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Intervention de Bernard Spitz

Réunion du 28 octobre 2010 à 16h00
Commission d'enquête sur les mécanismes de spéculation affectant le fonctionnement des économies

Bernard Spitz, président de la Fédération française des sociétés d'assurances, FFSA :

En tant que président de la FFSA, je m'en tiendrai aux liens entre les activités spéculatives et le secteur des assurances, en tant que secteur financier spécifique, obéissant à un modèle économique et à une logique de gestion qui lui sont propres.

Si je devais définir la spéculation, je dirais qu'il s'agit d'opérations financières réalisées dans le but de maximiser un profit à court terme, sans considération des conséquences négatives susceptibles de peser sur le reste des acteurs économiques et de la société.

Les activités spéculatives, rendues possibles par l'absence ou par l'inefficacité de la régulation, procèdent d'une logique d'arbitrage, et visent à exploiter les opportunités immédiates de marché et à tirer parti de la volatilité, volatilité qu'elles peuvent d'ailleurs contribuer à créer. Elles reposent sur des techniques et des produits complexes, dont l'utilisation est facilitée par l'informatisation, par la possibilité d'intervenir massivement sur le marché et par l'existence de zones grises de la régulation.

Ces mécanismes sont totalement étrangers au métier d'assureur, qui repose sur la couverture d'engagements longs, sur la maîtrise du risque et, en France, sur un environnement réglementaire efficace. Le comportement des assureurs lors de la crise financière de 2007-2010 l'a démontré.

L'année 2008 a été marquée par des dépréciations très importantes des actifs financiers : les opérateurs court-termistes ont suivi un même mouvement en vendant leurs actifs, entretenant et aggravant le mouvement baissier. Au lieu de se désengager massivement, les assureurs français, pour leur part, ont conservé leurs portefeuilles d'actions, qui représentent environ 18 % de leurs actifs. De la même manière, ils ont continué à souscrire massivement aux émissions obligataires des entreprises et ont maintenu globalement stable la part d'obligations d'État non françaises. Loin de chercher à tirer parti de la situation, le monde de l'assurance a donc observé un comportement contracyclique et joué in fine un rôle de stabilisateur.

Le modèle économique assurantiel ignore la logique de maximisation à court terme, car les engagements auprès des assurés sont pris à long terme. La gestion des encours financiers, même si elle nécessite des arbitrages, est à horizon lointain : tout ce qui contribue à des activités spéculatives va à l'encontre de l'intérêt même des assureurs. Victimes des mouvements spéculatifs au travers de la baisse de leurs actifs, les assureurs ont, par ailleurs, en matière de marché obligataire, un intérêt évident à la stabilité du système. Enfin, la maîtrise du risque est au coeur même du métier d'assureur : un bon professionnel veillera à éviter tout placement aventureux.

La réglementation et la régulation du secteur sont cohérentes avec ce modèle économique. La régulation garantit aux assurés que la gestion des actifs respecte la logique de long terme : les stratégies d'allocation d'actifs des compagnies d'assurance sont strictement encadrées par le code des assurances, qui édicte toute une série de règles contraignantes en termes de diversification des placements et d'adéquation de ces placements en représentation des engagements pris par les assureurs. Ainsi, les articles R. 332-1 et suivants établissent le principe de congruence monétaire : un engagement en euros doit être représenté par des actifs en euros. L'article R. 332-2 énumère limitativement les actifs – actions, obligations – admis en représentation des engagements réglementés. L'article R 332-3 détermine des seuils maxima de détention par classe d'actifs, très bas pour les actifs risqués. L'exigence légale d'adéquation entre actifs et passifs oblige les compagnies d'assurance à procéder en permanence et de manière très précise à l'évaluation de leurs risques financiers. Enfin, l'utilisation de produits dérivés est très encadrée et limitée à la seule couverture des risques financiers.

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