent qu'à servir notre nation et ses valeurs ainsi que les grands principes de notre République mais qui, trop souvent, sont sous-utilisés.

J'ai à l'esprit une structure dans laquelle j'ai siégé pendant deux mandats – la commission nationale consultative des droits de l'homme – une autre dont je suis toujours membre, le Haut comité pour le logement des personnes défavorisées, et une dernière dont je suis membre associé, le Haut conseil à l'intégration. Toutes ces structures apportent statutairement au débat et à la réflexion publique une contribution importante tirée de l'expérience de leurs membres, illustrées par des faits réels et débouchant sur des avis, recommandations ou rapports de grande qualité.

À travers la création du Défenseur des droits, en harmonie avec toutes les contributions possibles, je ne doute pas que la France puisse continuer à être l'un des repères pour ne pas dire un modèle, pour beaucoup de pays où les droits de l'homme sont encore en devenir.

J'ai à cet instant une pensée pour Mme Nasrin Sotoudeh, avocate iranienne, qui avait défendu le Prix Nobel de la paix, Mme Shirin Ebadi, et qui vient elle-même d'être condamnée injustement à onze ans de prison dans un pays qui aurait tout à gagner à nous imiter de temps en temps. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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