Je suis chargé de rapporter pour le compte de la Commission des finances le programme 156, qui concerne la « gestion fiscale et financière de l'État et du secteur public local » et le programme 302, « facilitation et sécurisation des échanges ». Ces deux programmes représentent en tout plus de 10 milliards d'euros de dépenses et 136 219 équivalents temps plein travaillé – les ETPT, qui diminuent de 2 733 unités.
Étant donné l'actualité, qu'il s'agisse d'évasion fiscale ou de la situation de l'économie mondiale et du commerce international, un examen détaillé serait utile. Mais, compte tenu du temps dont disposent les rapporteurs spéciaux, je vous renverrai à mes deux rapports et je serai aussi synthétique que possible.
Les crédits du programme 156 « Gestion fiscale et financière de l'État et du secteur public local » s'élèveront à 8,46 milliards d'euros en autorisations d'engagement et à 8,45 milliards en crédits de paiement en 2011. En euros courants, ces crédits augmentent donc de moins de 1 %. Toutefois, la question se pose sérieusement de savoir si les besoins en crédits de personnel ont été correctement évalués. En 2009, l'équilibre n'avait été atteint que grâce à une astuce comptable – la réduction, de 60 % à 40 %, du taux de contribution employeur au CAS « Pensions », en décembre. De pareilles tensions risquent de se produire à la fin de l'exercice 2010. Et, en 2011, plusieurs éléments peuvent contribuer à augmenter les besoins : un moindre nombre de départs en retraite ; l'effet des mesures statutaires, notamment pour les fonctionnaires de catégorie B ; la garantie individuelle de pouvoir d'achat, qui touche près de 9,7 % des agents du ministère. On retrouve là les observations formulées par le président de la première chambre de la Cour des comptes venu présenter à notre Commission, le 5 octobre dernier, le rapport demandé à la Cour sur l'évolution de la masse salariale de l'État. Or, la direction générale des finances publiques, la DGFiP, ne dispose d'aucune marge de manoeuvre pour faire face. Le schéma budgétaire triennal 2011-2013 étant construit sur des bases identiques, tout cela est-il raisonnable et soutenable ?
Les crédits de personnel, qui représentent 82,5 % de l'ensemble des crédits de ce programme, augmentent de 2,27 %. Le plafond d'emplois du programme 156 diminue de 2 % par rapport à 2010, avec une réduction de 2 372 ETPT.
Ce programme contribue largement à la réduction des effectifs du budget général de l'État – à hauteur de 7,5 %, alors qu'il ne mobilise que 6 % des effectifs totaux. La politique de non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux est mieux que respectée. En 2011, les personnels de la catégorie C supportent cet effort à hauteur de 144 % ; la catégorie C a perdu plus de 20 % de ses effectifs depuis 2006, soit 11 953 ETPT en moins. Pendant la même période, la catégorie A+ a augmenté de 47 %, ce qui représente 901 ETPT. L'impact financier de la réduction des effectifs sur les crédits de personnel est absorbé par l'augmentation du taux de la cotisation au CAS « Pensions », par la rémunération de l'encadrement et par le coût salarial de la création de la DGFiP.
La demande de crédits de fonctionnement diminue de 4,2 % en autorisations d'engagement et de 5,9 % en crédits de paiement. Les dépenses de fonctionnement informatique pour 2011 sont provisionnées à la hausse pour 223 millions d'euros en autorisations d'engagement et pour 230 millions en crédits de paiement ; elles représentent environ 20 % de l'ensemble des crédits de paiement, hors charges de personnel.
Les dépenses d'investissement diminuent de 12,7 % en autorisations d'engagement, soit 171 millions d'euros, et de 4,5 % en crédits de paiement, soit 189 millions. Elles sont inscrites à hauteur de 93 % sur l'action « Soutien », au sein de laquelle les investissements immobiliers, liés à l'installation de la DGFiP, sont estimés à plus de 64 millions. Répartis sur l'ensemble du programme, les investissements informatiques s'élèvent à 58,8 millions en autorisations d'engagement et à 62,4 millions en crédits de paiement. Toutefois, le financement du programme Copernic se fait désormais par report de crédits de 2010 sur 2011, pour 55 millions d'euros ; un article de projet de loi de finances pour 2011 autorise cette majoration du report de crédit au-delà de la limite de 3 % posée par la LOLF.
L'objectif de fusion des services au sein de la DGFiP est satisfait, comme le montrent les indicateurs qui suivent le niveau de réalisation des directions locales unifiées et des services des impôts des particuliers : le guichet fiscal unique est matérialisé. Par ailleurs, la refonte des statuts est prête pour une entrée en vigueur à l'automne 2011.
En 2011, la DGFiP se trouvera engagée dans le démarrage du volet « dépenses » du système Chorus. Cette opération capitale mobilise un nombre non négligeable d'agents en transferts entrants. La performance de l'ensemble du programme n'appelle pas de commentaires, si ce n'est que l'indicateur mesurant l'amélioration des services rendus aux collectivités territoriales devrait être actualisé et qu'apparaît de manière peu adaptée dans le programme 156 un objectif de suivi de la politique immobilière de l'État.
En revanche, mes interrogations demeurent pour ce qui concerne la sanctuarisation des effectifs du contrôle fiscal, la pertinence qualitative des indicateurs, ainsi que la volonté et les moyens de mettre enoeuvre les dispositifs juridiques améliorant la lutte contre la fraude et contre l'évasion fiscale internationales.
J'en viens au programme 302 « Facilitation et sécurisation des échanges ». Pour 2011, le total des crédits du programme de la douane s'établit à 1,6 milliard d'euros en autorisations d'engagement comme en crédits de paiement, soit une augmentation infime. Le programme 302 a deux finalités : veiller à la sécurité des produits échangés et faciliter les formalités douanières. Y est désormais rattaché le recouvrement de la fiscalité indirecte, dans une nouvelle action 7 « Perception des droits et taxes provenant du programme 156 ».
Les crédits de personnel représentent 68 % des crédits du programme. Leur augmentation en euros courants, limitée à 1,59 %, est imputable à la hausse de plus de trois points du taux de la contribution au CAS « Pensions ». En 2011, le programme mobilisera 17 435 ETPT ; son plafond d'autorisations d'emplois diminue de 361 unités. Le taux de non-remplacement des départs à la retraite, qui continue de croître, atteint 60,8 % des ETP. Il affecte principalement les missions commerciales de dédouanement, qui enregistrent des gains de productivité dus à la dématérialisation des opérations de dédouanement par le biais de l'application DELT@.
Les dépenses de fonctionnement – 144 millions en autorisations d'engagement et 140 millions en crédits de paiement – diminuent malgré l'augmentation des loyers budgétaires.
Les crédits d'investissement augmentent de 6,6 % en autorisations d'engagement et de 28,5 % en crédits de paiement. Ils serviront à continuer le renouvellement et la modernisation du dispositif aéronaval – avec 19,8 millions d'euros en autorisations d'engagement et 26,2 millions en crédits de paiement pour le seul parc aérien –, et à poursuivre les investissements informatiques et les investissements immobiliers, à hauteur de 11,8 millions d'euros en autorisations d'engagement dans les deux cas.
Les dépenses d'intervention en faveur des débitants de tabac – action n° 5 – s'établissent à 296 millions, en baisse de 4 %.
La mesure de la performance du programme 302 est enrichie et précisée par un indicateur écrêté de suivi des résultats des enquêtes et par un indicateur de suivi de la dématérialisation des documents nécessaires au dédouanement.
En dépit d'un pilotage budgétaire rigoureux, l'exécution des dépenses, tant pour le titre 2 que pour les autres titres, est rendue difficile par l'adoption de mesures nouvelles et par des annulations de crédits. Tous les efforts des services de la douane portent sur la sauvegarde des moyens opérationnels mais il est évident que le responsable de programme comme les responsables des budgets opérationnels de programme n'ont aucune liberté ou marge de gestion. D'autre part, la direction générale de la douane et des droits indirects achevant la restructuration de toutes ses missions, les « niches » de productivité seront de plus en plus rares.
Je signale qu'après la généralisation de l'immatriculation européenne EORI, les amendements portant sur la sûreté et la sécurité entreront totalement en vigueur le 1erjanvier 2011, en dépit du probable report du calendrier du programme informatique européen @CUSTOMS qui met enoeuvre le code des douanes européen dématérialisé.
Enfin, le Conseil constitutionnel, dans le cadre de l'examen d'une question prioritaire de constitutionnalité, a censuré la « retenue douanière ». Cette garde à vue, qui concernait quelque 350 personnes chaque année, sera effectivement abrogée à compter du 1er juillet 2011.
Mes quatre premières questions porteront sur le programme 156 de la direction des finances publiques. Monsieur le ministre, au vu de l'exécution 2009 et de la tendance pour 2010, pensez-vous réellement maîtriser la masse salariale de ce programme en 2011 ? Compte tenu du niveau de la garantie individuelle de pouvoir d'achat, de l'impact du report de l'âge de la retraite et du coût salarial de la fusion – notamment avec l'entrée en vigueur, en septembre 2010, des nouvelles dispositions statutaires relatives à la catégorie B –, les dépenses prévisionnelles de titre 2 du budget 2011 et du plan triennal 2011-2013 sont-elle sincères au sens de la LOLF ?
Je constate par ailleurs que des agents du contrôle fiscal de la DGFiP sont mobilisés sur des terrains divers - les groupes d'intervention régionaux, le Plan banlieue - alors que la fraude fiscale, et notamment la flagrance, sont parfois complexe à établir. Quelles sont, monsieur le ministre, vos orientations en matière de lutte contre la fraude fiscale, et qu'en est-il de la sanctuarisation des effectifs du contrôle fiscal promise par votre prédécesseur, M. Woerth ?
Le rythme de la fusion de la direction générale des impôts et de la direction générale de la comptabilité publique s'est sensiblement accéléré en 2010. Mais l'on constate, ici et là, des difficultés pour l'accueil du public et la constitution de files d'attente. Or les dépenses immobilières du programme sont réparties entre le programme 156, le programme 309 « Entretien des bâtiments de l'État » et le CAS « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ». Où en sommes-nous exactement, et quelles mesures de rationalisation envisagez-vous ?
Enfin, les dépenses de fonctionnement informatique progressent et, pour ce qui est singulièrement du programme Copernic, elles se poursuivent contre toute attente pour au moins deux ans encore, couvertes par des reports de crédits importants. Je constate de plus que la DGFiP demeure sans schéma directeur informatique à ce jour. Quand ce schéma, engagé en 2008 et qui devrait être terminé, sera-t-il défini ?
Mes autres questions portent sur le programme 302 de la direction des douanes et des droits indirects.