La mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », après plusieurs retraitements, est marquée par une baisse de crédits de 2,7 %. Les crédits consacrés au handicap connaissant une augmentation importante, comme l'a souligné notre collègue Jeanneteau, il est clair, par déduction, que les crédits consacrés aux mimima sociaux ainsi qu'aux dispositifs d'aide à la parentalité, de conseil conjugal et familial et de protection des personnes fragiles accusent des baisses relativement conséquentes.
Après retraitement, les crédits en faveur de l'égalité entre les hommes et les femmes diminuent de 6,1 %. Quels efforts seront consentis afin de poursuivre les missions définies pour l'exercice 2010, année de grande cause nationale, en matière d'égalité professionnelle et de lutte contre les disparités dans l'entreprise ? Les crédits consacrés à l'égalité professionnelle chutent de 8 %. Ceux dévolus à l'égalité en droit et en dignité atteignent 12,2 millions d'euros, soit une hausse apparente de 15,4 %, toutefois amputée par des retraitements.
Les crédits en faveur du soutien aux familles vulnérables souffrent d'un désengagement important, depuis plusieurs années, notamment pour ce qui concerne l'accompagnement de la parentalité : entre 2007 et 2011, les crédits sont passés de 25 millions d'euros à moins de 10 millions d'euros, soit une baisse de plus de 60 %. Là encore, madame la secrétaire d'État, avec de telles restrictions, comment les objectifs fixés pourront-ils être atteints ?
Le RSA appelle plusieurs constats, monsieur le ministre.
Le rendement de la contribution sur les revenus du capital est largement inférieur aux prévisions : il n'atteindra guère plus de 1 milliard d'euros au lieu des 1,5 milliard d'euros attendus. Même si cette diminution s'explique évidemment par la crise financière, des politiques fortes s'imposent afin de poursuivre l'accompagnement des personnes relevant du RSA, surtout dans le contexte actuel.
Vous avez décidé de réduire de manière drastique la subvention budgétaire accordée au FNSA en 2011. Vous me rétorquerez que c'est assez compréhensible au regard de la montée en charge relativement lente du RSA, notamment du RSA activité. Je regrette cependant qu'à la même occasion vous programmiez une diminution non moins élevée des moyens affectés à l'aide personnalisée de retour à l'emploi, l'APRE, qui passeraient de 150 millions d'euros en 2009 à 84 millions en 2011, alors même que, dans le contexte actuel, ces crédits seraient plutôt nécessaires pour accompagner les personnes concernées.
Les crédits inscrits pour le RSA jeunes reflètent les doutes que ce dispositif vous inspire à vous-même, monsieur le ministre. En tout état de cause, sur les 160 000 bénéficiaires potentiels annoncés initialement, les crédits inscrits permettront tout au plus de servir l'allocation à 48 000 personnes. Au 9 octobre 2010, selon vos chiffres, 5 635 demandes de RSA jeunes avaient été déposées. Quel est l'écart entre le nombre de demandes et le nombre de dossiers acceptés ? Il est question que le nombre de bénéficiaires ne soit finalement que de 15 000, au lieu des 160 000 prévus. Pouvez-vous nous le confirmer ?
S'agissant de l'expérimentation d'un revenu contractualisé d'autonomie de 250 euros pour certains jeunes, là encore, l'effectif de 9 500 bénéficiaires semble hors de proportion avec la situation sociale catastrophique de la jeunesse d'aujourd'hui. La somme de 250 euros ne semble pas non plus à la hauteur pour qu'il soit permis de parler d' « autonomie ». Pouvez-vous nous dire ce qu'il en sera véritablement ?
L'extension du RSA à l'outre-mer sera un événement important en 2011. Il existe un différentiel significatif entre le RSTA – revenu supplémentaire temporaire d'activité – et le RSA. Les perdants risquent d'être nombreux, en particulier à cause de différentiels de politiques familiales et individuelles. Comment anticiperez-vous ce phénomène ?
Dans la deuxième partie de mon rapport pour avis, j'ai dressé un premier bilan du RSA.
Sa mise enoeuvre est d'abord marquée par une montée en charge très lente. En outre, le trouble s'empare des différents partenaires, qui semblent avoir du mal à se coordonner, certains d'entre eux signifiant même que, pour la partie socle, le nouveau dispositif fonctionne moins bien que le revenu minimum d'insertion. Des questions sont également soulevées à propos de la différenciation entre accompagnement social et accompagnement professionnel, qui semble distendre les liens et empêcher une prise en charge globale.
Monsieur le ministre, l'expérience du RSA doit naturellement être poursuivie, en particulier parce qu'elle est trop récente pour que des conclusions définitives puissent être tirées, mais plusieurs questions méritent d'être posées.
Quelles mesures entendez-vous étudier pour éviter que ne se concrétise la crainte de perdre des droits connexes, parmi lesquels la couverture maladie universelle complémentaire – CMUC –, qui semble décourager les reprises d'emploi ?
Quelles pistes pourriez-vous envisager afin d'éviter que le RSA ne favorise les emplois à temps très partiel et – j'ai découvert ce problème lors des auditions – ne décourage la bi-activité des couples, donc l'emploi féminin ?
Chacun a compris que le RSA jeunes ne produira pas les effets escomptés pour le public visé. Avez-vous déjà réfléchi à son évolution ? Quelles pourraient être les orientations dans ce domaine ?
Comment parvenir à unifier les périodes de référence pour le décompte des ressources prises en considération en vue de l'ouverture des droits aux différentes prestations sociales que sont les aides au logement, la CMUC, la prime pour l'emploi – PPE – ou le RSA ? Le représentant de l'Assemblée des départements de France m'a fort justement fait observer qu'un ménage ne peut pas gérer son budget alors qu'il ignore sur quel pouvoir d'achat, sur quelles ressources il peut compter.
Serait-il envisageable de réfléchir à l'opportunité de périodicités autres que trimestrielle pour la déclaration des ressources RSA, mensuelle pour limiter les indus, annuelle pour les allocations de faible montant ?
Serait-il possible d'obtenir de Pôle Emploi une clarification de la vision de la mission qui lui a été confiée ? En auditionnant M. Christian Charpy, nous avons compris qu'il ne considère pas devoir mener une action spécifique en direction du public percevant le RSA. Cela provoque évidemment une sorte de partie de ping-pong entre les départements, qui jugent que cela ne leur incombe plus, et Pôle Emploi, qui estime ne pas disposer des moyens pour mettre tout cela en place.
Au-delà des mesures de nature à améliorer l'efficacité de la gestion du RSA, il apparaît qu'un certain nombre de critiques à son encontre – caractère familial de la prestation ; risque de développement d'emplois à temps très partiel ; opportunité, durant une période d'explosion du chômage, d'un dispositif favorisant ceux qui travaillent – pourraient converger pour justifier une architecture complètement différente.
Premièrement, que penseriez-vous d'un revenu d'existence individuel décent, prenant en compte l'extrême difficulté qu'ont certains exclus à entrer dans le monde du travail ? Le bénéfice de ce revenu pourrait être subordonné à une limite d'âge, un critère objectif de cette nature n'étant pas stigmatisant.
Deuxièmement, une mesure de soutien aux revenus modestes du travail, individualisée et indépendante de la composition du foyer, bref, une « PPE boostée », est-elle susceptible de constituer une piste de travail ?
J'espère que cette discussion sur le RSA ne clora pas la réflexion relative à un dispositif de lutte contre la pauvreté et l'exclusion à la fois plus efficace, plus juste et plus respectueux de la dignité des personnes.