En tout cas plus au niveau de la section générale. M. Delmas-Marsalet me disait, en 1980, qu'on lui passait parfois un coup de téléphone le matin pour lui demander d'acheter tel ou tel titre qui baissait en bourse ; mais ces habitudes n'ont plus cours. Nous ne possédons plus, au demeurant, que 2 % de la capitalisation boursière de la place de Paris.
En revanche, la Caisse des dépôts gère, pour le compte de l'État, le fonds d'épargne, dont les dépôts, fiscalement avantageux et garantis par l'État, se montent à 220 milliards d'euros. Ainsi, 63 % des livrets A et assimilés sont déposés à la Caisse des dépôts, le reste étant décentralisé dans les banques. L'État peut donc utiliser cette liquidité comme bon lui semble, au profit de l'intérêt général : au moment où s'ouvre le débat sur la centralisation du livret A, il est bon, je crois, de le rappeler. Mon propos n'a rien de désobligeant pour les banques : elles souhaitent augmenter leurs liquidités, c'est tout à fait naturel. Mais n'oublions pas que, grâce au livret A, l'État octroie des prêts pour le logement social, les infrastructures, les universités, les hôpitaux ou l'assainissement des eaux usées ; bref, il a de plus en plus besoin de cette liquidité, et d'autant plus que les banques ne prêtent plus à long terme. L'an dernier, la Caisse des dépôts a ainsi financé, sur les fonds de la section générale, le programme Exceltium, qui a permis à des producteurs électro-intensifs d'investir 2,2 milliards dans un EPR. Je pourrais d'ailleurs citer d'autres exemples de financement d'infrastructures, comme le tunnel Lyon-Turin.
Le fonds d'épargne est donc un bien public, que le Gouvernement est libre d'utiliser comme tel ; s'il le décentralise vers les banques, il se privera d'un outil essentiel au financement d'infrastructures ou de politiques utiles à l'intérêt général.
Quant à nos capacités de résistance au mimétisme, monsieur Giscard d'Estaing, restons modestes et ne jurons de rien ; cependant, la supériorité de la Caisse des dépôts tient selon moi à une chose : le président de sa commission de surveillance vient chaque année, avec votre serviteur, rendre des comptes à la représentation nationale. Le simple fait d'avoir, par là même, l'obligation d'appliquer des règles de bon sens et de long terme permet d'éviter le mimétisme et le « court-termisme ». Je ne viendrai jamais vous expliquer que la Caisse a décidé d'acheter de l'or parce que celui-ci a atteint un cours de 1 600 dollars l'once. Si cette politique fait rater de bonnes affaires à court terme, elle est assurément payante à long terme.
Dans le cadre du programme « France investissement », nous injectons 450 millions d'euros par an dans 180 fonds d'investissements – dont 80 en province. Le taux de rendement est, là, souvent inférieur à 10 %, mais cela ne nous empêche pas du tout de dormir et nous entendons bien maintenir cet effort en faveur du capital-développement dans les régions.
Quant à notre filiale Qualium investissement, nous essayons d'y développer la notation extra-financière et d'appliquer une logique de long terme.
Je ne me souviens pas de ce qu'a fait la Caisse des dépôts lors de la bulle Internet, mais elle investissait moins de façon directe, en raison de l'existence de sa filiale Ixis…