S'agissant des technologies, il est un mal très français, consistant à se demander laquelle il faut choisir. En travaillant de cette façon, on n'a rien fait dans l'éolien et on loupera tout le reste. C'est une vision technocratique. Laissez faire les industriels, et la meilleure technologie gagnera ! S'il existe un marché régulier et pérenne, elle sera française. Mais dire à mes trois cents salariés, en janvier ou février, qu'« il n'y a pas de quoi fouetter un chat » ne serait pas sérieux : il nous faut de la continuité.
Le rôle de l'État n'est pas de s'immiscer dans la recherche ou de décider quelle technologie il faut privilégier. C'est développer un marché dans la pérennité. S'il y a des fabricants d'éoliennes en Allemagne, ce n'est pas parce que l'État leur a expliqué de quelle manière il fallait procéder, mais c'est parce qu'il a annoncé qu'il allait développer l'éolien et que les gens ont pu investir dans la continuité.
Toutes les prévisions, à l'horizon 2020-2030, montrent effectivement de nouvelles technologies – CIGS, tellurure de cadmium ou autres –, mais aussi toujours de 50 à 60 % de mono ou de polycristallin. Il n'y aura donc pas une technologie gagnante. Il faut que la France soit forte dans au moins un domaine, mais il n'est pas possible de faire un choix aujourd'hui. Ce choix, ce seront le marché et les industriels qui le feront !
Pour répondre à M. Brottes à propos d'EDF-EN, ce que nous demandons, en tant que fabricants et développeurs de projet, c'est simplement de l'équité. Quand EDF-EN dépose 1,2 gigawatts de permis de fermes au sol dans les Landes, directement avec RTE, et qu'elle n'a même pas besoin d'une acceptation de permis de construire pour bloquer son tarif, il n'y a pas d'équité. Mais visiblement, il n'en est jamais question dès lors qu'on parle d'EDF : il n'y a qu'à voir la loi portant nouvelle organisation du marché de l'électricité (NOME) !
Vous avez déjà tué vos alternatifs. En continuant de cette façon, vous allez tuer une filière industrielle. Je ne pense pas qu'arracher des milliers d'hectares de pins dans les Landes procède du souci d'un développement durable, surtout pour y implanter une technologie à base de cadmium.
La parité réseau sera atteinte entre 2015 et 2020, à condition qu'on nous laisse travailler et baisser nos coûts tous les ans. Nous serons compétitifs en 2017 ou 2018, c'est certain. L'éolien s'approche de la parité réseau. Il a été longtemps subventionné, comme le nucléaire. Il faudra continuer à subventionner le solaire jusqu'à 2015 ou 2020.
Pour ce qui est de la fiscalité, il est clair que l'énergie solaire ne coûte rien au budget de l'État, mais qu'elle rapporte de l'argent. L'AIPF est opposée à tout système de défiscalisation autour du solaire. Dans ce secteur, la rentabilité pour l'investisseur est liée au tarif. L'ajout d'une défiscalisation conduit à des taux de rentabilité interne anormaux. Nous sommes donc contre l'application de la loi TEPA concernant l'ISF, et d'autres systèmes de défiscalisation. Non seulement on n'en a pas besoin, mais la défiscalisation touchant à l'ISF biaise les choses, en faisant envoyer des fonds dans des sociétés qui exploitent des panneaux solaires sans aucune création d'emploi. Or ce n'est pas dans ces sociétés qu'il faut faire converger des capitaux.
Pour ce qui est du moratoire, la décision viendra de vous, les politiques. Je n'ai pas le sentiment que ce moratoire débouchera sur quelque chose qui protège l'industrie française. C'est à vous de prendre les choses en main, de mettre en oeuvre des mesures de préservation.
Il y a eu des gens qui ont spéculé et qui ont fait n'importe quoi. Moi, je n'ai pas le sentiment d'avoir fait n'importe quoi. J'ai cru en un discours, j'ai investi massivement et j'ai créé de l'emploi. Je n'ai pas triché. Aujourd'hui, puisque d'autres ont triché, on veut punir tout le monde. Je ne suis pas d'accord. Certains doivent être punis, mais moi, je n'ai aucune raison d'être sanctionné.
Des régions et des départements ont lancé des appels d'offres pour couvrir leurs lycées et autres bâtiments publics. Les industriels français ont obtenu environ 70 % de parts de marché, parce que le mécanisme des appels d'offre permet aux collectivités de ne pas tenir compte que du tarif, mais aussi du bilan carbone ou de la création d'emplois. Une des mesures de préservation pourrait être de ne pas remettre ces appels d'offre en cause, parce qu'ils ont été bien travaillés et qu'il n'y a pas eu de spéculation. Photowatt a eu sa part de ces appels d'offre. Fonroche a dépensé 850 000 euros d'études pour y répondre. Et aujourd'hui, parce que des gens ont triché, ils ne valent plus rien ! À la fin de l'année, je serai bien obligé de prévoir une provision dans mes comptes.
Comment voulez-vous que nous fidélisions nos banquiers avec de tels allers-retours ?