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Intervention de Jacques Valax

Réunion du 2 décembre 2010 à 9h30
Souveraineté du peuple en matière budgétaire — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJacques Valax :

Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la rapporteure. Le sujet est sensible et le débat délicat ; mon expression sera donc pondérée, et je me garderai des digressions maladroites pouvant être perçues comme d'inutiles provocations.

Cette proposition de loi se fonde sur une inquiétude légitime : le souci de préserver les prérogatives du parlement national dans l'examen de son budget annuel. Elle repose également sur un malentendu et une ambiguïté : le texte relatif au semestre européen que le groupe GDR prend comme référence de sa proposition de loi, outre qu'il n'a pas de force juridique contraignante, n'a valeur que de projet, n'ayant jamais été avalisé tel quel par les autorités décisionnaires de l'Union que sont les États membres. En effet, la version du texte finalement adoptée n'est pas celle du semestre européen tel que la Commission le souhaitait mais tel que le Conseil, représentant les États membres souverains, l'a voulu, après avoir pris en compte notamment la réaction des parlements nationaux. Le groupe GDR a pris comme fondement de sa proposition de loi le document de la Commission européenne dans sa version initiale, avant même qu'il ne soit amendé par les États membres. Ce n'est pas le texte du 30 juin qu'il faut considérer mais celui du Conseil Écofin du 7 septembre.

Dans le système institutionnel européen, ce n'est pas parce que la Commission propose qu'elle dispose, comme vous semblez le croire ou le laisser penser ! C'est en quelque sorte – et c'est le seul reproche que je serai amené à formuler – le péché originel de cette proposition de loi.

Autant il convient de critiquer la Commission lorsqu'elle produit des documents inacceptables – sur ce point-là, nous sommes d'accord –, autant il convient de ne pas diaboliser un dispositif tel que le semestre européen en lui accordant plus d'impact qu'il n'en a réellement sur le fonctionnement de la procédure budgétaire nationale. Il ne s'agit pas d'un droit d'amendement sur le budget national mais bien d'un processus itératif de consultation et de coordination, qui peut avoir de réelles vertus si l'on fait en sorte d'en empêcher les dérives potentielles. Dans la perspective qui est la nôtre, il convient de prendre au sérieux cette procédure, de l'encadrer au maximum et d'en profiter pour faire jouer au parlement national un rôle croissant dans la définition de la politique économique européenne du Gouvernement.

Que dit réellement le texte ? « Le nouveau cycle semestriel débutera chaque année en mars : sur la base d'un rapport de la Commission, le Conseil européen recensera les principaux défis économiques et formulera des conseils stratégiques sur les politiques à suivre. Compte tenu de ces conseils, les États membres réviseront en avril leurs stratégies budgétaires à moyen terme et, dans le même temps, élaboreront des programmes nationaux de réforme décrivant les mesures qu'ils prendront dans des domaines tels que l'emploi et l'inclusion sociale. En juin et en juillet, le Conseil européen et le Conseil Écofin formuleront des conseils sur les politiques à suivre, avant que les États membres ne mettent au point leurs budgets pour l'année suivante. »

Comment l'interpréter ? La Commission précise tout d'abord elle-même dans son texte initial que « l'intention n'est pas d'exiger des États membres qu'ils soumettent des budgets complets à l'Union pour “validation” avant qu'ils soient présentés aux parlements nationaux », mais qu'il s'agit de réunir, suffisamment tôt dans l'année, « des informations suffisantes pour permettre de mener en amont des discussions utiles sur la politique budgétaire ».

Reprenons le texte du Conseil Écofin. Il s'agit tout d'abord de « recenser les principaux défis économiques ». La Commission ne s'intéressera qu'aux grands agrégats de politique économique – inflation, prévision de croissance. Il s'agit notamment de s'assurer que les États membres ne basent pas leurs programmes de stabilité et de croissance ou leurs programmes nationaux de réforme sur des prévisions de croissance trop optimistes ou des objectifs de déficit irréalistes.

Suivant toujours le texte du Conseil, les États membres devront réviser ensuite « leur stratégie budgétaire à moyen terme », autrement dit leur programme de stabilité et de croissance. Il s'agit, ni plus ni moins, de s'assurer, comme le dit le rapport Van Rompuy du 21 octobre 2010, que « les États membres établiront leurs budgets et leurs programmes de réforme en tenant davantage compte de la dimension UE-Zone Euro ». C'est une réelle avancée !

Enfin, « en juin et en juillet, le Conseil européen et le Conseil Écofin formuleront des conseils sur les politiques à suivre ». Il ne s'agit que de conseils politiques et non de recommandations contraignantes.

Notre position est d'encadrer cette procédure du semestre européen, en assurant à chaque étape la participation du parlement national au processus décisionnel européen. La Commission le précisait elle-même dans sa communication : il s'agit d' « associer très tôt et de manière forte les parlements nationaux au processus du semestre européen et de renforcer le dialogue avec le Parlement européen ».

À chaque étape de la procédure a été prévue l'intervention du parlement national. En amont tout d'abord. Comme vous le savez, suite au débat du mercredi 20 octobre 2010 en séance publique, le Gouvernement s'est engagé devant la représentation nationale à lui soumettre, mi-avril, une déclaration solennelle sur un projet de programme de stabilité, suivie d'un vote sur la base de l'article 50-1 de la Constitution, avant que ce projet ne soit transmis à Bruxelles, fin avril.

En aval ensuite. Si la déclaration solennelle du Gouvernement sur le programme de stabilité est nécessaire, elle n'est pour autant pas suffisante. Le parlement français interviendra à nouveau vers la fin du mois de juin, au moment où la Commission remet son rapport sur les différents programmes de stabilité qui lui ont été transmis et avant que le Conseil Écofin de juillet ne les entérine. Dans ce cas, le Parlement pourra présenter, comme il le fait chaque année sur les perspectives financières pluriannuelles du budget européen, à l'initiative de la commission des affaires européennes et de la commission des finances, une proposition de résolution qui viendra en discussion dans l'hémicycle. Cellle-ci ne portera pas à proprement parler sur le programme de stabilité mais sur l'avis du Conseil.

Le rapport Van Rompuy souligne que « ce cycle de coordination a priori renforcée couvrira tous les éléments de la surveillance économique, y compris les politiques visant à assurer la discipline budgétaire et la stabilité macroéconomique et à favoriser la croissance ».

Il faut prendre la mesure de ce que cela signifie. Dans une perspective constructive, il pourra être possible d'utiliser cette nouvelle procédure pour exiger un certain nombre de choses concernant les orientations et la définition de la politique économique européenne du Gouvernement. Je rappelle qu'il y aura un débat et un vote.

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