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Intervention de Israël Nisand

Réunion du 15 décembre 2010 à 14h00
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à la bioéthique

Israël Nisand, gynécologue-obstétricien :

Une équipe londonienne a maintenant une expérience de plus de vingt ans de la gestation pour autrui, traitant par ce biais environ 300 cas de pathologies utérines par an. On ne peut ignorer les analyses à la fois sociologiques et psychologiques qu'elle a menées ni les résultats de ses études tant sur les mères porteuses elles-mêmes que sur leur propre famille.

Lorsqu'on a créé les premières banques de sperme dans les années soixante-dix, on s'est contenté de copier le modèle des banques de sang. Or, dans le cas d'un don de sang, il n'y a qu'un donneur et un receveur. Dans le cas d'un don de sperme, il y a aussi un enfant. C'est bien là toute la différence.

La conception de la famille a beaucoup évolué depuis ces années-là. Les réalités vécues dans les familles aussi ont changé. Les familles recomposées ne sont plus une exception, au contraire, et un nombre beaucoup plus grand d'adultes intervient auprès d'un enfant, y compris dans son éducation à la maison. Prélever des gamètes d'un donneur anonyme et s'en servir comme s'il s'agissait d'un vulgaire matériau, voilà ce qui me choque. Si je pense qu'il faut impérativement que le don de gamètes continue de n'être pas rémunéré, je suis en revanche très défavorable au maintien de l'anonymat. Je ne crois pas bon que ce donneur de vie demeure un « passager clandestin », sans nom ni visage, réduit au rang de simple fournisseur de matériau. S'agissant de la gestation pour autrui, je serais favorable à une forme de coparentalité, où l'enfant puisse entrer en relation avec la femme dans le ventre de laquelle il s'est développé et la considérer comme une « nounou », sans que cela ne remette en rien en question les droits parentaux, pleins et entiers, de ses parents d'intention.

Je ne prétends pas que cela soit possible dans tous les cas ni que je n'aie pas de doutes sur ma position. Mais je dois vous dire que j'assiste parfois à des scènes incroyables de femmes me disant lors d'une échographie « J'espère qu'il va bien, docteur, car ce n'est pas le mien », alors qu'à côté d'elles, des mères d'intention, debout et en pleurs, caressent doucement le ventre arrondi. Je ne vois décidément pas en quoi autoriser cela altérerait nos valeurs.

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