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Intervention de Yves Cochet

Réunion du 22 décembre 2010 à 10h00
Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaYves Cochet :

Comment pouvez-vous prétendre, monsieur Dionis du Séjour, qu'il n'y ait pas eu de filière photovoltaïque en France avant M. Borloo ? Celle-ci existe depuis longtemps. La société Photowatt remonte aux années soixante-dix et j'ai eu des panneaux sur mon toit dès 1991, grâce au programme européen Thermie.

Sur ce dossier, la politique et l'industrie françaises ont toujours hésité entre deux positions. La technocratie d'État s'est montrée hostile aux énergies renouvelables. À ses yeux, le nucléaire était sérieux ; l'hydraulique avait l'avantage d'exister ; quant aux fossiles, on en était sorti depuis le programme Messmer de 1974. Le renouvelable passait tout au plus pour une facétie d'écolos, qui n'était valable ni sur le plan industriel ni du point de vue scientifique. En 1986, M. Madelin, ministre de l'industrie, a tué l'Agence française pour la maîtrise de l'énergie (AFME), qui avait pourtant bien travaillé, notamment sur le renouvelable.

Traditionnellement, en France, on sacrifie le renouvelable au profit d'un système fort et centralisé. Comme M. Didier, je serais favorable à ce qu'il y ait des milliers, voire des centaines de milliers de producteurs d'électricité, mais ce point de vue n'est pas partagé par les jacobins que rassure l'existence de cinquante-huit réacteurs et de dix-neuf centrales nucléaires. Tant parce qu'il est renouvelable que parce qu'il est décentralisé, le photovoltaïque n'entre pas dans la vision des ingénieurs des mines. Ces ingénieurs de l'ordre social préfèrent que l'électricité soit distribuée à des consommateurs citoyens reliés par le fil d'EDF. C'est sans doute ce qui explique que les gouvernements n'aient jamais cessé tantôt d'avancer, tantôt de reculer sur le dossier depuis trente-cinq ans.

Le décret du 9 décembre est parfaitement scandaleux. Ce sont bien sûr plutôt les petits producteurs, fournisseurs ou installateurs qui en pâtiront : trois mois de photovoltaïque ne représentent pas grand-chose dans le chiffre d'affaires d'ensemble du groupe Total, alors que c'est l'essence même de l'activité de Photowatt ou de Fonroche. N'y a-t-il pas là une sorte de cynisme délibéré, une manière d'avantager les gros par rapport aux petits, comme on l'a toujours fait en France ? Il nous faut des champions nationaux, de grands groupes aux fortes capacités de résistance…

Quoi qu'il en soit, il faut abandonner tout de suite le moratoire, tout en continuant à discuter avec les industriels au sein du groupe de travail Charpin. Tout stopper, sauf 2,4 gigawatts, c'est tout simplement signer la mort des petites entreprises qui ne peuvent pas perdre trois mois !

Tout est une question de vitesse de déplacement du curseur. François Loos, alors ministre de l'industrie, avait créé la stupéfaction à l'été 2006 en prenant un arrêté tarifaire exceptionnel – encore plus que celui que j'avais pris pour l'éolien – en faveur de la filière photovoltaïque. Pourquoi est-on allé aussi fort et aussi vite ? Cela a pris tout le monde par surprise et l'on ne s'est aperçu qu'assez tard de l'effet d'aubaine créé, en particulier pour EDF. Ensuite, le marché est devenu spéculatif, vers octobre ou novembre 2009.

Quelle est la durée de vie de vos modules, aux uns et aux autres ? Car une filière industrielle, et surtout énergétique, doit couvrir ses besoins. Tant que les usines de production de panneaux photovoltaïques ne seront pas alimentées par de l'électricité photovoltaïque, encourager la production reviendra à augmenter les besoins en énergie fossile ou nucléaire. C'est donc un préalable.

Quelles sont les perspectives en matière de maintenance et de renouvellement, notamment pour les grandes installations ?

Enfin, n'y a-t-il pas un autre danger chinois : le monopole d'extraction et de distribution des terres rares ? Quelles sont, sur les dix-sept terres rares, celles que vous utilisez dans vos modules ? Dans l'éolien, c'est surtout le néodyme. S'il y a un étranglement, voire un embargo chinois sur les terres rares, vous êtes « cuits » !

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