Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Nicole El Karoui

Réunion du 13 octobre 2010 à 17h00
Commission d'enquête sur les mécanismes de spéculation affectant le fonctionnement des économies

Nicole El Karoui, professeur à l'Université Paris VI :

Je ne saurais pas vous répondre, mais en tout cas il a joué gros.

Au moins dans les activités que je connais le mieux, on constate que les marchés liquides sont très bien arbitrés, mais que les gains retirés de chaque activité sont limités. C'est pourquoi, pour réaliser une performance suffisante, il faut prendre des grandes pauses. La taille des pauses me paraît un élément stratégique, qui a été peu surveillé lors de la dernière crise financière et auquel il faudrait sans doute réfléchir. L'autre solution est le déplacement vers des marchés moins liquides, plus risqués mais aussi plus rentables – d'où ce qui s'est passé en matière de crédit.

Un vieil adage dit qu'on ne peut pas avoir de rendement sans prendre de risques. Mais s'il s'agit de surveiller les marchés et de comprendre où sont les risques, il faut inverser la problématique : là où il y a du rendement, a priori il y a du risque, voire beaucoup de risque. D'où mon étonnement quand j'ai constaté que dans la période 2005-2007, les banques obtenaient une rentabilité de l'ordre de 30 ou 35 % sans que personne ne se demande pourquoi. Un tel résultat vient nécessairement d'un investissement important sur des produits à fort effet de levier ou sur des produits à forte rentabilité mais très risqués, sans que ce risque ait été très bien analysé.

Par ailleurs, le risque augmente avec la taille des pauses de manière exponentielle. Pourtant, quand un trader réalise des gains importants, on a tendance à miser encore davantage sur lui, en repoussant les limites de risque. Or les lois de la probabilité devraient au contraire conduire à exercer une surveillance accrue sur ce trader, non par suspicion, mais parce que, dans un marché qui offre peu d'opportunités réelles à très long terme, il a probablement trouvé une niche et que les niches ne résistent pas au volume. Les grandes pertes ont souvent résulté de la concentration de flux sur des opportunités temporaires.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion