Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, chers collègues, voici donc la dernière loi de finances rectificative de l'année – au demeurant, en examiner une autre serait peut-être délicat, étant donné la date ! C'est la dernière, mais la quatrième de l'année.
Le rapporteur général ayant terminé par des remerciements, je commencerai par y joindre les miens, car ils s'adressent aux mêmes personnes : la présidence, nos collègues, vous-même, monsieur le ministre, pour votre présence, les collaborateurs de la commission des finances et bien entendu, Gilles Carrez qui, comme la semaine dernière, a remercié tout le monde sans s'inclure dans ce satisfecit.
Et puisque la periode s'y prête, je formulerai un voeu pour l'an prochain : si une loi de finances rectificative est inéluctable au printemps et une autre sûrement nécessaire en fin d'année, que nous en restions à deux et pas davantage. Cela permettrait de reprendre un rythme plus accoutumé et qui sans doute, faciliterait le travail, au moins pour le Parlement.
Cette loi de finances rectificative arrête le déficit budgétaire à 149,7 milliards d'euros. Comme l'a expliqué le rapporteur général, ce montant traduit la situation que nous avons connue, mais aussi des décisions discrétionnaires qui ne pourront vraisemblablement pas être reconduites. Imaginons ce que serait la réaction de notre collègue Michel Bouvard si le prélèvement supplémentaire sur la Caisse des dépôts était renouvelé… Un acompte sur dividendes de 330 millions d'euros a également été prélevé au détriment de la Caisse des dépôts. L'État a enfin reporté sur 2011 le payement d'une amende de 900 millions d'euros à laquelle il a été condamné. Ce sont là des artifices budgétaires, guère originaux et même répétitifs ; ce n'en sont pas moins des artifices. En tenir compte donne une idée de ce qu'est réellement le déficit budgétaire cette année : il a été légèrement minoré par rapport à la dernière loi de finances rectificative, à cause des artifices que je viens de décrire.
À ce propos, j'observerai, monsieur le ministre, qu'il faudrait, à l'avenir, mieux respecter les règles des finances publiques en vigueur, surtout si l'on veut en élaborer d'autres. L'article 34 de la loi organique relative aux finances publiques prévoit que c'est en loi de finances initiale qu'est fixée l'affectation des éventuels surplus de recettes constatés dans l'année. La loi de finances pour 2010, dans son article 67, posait clairement que tout surplus devait être réservé au désendettement du pays. Or, dans la loi de finances rectificative relative au prêt à la Grèce, nous avons constaté l'augmentation du déficit de 3 milliards d'euros, mais aussi l'affectation, en cours d'année, d'un surplus de recettes estimé à 900 millions d'euros au titre de la TVA ; or ces 900 millions, nous ne les constatons pas en fin d'année. Il y a là un double manquement. D'abord, si nous avions bien disposé de ce surplus, il aurait fallu le consacrer au désendettement et non à un prêt à la Grèce ; ensuite, il y a, qu'on le veuille ou non, aggravation du déficit puisque, finalement, ce surplus n'était pas de 900 millions mais seulement de 300 millions, de même que le manque à gagner est de 1,4 milliard d'euros au titre de l'impôt sur le revenu et de 140 millions d'euros au titre de l'impôt sur les sociétés, comme l'indiquait Aurélie Filipetti lors du débat la semaine dernière. Que le pouvoir exécutif n'observe pas les règles des finances publiques en vigueur au moment même où il propose d'en élaborer d'autres est, à mes yeux, plutôt de mauvais augure. À l'avenir, mieux vaudrait veiller au respect des règles par tous plutôt que d'en élaborer d'autres.
Je ferai deux remarques, dont la première porte sur le statut de l'auto-entrepreneur. Que le Gouvernement prenne des décisions et que le Parlement les vote pour se mettre en conformité avec la pratique de l'administration fiscale est une méthode quelque peu surprenante. Pourrais-je, en cette période, émettre un autre voeu : qu'à l'avenir, ce soit les décisions du Gouvernement et éventuellement le vote du Parlement qui amènent l'administration fiscale à adopter l'attitude adéquate et non pas l'inverse ? Si nous en sommes à accepter pour 2009 et 2010 la situation que l'administration avait indiquée aux auto-entrepreneurs et à n'accepter la proratisation qu'à partir de 2011, c'est bien pour ne pas mettre en porte-à-faux ces derniers, qui sont de bonne foi, ni l'administration fiscale, laquelle s'est un peu trop avancée. Mais ce n'est pas de bonne méthode.
Quant au statut d'auto-entrepreneur lui-même, nous savons qu'il pose des problèmes réels de concurrence, que d'aucuns jugent objectivement déloyale, avec des artisans qui ont des frais d'assurance, d'inscription à divers organismes, de formation et doivent, en un mot, observer des règles dont les auto-entrepreneurs sont affranchis. Je ne suis pas certain que ce statut dure longtemps.
Ma deuxième remarque porte sur le versement transport. Comme l'a rappelé le rapporteur général, il s'agit de passer le cas échéant de 0,55 % à 0,85 % dans les villes de 50 000 à 100 000 habitants. Cela pose le problème du financement des sites propres de transport en commun, et celui des transports en commun de manière générale, même si cette disposition, rejetée par le Gouvernement en seconde délibération, va être votée à l'issue de la CMP.
De façon générale, comment financer le déficit d'exploitation des transports en commun ? Comment financer les investissements, indispensables, pour renouveler ou créer des voies en site propre ? Quel peut être le projet industriel dans ce domaine, alors que Alstom a perdu le marché de l'Eurostar qui lui semblait promis et se débat dans les difficultés ? Enfin si, à terme, la concurrence est inéluctable comme le pensent certains, quel sera le statut social des employés des entreprises publiques de transport en commun ? Ce sont là quatre chantiers qu'il nous faudrait ouvrir l'année prochaine. Je me permets de l'indiquer à propos de cette disposition sur le versement transport.
La CMP s'est déroulée dans un très bon climat. Elle s'est conclue de façon positive. Je forme encore un dernier voeu : puisse le Gouvernement accepter ses conclusions, sauf peut-être à la marge, de sorte que, même si tous ici ne les voterons pas, le travail des parlementaires soit respecté comme il se doit. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)