Les constats tirés de nos interventions dans les entreprises montrent que l'égalité ne peut progresser au détriment de la santé et que, inversement, les efforts faits pour améliorer les conditions de travail gagneront en pertinence si l'on prend en compte la situation différenciée des femmes et des hommes au travail.
Voici deux ans que le réseau ANACT développe, dans le cadre de l'actuel contrat de progrès, une approche « genrée » des conditions de travail. Il s'agit de considérer ensemble les enjeux de santé au travail et les enjeux d'égalité.
Je traiterai d'abord, à partir de quelques indicateurs, de l'impact différencié du travail sur la santé des femmes et des hommes, avant d'analyser « l'effet de genre » des conditions de travail, et je terminerai par quelques propositions destinées à aider les entreprises à lier actions en faveur de l'égalité et actions en faveur de la santé.
Les effets différenciés du travail sur les parcours professionnels sont relativement connus des partenaires sociaux – c'est tout le problème des « plafonds » ou des « parois de verre ». En revanche, les institutions chargées du travail et de la prévention, de même que les entreprises, ne produisent que peu de statistiques sexuées en matière de santé au travail, et elles les diffusent encore moins volontiers. Nous avons toutefois pu étudier celles de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAM-TS) : elles révèlent des écarts importants selon le sexe, ce qui rejoint certains de nos diagnostics.
En 2008, les accidents du travail subis par des femmes représentent un tiers – 28,5 % exactement – des 700 000 accidents du travail. Sur la période 2000-2008, leur nombre a augmenté de 21 %, alors que celui des hommes a diminué de 13 %. Si l'on rapporte ce nombre à celui des actives ou des actifs en emploi, l'évolution est respectivement de + 8 % et de – 15 %.
Les secteurs dans lesquels la progression des accidents féminins a été la plus forte sont le BTP, le transport et l'énergie, la santé, le nettoyage, et le commerce non alimentaire. Les trois derniers sont des secteurs où prédomine l'emploi féminin mais, pour les deux premiers, cette progression montre que l'introduction des femmes dans des milieux masculins a pour elles des conséquences non négligeables en termes de santé. Je relève toutefois que, dans la métallurgie, le nombre d'accidents a baissé au cours de ces neuf années dans la même proportion pour les hommes et pour les femmes, à 1 % près.