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Intervention de Jean-Michel Ferrand

Réunion du 22 décembre 2010 à 9h00
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Michel Ferrand, rapporteur 9 :

La France a signé avec la République bolivarienne du Venezuela un accord de coopération militaire le 2 octobre 2008. Semblable à la centaine d'accords ratifiés par notre pays, cette convention remplace une galaxie d'arrangements techniques et permet de renforcer la sécurité juridique des quelques partenariats que notre pays entretient avec le Venezuela en matière militaire.

Ce texte n'est pas un accord de défense, mais un accord relatif au statut des forces engagées dans des opérations communes de formation et d'entraînement. Il ne prévoit donc pas la participation de notre pays à des opérations militaires conjointes avec le Venezuela, hors des cas d'exercices ou de formation.

Cette précision me paraît essentielle du fait de la place qu'occupe aujourd'hui ce pays en Amérique du Sud.

En effet, depuis l'élection d'Hugo Chavez à la présidence, la politique étrangère vénézuélienne a oscillé entre prises de position provocatrices et apaisements successifs. Les relations avec la Colombie avaient notamment atteint un stade inquiétant, avant un retour à la normale suite à l'élection de Juan Manuel Santos.

De la même manière, alors que le président Chavez accuse fréquemment les États-unis de mener une politique impérialiste, le Venezuela continue de fournir près de 10 % du pétrole américain, de loin son premier débouché extérieur.

La politique extérieure du Venezuela, si elle reste marquée par la rhétorique révolutionnaire bolivarienne issue du mouvement chaviste, a plus modifié l'image du pays à l'étranger que son comportement effectif sur la scène internationale. A l'intérieur du pays, toutefois, les réformes engagées par le président Chavez ont eu des conséquences plus durables, notamment dans les armées.

L'armée du Venezuela est, depuis longtemps, une armée professionnelle. D'un format relativement modeste, inférieur à 125 000 hommes majoritairement intégrés aux forces terrestres, elle est toutefois complétée, depuis quelques années, par une milice nationale forte de 800 000 hommes, pour le recrutement de laquelle un service militaire obligatoire a été décidé en 2009.

Au-delà de la création de cette force supplémentaire, les mesures adoptées par les gouvernements vénézuéliens depuis la première élection de Chavez ont désorganisé l'outil militaire vénézuélien. Les modes de recrutement des officiers ont été modifiés, les universités militaires ont vu leurs formations changer, une organisation territoriale militaire totalement nouvelle a été décidée.

L'embargo sur la vente d'armes décidé par les États-unis sous l'administration Bush a accéléré la dégradation du niveau d'équipement de l'armée vénézuélienne, désormais dotée de matériels vieillissants. Parallèlement aux réformes des armées, l'État vénézuélien cherche donc à renforcer ses capacités militaires.

Son nouveau premier fournisseur, la Chine, l'a doté d'avions d'entraînement et de radars longue portée. La Russie a passé d'importants contrats pour des armes légères et des hélicoptères, mais la réalisation de ces commandes reste incertaine.

D'importants débouchés subsistent pour les industriels français, déjà candidats à plusieurs marchés : achat de deux bâtiments de projection et de commandement, acquisition de systèmes de sonars remorqués, développement des capacités d'aéromobilité, modernisation de toute la chaîne de communication tactique des armées.

Mais le Venezuela ne représente pas qu'un marché pour nos industriels. La France a réussi à amener ce pays à coopérer dans des domaines très précis, qui servent nos intérêts propres tout en permettant aux armées vénézuéliennes de développer leur niveau de formation.

Le montant budgétaire de la coopération franco-vénézuélienne dans le domaine militaire reste modeste, inférieur à 100 000 euros. Toutefois, les actions déjà menées l'ont été dans des domaines stratégiques pour notre pays, notamment la lutte contre l'orpaillage illégal et la lutte contre le trafic de drogue. La France aide également les armées vénézuéliennes à améliorer leur capacité de secours aux populations.

Ces domaines de coopération, qui devraient rester prioritaires dans les prochaines années, sont de toute évidence en accord avec nos préoccupations stratégiques dans la région, et n'ont pas vocation à alimenter une quelconque attitude agressive de la part du Venezuela. D'ailleurs, les États-unis n'ont émis aucune réaction officielle à la signature de cet accord.

Le texte qui nous est présenté ce matin contient l'ensemble des stipulations traditionnelles en matière de coopération militaire. Il est expressément indiqué que l'accord ne prévoit pas la participation de la France à des opérations militaires avec le Venezuela, dans ou hors de ses frontières.

Seules les infractions commises hors du service peuvent amener nos militaires engagés dans des actions de coopération à être jugés au Venezuela. Dans ces cas, des stipulations garantissent un déroulement du procès le plus équitable possible.

Les autres stipulations de l'accord, techniques, permettent de donner un fondement juridique plus stable aux activités menées en coopération entre nos deux pays, en précisant notamment les activités couvertes par la coopération, les règles d'entrée sur le territoire, l'indemnisation des dommages éventuels.

L'accord du 2 octobre 2008 donne un cadre juridique plus sûr à la coopération franco-vénézuélienne dans le domaine militaire. Jusqu'à présent, ce partenariat nous a permis de servir nos intérêts, par exemple dans la lutte contre le trafic de drogues dans la région.

Elle renforce également la position de notre pays pour la modernisation de l'outil de défense d'un pays auquel ses ressources en hydrocarbures apportent une capacité de financement certaine.

Mais surtout, cette convention contient toutes les garanties pour nous assurer que les actions menées dans le cadre de cette coopération militaire n'amèneront pas nos armées à être impliquées dans des conflits sans que nous ne l'ayons décidé. C'est cette raison qui m'incite à vous proposer l'approbation de cet accord.

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