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Intervention de François Brottes

Réunion du 24 novembre 2010 à 15h00
Déclaration de politique générale du gouvernement

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Brottes :

Comment accepter que la plupart de nos services publics n'aient plus d'adresse dans les quartiers de nos villes, ou dans les bourgs de nos villages ? Comment ne pas dire notre défiance à l'égard de vos projets pour le cinquième risque et la dépendance, compte tenu des mauvais traitements que vous avez infligés à l'aide personnalisée à l'autonomie inventée par la gauche et, plus récemment, à la formation et à l'emploi des personnes en situation de handicap ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Vous affichez comme première priorité la croissance pour les mois à venir, mais vos décisions budgétaires, d'ailleurs antérieures au remaniement, contredisent déjà votre volonté. Eh oui, les Français doivent le savoir : ce n'est pas le discours que vous venez de prononcer qui fait foi, c'est le budget qui vient d'être voté ici qui révèle vos véritables choix.

De l'avis général, vos hypothèses de croissance sont irréalistes. Vous avez stoppé votre plan de relance pour afficher une réduction artificielle de la dette de vingt milliards d'euros mais, faute d'une croissance conforme à vos affirmations, soit les déficits progresseront, soit vous serez conduit à opérer de nouvelles coupes.

De futures coupes brutales affaibliront encore davantage la croissance à un moment où le soutien de l'activité et l'arrêt de la spirale de la désindustrialisation exigeraient au contraire le maintien de la demande publique, le maintien d'un plan de croissance et le soutien à l'investissement et à l'emploi.

L'autre voie, celle que vous refusez d'emprunter consisterait à rétablir une politique fiscale juste. En 2007, vous avez prétendu favoriser le travail, avec le slogan « travailler plus pour gagner plus ». Sous la pression, vous vous apprêtez à simuler la suppression du bouclier fiscal pour faire passer la pilule de la suppression de l'impôt sur la fortune.

En clair, vous vous apprêtez à remballer un cadeau de 700 millions d'euros pour en accorder un autre, mieux emballé, de 4 milliards ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Il est vrai que votre majorité a toujours eu de la ferveur pour les faveurs ! Au prétexte de compenser le manque à gagner, vous allez, par une imposition sur les plus-values et les revenus du patrimoine, favoriser les patrimoines inactifs au moment où il faudrait orienter l'investissement vers les capitaux productifs.

Par exemple, Mme Bettencourt (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) ne sera plus imposée ni sur ses hôtels particuliers, ni sur son île d'Arros. Son chèque de 30 millions que lui adressait chaque année le fisc, sera compensé par une moindre imposition sur son patrimoine. Et le tour est joué ! (« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Nous, nous vous proposons, au contraire, d'abandonner le bouclier fiscal tout en maintenant l'impôt de solidarité sur la fortune, parce qu'il est économiquement vertueux de taxer les capitaux non investis. Trop de gens n'ont pas de travail pour accepter que d'autres gagnent des fortunes en dormant ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Nous vous engageons à une réforme ambitieuse de la fiscalité, qui conduise à imposer au même taux les revenus du capital et ceux du travail. Il faut supprimer les dispositifs qui permettent au capital d'être imposé deux fois moins que le travail ! Il faut moduler l'impôt sur les sociétés, pour que les bénéfices soient réellement réinvestis. Il n'est plus tolérable que les entreprises du CAC 40 profitent des aubaines fiscales et contribuent à hauteur de 8 % de leurs profits, quand les PME sont, elles, imposées autour de 30 % !

Enfin, puisque vous prétendez à une remise à plat de la fiscalité, pourquoi ne pas réintroduire sa dimension écologique, au moment où vous renoncez à tous vos engagements en la matière ?

Le Conseil constitutionnel a invalidé votre taxe carbone parce qu'elle cumulait une fois encore l'injustice et l'inefficacité. Il est encore temps de mettre en place une contribution « énergie climat », juste et universellement partagée, mais aussi écologiquement efficace.

Voilà, monsieur le Premier ministre, autant de pistes de travail dont nous n'aurons pas à rougir si elles inspirent votre action. Il n'y a pas de droit d'auteur lorsque les idées sont utiles à tous les Français et lorsqu'elles rétablissent la justice sociale.

Après la croissance et la fiscalité, vous vous êtes donné la sécurité comme dernière priorité. La sécurité, c'est certainement l'échec le plus cuisant du quinquennat du Président de la République. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Lui qui avait tant promis sur cette question, est obligé de faire de la surenchère, de stigmatiser des quartiers et certaines populations. Mais ce n'est pas en se voilant la face, ce n'est pas en diminuant les moyens de la justice et de la police que l'on peut être à la hauteur de cette exigence républicaine de vivre ensemble dans la sérénité et dans le respect des libertés. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Nous vous proposons un pacte national de protection et de sécurité publique. Il faut répondre à chaque acte par une sanction rapide et juste, développer les travaux d'intérêt général, créer des travaux d'intérêt éducatif et des internats pédagogiques.

À chaque sursaut de violence – vous y avez fait référence –, vous faites le choix d'un déploiement événementiel, d'une présence de riposte, qui disparaît en même temps que les caméras de télévision.

Nous, nous proposons d'assurer la présence quotidienne des gendarmes et des policiers dans la rue, en mettant un terme à l'hémorragie des effectifs que vous avez planifiée. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Nous proposons aussi de définir des secteurs de sécurité prioritaires, sur lesquels se déploiera une police des quartiers spécifiquement formée.

À la sortie, monsieur le Premier ministre, vous le savez bien, l'insécurité coûte beaucoup plus cher que la prévention. Nous vous exhortons à abandonner cette nauséabonde surenchère sécuritaire, ces provocations outrancières qui vous ont conduit à assimiler délinquance et immigration, à stimuler la peur et le rejet de l'autre, à attiser la haine, donc la violence.

Monsieur le Premier ministre, au moment où la France prend la tête du G20, il est de notre honneur collectif que la France retrouve la fierté de son identité.

Notre drapeau n'est pas celui de la stigmatisation communautaire, religieuse ou ethnique. Notre identité n'est pas assimilable à une couleur de peau, notre laïcité ne se confond avec aucune religion, elle dépasse notre histoire. La France a une responsabilité universelle devant le monde.

La modernité de la France se décline en trois valeurs : liberté, égalité, fraternité. Ces valeurs sont celles de la République, que vos gouvernements successifs, décision après décision, ont mises sens dessus dessous. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Dans ces conditions, comment vous accorder notre confiance ?

Monsieur le Premier ministre, il est temps de remettre la République à l'endroit. Vous prétendez mener un gouvernement de combat, mais c'est ailleurs qu'il faut montrer votre courage. C'est le combat contre l'injustice qu'il faut gagner !

Monsieur le Premier ministre, comment demander un effort à tous, alors que le fossé des inégalités ne cesse de se creuser ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Nous refusons que les ruines que vous laissez derrière vous soient éternelles. Si vous ne menez pas ce combat – et le risque existe –, les Français savent que toute la gauche porte cette exigence et qu'elle en sera digne, le moment venu ! (Mmes et MM. les députés du groupe SRC se lèvent et applaudissent longuement. - Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe GDR.)

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