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Intervention de René Frydman

Réunion du 16 décembre 2010 à 9h00
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à la bioéthique

René Frydman, professeur des universités, gynécologue :

Je pense qu'il n'y a pas de réponse à cette question. Dans le cas d'un transfert d'ovocytes, j'explique à la femme qu'elle va porter un enfant, en accoucher, l'élever, etc., et qu'en ce sens, elle sera incontestablement sa mère. Mais on ne peut pas faire abstraction de la donneuse qui a agi consciemment, et regarder l'ovocyte comme un simple matériau. Il y a ici aussi intention et cette intention ne peut compter pour rien. Cela étant, quelle importance relative accorder à l'élément génétique ? Il y a, en face, tout le développement à venir de l'enfant, dans la relation à sa mère... Et la femme vivra sans doute la situation plus facilement que l'homme dans la mesure précisément où elle porte l'enfant à naître, où elle vit la maternité dans son corps – où elle est reliée à l'enfant.

S'agissant de la gestation pour autrui, le point central à considérer est la non-indépendance de la femme qui « se prête » et il faut donc analyser soigneusement ses motivations. Aime-t-elle être enceinte ? Ce n'est pas interdit et, malheureusement, on n'empêchera jamais certaines femmes de multiplier les grossesses, puis de donner leurs enfants à la DASS. Veut-elle rendre service à autrui ? Rien dans ce cas n'empêche l'adoption de ces enfants. Mais une grossesse et un accouchement peuvent s'accompagner de complications, il peut y avoir césarienne, hémorragie… Le problème majeur est d'ordre psychique : convaincue de participer à une aventure commune, la mère porteuse aspire à être admise au sein d'une sorte de famille élargie, mais se trouve fréquemment rejetée quand l'enfant est né. Il en résulte alors des dépressions profondes.

Si, comme les partisans de la GPA le soutiennent, celle-ci n'est pas une affaire d'argent, la motivation ne peut être qu'affective. Or, une fois l'enfant né, certains couples à tout le moins n'auront qu'un désir : se retrouver seuls avec leur enfant en oubliant les conditions de sa venue. C'est donc une situation à haut risque, qui aboutira à valoriser le seul génétique, dans la mesure où cette entreprise ne tend qu'à avoir un enfant de soi. C'est un désir qui peut se comprendre, mais on ne peut accepter qu'il se réalise au prix de la liberté d'une autre personne.

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