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Intervention de François Brottes

Réunion du 24 novembre 2010 à 15h00
Déclaration de politique générale du gouvernement

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Brottes :

La démocratie, c'est aussi le respect de la justice. Le Président de la République nous annonce qu'il faut « rapprocher le peuple des magistrats professionnels », mais la véritable urgence n'est-elle pas d'assurer l'indépendance de la justice, de lui donner les moyens de remplir sereinement ses missions et de cesser d'instiller sans cesse le doute sur la décision des juges, de cesser de vouloir toujours les reprendre en main ou les empêcher d'accéder à la vérité ? De vos pratiques, les Français sont déjà juges !

Sur le plan économique, vous prétendiez « maintenir le cap du désendettement et du retour à l'équilibre budgétaire ». Vous projetiez de ramener notre dette publique en deçà de 60 % du produit intérieur brut et de rétablir une situation budgétaire à l'équilibre en 2012. Tels étaient vos objectifs pour sauver un État que vous décriviez déjà « en faillite ».

Ce diagnostic, honnête et lucide, ne vous exonère pas de vos responsabilités pour la période qui vient de s'écouler. Le déficit public n'est plus de 2,7 %, mais de 7,7 % du PIB. L'endettement public est passé de 65 % à 84 % du PIB. Et que dire encore des comptes sociaux ?

Alors que la gauche – souvenez-vous – avait laissé des comptes équilibrés, en 2002 (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP), MM. Raffarin et Villepin vous ont légué 11 milliards d'euros de déficit, et, aujourd'hui, la sécurité sociale accuse un déficit de 30 milliards d'euros !

Bien sûr, nous connaissons votre réponse : « c'est pas moi, c'est la crise ! ». C'est d'ailleurs ce que vous avez répondu hier à Laurent Fabius. Il est vrai que vous n'aviez pas prévu la crise, même si c'est la crise d'un système que la droite a toujours défendu avec zèle.

Vous ne l'aviez pas prévue, et vous l'avez aggravée ! C'est la Cour des comptes, encore présidée par le regretté Philippe Séguin, qui précisait que « moins de la moitié du déficit est d'origine conjoncturelle et résulte de la crise économique ». Ce qui a pesé sur les comptes publics, ce sont vos choix budgétaires et vos choix fiscaux.

Monsieur le Premier ministre, vous avez entamé votre mandature par un contresens économique : celui du paquet fiscal, qui est d'ailleurs devenu votre boulet. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et plusieurs bancs du groupe GDR.) Votre faute, c'est de vous être entêté dans vos erreurs malgré la crise !

Ces milliards d'euros sacrifiés n'avaient ni la vertu de la justice sociale, ni l'efficacité du redressement économique. D'ailleurs, le bouclier fiscal est contesté jusque dans vos rangs.

L'exil fiscal, dont ce bouclier magique était censé nous préserver, a continué de progresser de 14 % en 2008, et les salariés n'ont jamais été concernés. Ce bouclier n'a jamais protégé les revenus du travail : par définition, ils ne sont jamais imposés au-dessus du taux marginal de l'impôt sur le revenu, qui est, lui, de 40 %. Votre bouclier fiscal a juste mis à l'abri les revenus de la rente ou de la spéculation.

La défiscalisation des heures supplémentaires, c'est un constat partagé, plombe le marché de l'emploi. Qui peut encore soutenir, face à la montée du chômage, qu'il faut subventionner les heures supplémentaires au détriment de l'embauche de nouveaux salariés ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Monsieur le Premier ministre, notre taux de chômage est l'un des plus élevés d'Europe. En trois ans, il s'est accru de 16 %, avec 400 000 chômeurs de plus. Encore avez-vous fait baisser les statistiques en généralisant le statut de l'auto-entrepreneur, pour créer des milliers d'entreprises fantômes qui font une concurrence totalement déloyale aux artisans et commerçants.

Par ailleurs, les embauches, lorsqu'elles existent, se font dans des conditions de précarité qui ne permettent plus aux jeunes de poser un regard serein sur leur projet d'avenir.

Pour l'emploi, les mesures annoncées par le chef de l'État ne concernent que 20 % des chômeurs actuels.

Le doublement des formations en alternance restera au stade de l'annonce : les étudiants et les apprentis viennent déjà nous expliquer dans nos permanences, dans toutes nos permanences, que, malgré de longues recherches, ils ne trouvent pas d'entreprise partenaire pour leur formation.

La crise financière devait être salutaire et, dans un rare moment de lucidité, le Président de la République avait même lancé un appel à la « refondation du capitalisme », mais tout a repris comme auparavant.

Alors que les banques ont été sauvées avec l'argent public, les bonus, les stock-options, les « retraites chapeau », les rémunérations folles et indécentes, rien, vraiment rien n'a été abandonné ! Lorsque notre groupe vous a proposé de fixer un plafond aux revenus des dirigeants d'entreprises bénéficiant de l'aide publique, lorsque nous vous avons demandé de mettre fin aux bonus ou aux stock-options, vous avez encore refusé !

Avec vous, décidément, les sacrifices sont toujours pour les mêmes… mais les égards aussi : surtout ne pas froisser ceux qui ont les moyens ! Il fallait même les exonérer de toute contribution au financement du revenu de solidarité active.

Et puis, il y a les autres, tous les autres : les classes populaires, les classes moyennes, les jeunes, les vieux, les malades, les chômeurs, les artisans, les indépendants, les agriculteurs, les salariés. Eux doivent tout supporter, tout endurer : la hausse des tarifs publics du gaz et de l'électricité, la multiplication des taxes – sur l'internet, sur les indemnités des accidents du travail, sur les mutuelles –, les franchises médicales, la hausse de l'impôt local, conséquence directe de la suppression par l'État de la taxe professionnelle.

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