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Intervention de Florence Chappert

Réunion du 23 novembre 2010 à 17h00
Délégation aux droits des femmes et l’égalité des chances entre les hommes et les femmes

Florence Chappert, responsable du projet « Genre et conditions de travail » à l'Agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail, ANACT :

J'en arrive à nos sept propositions pour faire progresser conjointement l'égalité et la santé en entreprise.

En premier lieu, nous recommandons d'obliger, ou d'inciter très fortement, à inscrire l'action en faveur de la mixité des emplois et des tâches dans les plans d'action ou accords sur l'égalité. Nous préconisons notamment une masculinisation des métiers à prédominance féminine car nous y voyons un facteur d'amélioration des conditions d'emploi. Ce volet « mixité » devrait, selon nous, comporter des mesures relatives à la composition des commissions de sélection, à l'ergonomie et à l'encadrement de la charge de travail, en particulier s'agissant des postes à responsabilité, pour lesquels on impose souvent des rythmes de travail incompatibles avec la vie familiale. Et c'est un souci auquel on devrait sensibiliser les enfants, dès l'école primaire.

La deuxième proposition concerne l'aménagement des temps de travail qui doit explicitement viser à une bonne articulation avec la vie familiale et personnelle. Nous suggérons que les horaires atypiques – travail de nuit ou à temps partiel –, mis en place au nom de l'intensification et de la flexibilité, fassent l'objet non seulement d'un encadrement plus strict, mais surtout d'une contrepartie, consistant à laisser aux salariés une certaine liberté pour choisir leurs créneaux horaires à l'avance et pour déterminer leur volume horaire. Concernant le temps partiel, il est essentiel de parvenir à une organisation de l'entreprise et de la société qui permette aux femmes et aux hommes de faire de vrais choix, par exemple en jouant sur le levier de la surcotisation, ou grâce à des modes de garde gratuits pour les plus modestes.

Deux exemples de pratiques allant dans le sens de cet aménagement.

Dans une fromagerie, les salariées femmes, qui n'ont trouvé place que récemment dans ce secteur, ont obtenu de travailler de jour parce que, désormais, les moyens frigorifiques permettent d'attendre pour traiter le lait, alors que les hommes préféraient continuer à travailler de nuit pour conserver les primes ou pour exercer d'autres activités en journée.

Dans la grande distribution et dans les transports publics, certaines entreprises ont offert un choix en matière de grilles horaires, pour le travail en équipe. Il convient toutefois, dans ce cas, de veiller à ce que les arbitrages de l'employeur, inévitables, prennent en compte non seulement le critère de l'ancienneté, mais aussi les charges de famille.

Notre troisième proposition concerne la prise en charge de la période de la maternité. Nous suggérons qu'un volet des accords d'entreprise y soit dédié. On peut s'inspirer là d'initiatives prises en Suède dans des entreprises à prédominance féminine. En effet, contrairement aux idées reçues, ce pays connaît un absentéisme des femmes deux fois plus important qu'en France, notamment pour longue maladie due au burn out ou épuisement professionnel. C'est que, d'après ce qu'on m'a expliqué, les femmes suédoises seraient encore plus soumises que les hommes – et que les Françaises – à des injonctions sociales : celle de travailler, celle de s'occuper de leurs enfants et de leur maison, sans jamais les sous-traiter à d'autres femmes, car ce serait les exploiter. Du coup, certaines entreprises ont élaboré des programmes maternité.

Pour nous, de tels programmes devraient être mis en place au tout début de la grossesse. Une grande entreprise a fait appel à nous parce que, les femmes qui y travaillent se mettant en congé maladie dès le deuxième mois de grossesse, elle y perdait à chaque fois un an de leur travail. Les aider peut passer par une révision de la nature du poste, des activités, des horaires et des déplacements, ou par le télétravail pour les cadres et les employées administratives. On peut aussi songer à des dispositifs permettant aux pères d'accompagner cette grossesse, en les incitant à prendre le congé de paternité ou parental.

La quatrième proposition consisterait à introduire un volet santéconditions de travail dans les accords d'entreprise ou plans en faveur de l'égalité. Nous suggérons d'enrichir l'analyse du rapport de situation comparée par des indicateurs de santé au travail : accidents du travail, maladies professionnelles, inaptitudes, absentéisme, maladies de courte et de longue durée. Ce volet pourrait tout spécialement s'imposer dans les entreprises très fortement féminisées, où les questions d'égalité ne semblent pas se poser et où l'on se demande donc quel contenu donner à l'accord « égalité ».

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