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Intervention de Jean-Pierre Brard

Réunion du 8 avril 2008 à 15h00
Organismes génétiquement modifiés — Rappel au règlement, amendements 283 296 448

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Pierre Brard :

Plutôt que de rester dans les champs d'OGM, de par ma culture politique, je suis tenté d'élargir le débat à l'ensemble du champ social, car nous ne devons pas rester empêtrés dans le juridisme et le légalisme. Le 14 juillet 1789, quand nos ancêtres ont pris la Bastille, ils ne se sont pas demandé si c'était légal ! Face à une société qui devient autiste doit s'imposer une notion plus forte que celle de légalité : le plus important, c'est ce qui est juste et légitime !

Les alinéas 5 et 6 de l'article 4 correspondent à des amendements idéologiques et vengeurs adoptés par le Sénat. La loi prévoit déjà des sanctions applicables aux faucheurs, auxquelles les juges ont la possibilité de recourir. Mais nos collègues du Sénat ont voulu casser la jurisprudence en vigueur, par exemple celle établie par le tribunal correctionnel d'Orléans dans son arrêt du 9 décembre 2005, ou encore celle du tribunal correctionnel de Versailles. En écartant cette jurisprudence, les sénateurs ont anéanti du même coup les progrès accomplis par le débat dans la société, y compris au sein de notre assemblée. Ils ont l'illusion de pouvoir bloquer, au moyen de textes répressifs, les évolutions sociales qui se font jour – un procédé qui n'est pas sans rappeler celui des encycliques papales !

Outre que cela n'est pas réaliste, ce n'est pas non plus légitime, car il existe déjà des textes applicables. Les dispositions introduites par le Sénat permettront de sanctionner d'une amende de 150 000 euros les personnes ayant fauché un champ d'OGM, alors que la destruction de l'un des Champs de blé de Van Gogh dans un musée ne serait punie que par une amende de 45 000 euros ! Comment ne pas voir dans ces dispositions une démarche idéologique et vengeresse ?

Quand les salariés d'une usine séquestrent un patron voyou qui déménage les machines pendant la nuit, ce n'est sûrement pas légal, mais comment leur donner tort ? Le code pénal indique que « la destruction, la dégradation ou la détérioration d'un bien appartenant à autrui est punie de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende ». Quand la Société Générale perd 5 milliards d'euros – qui, certes, n'ont pas été détruits, mais se sont volatilisés – demande-t-on au président de cette société de payer 45 000 ou 150 000 euros d'amende ? Non, pas un centime ! En revanche, on s'acharne sur des gens qui, nonobstant les méthodes employées, ont permis de poser le problème et de faire évoluer la réflexion sur les OGM dans la société, ce qui nous a amenés à adopter, il y a deux jours, ce fameux amendement à l'article 1er qui fait progresser – certes, pas autant que nous l'aurions souhaité – la législation, ce dont nos collègues du Sénat ne veulent pas entendre parler. Comme le dirait le sénateur Le Grand et comme l'a confirmé notre collègue François Grosdidier, tous ne sont pas dans un rapport d'objectivité avec ce débat, mais plutôt dans un rapport d'influence.

Voilà pourquoi, monsieur le président, nous pensons que le fait pour les faucheurs – comme pour les responsables syndicaux dans les entreprises – d'agir en dehors de la loi permet parfois de faire progresser la législation afin que celle-ci prenne en compte les nouveaux problèmes qui émergent dans la société. (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

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