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Intervention de Luc Chatel

Réunion du 2 novembre 2010 à 21h30
Commission élargie : commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, commission des affaires culturelles et de l'éducation, commission des affaires économiques, commission du développement durable et de l'aménagement

Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement :

Nous avons 650 000 élèves de moins, de la maternelle à la terminale, qu'il y a une vingtaine d'années, et le taux d'encadrement est aujourd'hui meilleur. Mais la quantité ne fait pas la qualité, comme on le lit dans tous les rapports qui sortent en ce moment sur le fonctionnement de l'école, que ce soit celui de la Cour des comptes, celui de l'Institut Montaigne ou les rapports d'experts indépendants.

Pour les RASED également, je peux vous rassurer : il n'est pas question de les supprimer. Simplement, le dispositif pour traiter la difficulté scolaire est aujourd'hui très complet. Nous avons d'abord les deux heures d'aide personnalisée qui permettent de détecter les élèves qui rencontrent des difficultés dans l'apprentissage des « fondamentaux » : lecture, écriture, calcul. Nous avons ensuite les stages de remise à niveau, gratuits, assurés par des professeurs des écoles ; plus de 200 000 élèves en ont bénéficié cette année. Les maîtres sont formés à traiter eux-mêmes les premières difficultés mais, lorsque celles-ci sont plus importantes, ce sont les maîtres spécialisés des RASED qui interviennent. On peut enfin ajouter à ce dispositif les maîtres spécialisés affectés en surnuméraires dans une ou deux écoles.

Certes, il va falloir remplacer les stagiaires, mais cela a toujours été le cas. Déjà, dans le système précédent, avant la mastérisation, lorsqu'un professeur stagiaire allait en formation, il fallait le remplacer. Vous ne pouvez pas me demander à la fois davantage de formation pour les professeurs stagiaires, et refuser qu'ils quittent leur classe.

Quoi qu'il en soit, j'ai voulu rendre le système de remplacement plus efficace. Nous avons assoupli les règles régissant l'emploi des TZR, qui étaient affectés exclusivement à une académie ; le dispositif était très rigide et le taux d'utilisation de ces personnels variait de 60 à 80 % selon les disciplines et les académies. Dorénavant, un TZR pourra être affecté sur une autre académie que celle dont il dépend. Le délai de carence, qui obligeait d'attendre quinze jours un remplaçant venant de la même académie, a été supprimé.

Nous avons créé un vivier de contractuels. Il peut s'agir de professeurs certifiés ou de professeurs en voie de passer le concours, par exemple en master 2. Là encore, on ne peut pas me demander davantage de formation pédagogique, et ne pas accepter qu'on donne à des professeurs remplaçants l'occasion de se retrouver devant des élèves.

Enfin, nous avons décidé de faire appel à des jeunes retraités de l'éducation nationale, pour assurer ici ou là quelques heures en complément.

Ainsi, on fera d'abord appel à des titulaires, mais le système sera assoupli, le vivier élargi et le taux de remplacement amélioré.

Je ne partage pas votre jugement selon lequel les deux heures d'aide personnalisée seraient un fiasco. Mon prédécesseur, Xavier Darcos, avait fait en sorte de laisser chaque école libre d'organiser ce temps, pour adapter le rythme scolaire aux caractéristiques de l'établissement. C'est ainsi que certaines écoles dispensent cette aide pendant une demi-heure tous les soirs après l'école ; d'autres le font deux fois par semaine, entre midi et quatorze heures ; d'autres encore utilisent la plage du mercredi matin. M. Darcos avait eu raison : faisons confiance aux élus, aux conseils d'école et aux équipes pédagogiques, et le système éducatif ne s'en portera que mieux.

Madame Langlade, je fais amende honorable : nous devons en effet améliorer la coopération entre l'éducation nationale et l'ensemble des collectivités locales. C'est la raison pour laquelle j'ai récemment reçu les présidents des associations ou assemblées des régions, des départements et des maires de France – ARF, ADF et AMF – pour leur proposer des contrats de partenariat dans plusieurs domaines.

Je présenterai dans quelques semaines un plan numérique pour l'école, qui concernera le volet « formation et ressources pédagogiques ». Mais si, en face, les collectivités qui ont charge d'équiper les lycées et les collèges ne coordonnent pas leur action avec la nôtre, il ne servira à rien. De la même façon, les préconisations des diagnostics de sécurité réalisés par les lycées et les collèges et présentés aux conseils d'administration de ces établissements ne peuvent être mises enoeuvre sans la participation des régions et des départements. Il faut donc une meilleure coopération en amont entre les collectivités locales, compétentes pour l'investissement, et l'éducation nationale, compétente pour la pédagogie et pour la gestion des personnels.

Pour améliorer cette coopération, nous sommes en train de travailler à des conventions cadres qui pourraient être déclinées par région et porteraient sur des thèmes en nombre limité – quatre ou cinq dans un premier temps.

Nous comptons également élaborer des conventions portant sur l'utilisation des locaux. Par exemple, les bâtiments sportifs des lycées ne sont utilisés que deux cents jours par an ; les associations locales pourraient en faire usage pour le reste. De telles conventions existent déjà, mais elles sont passées au cas par cas – elles supposent que le maire s'entende avec le président de région ou avec l'inspecteur d'académie.

Madame Langlade, vous appelez de vos voeux la création d'un service public de l'orientation. Mais vous auriez dû voter la loi sur la formation professionnelle, adoptée par cette majorité à l'automne dernier, qui vise à mieux coordonner l'ensemble des services de l'État sous la houlette d'un délégué interministériel à l'orientation, placé sous l'autorité du Premier ministre –M. Jean-Robert Pitte.

En outre, dans nos réformes récentes, nous avons mis l'accent sur l'orientation progressive. Les familles des lycéens pourront ainsi demander qu'ils soient accompagnés tout au long de l'année dans le choix d'une orientation par un professeur. Des passerelles ont été aménagées entre les filières pour que les élèves construisent progressivement leur parcours et pour éviter toute orientation « subie », vécue comme un couperet. Je pense qu'ainsi nous pourrons limiter l'échec scolaire. Cela suppose de rénover certaines filières. Nous venons de rénover la voie professionnelle ; à la prochaine rentrée, nous rénoverons la voie technologique et la voie STI (sciences et technologies industrielles).

Vous déplorez l'insuffisance des pratiques pédagogiques nouvelles dans la réforme de la filière professionnelle. Je me contenterai de vous citer les deux heures trente d'accompagnement personnalisé, décidées il y a un an, et qui constituent une grande nouveauté dans les lycées professionnels. Leur objectif est de limiter le nombre des élèves qui quittent cette filière sans qualification.

Monsieur Lachaud, la question de la réduction des horaires devra être examinée dans le cadre de la Conférence nationale sur les rythmes scolaires. Le débat sera probablement intéressant, mais difficile : il est déjà compliqué de « caser » deux heures d'accompagnement personnalisé dans l'emploi du temps des élèves de seconde, à la place d'une demi-heure de mathématiques, de sciences physiques et de français ! Mais je compte sur vous pour apporter votre contribution à ce débat.

Pour autant, vous avez raison, les lycéens travaillent plus que leurs parents : environ 32 heures de cours, plus le travail personnel ! Il convient donc de mener une réflexion globale sur la charge de travail des élèves tout au long de l'année scolaire et sur leur équilibre de vie. C'est pour cette raison que nous expérimentons de nouveaux rythmes scolaires dans 124 collèges et lycées – cours le matin, sport et culture l'après-midi.

Les auxiliaires de vie scolaire individuels, ou AVS-i, ont fait l'objet de plusieurs questions, mais je commencerai par répondre à une que vous ne m'avez pas posée parce que je sais que le sujet préoccupe néanmoins l'ensemble des parlementaires : il s'agit de l'augmentation de la contribution de chaque ministère à la prise en charge des emplois aidés. Jusqu'à présent, mon ministère prenait en charge 10 % du coût de chaque emploi aidé. Dorénavant, il en prendra en charge 30 %. Le budget que je vous ai présenté étant stable, on peut imaginer que le nombre des AVS-i que l'on pourra payer sera divisé par trois. Mais, après discussion avec le ministère du budget, j'ai obtenu que, pour les contrats soumis à renouvellement, notre participation soit maintenue à 10 %. Par ailleurs, Nadine Morano et moi avons signé des conventions avec les associations de parents d'enfants handicapés, d'une part, avec les associations pour l'emploi à domicile, d'autre part, pour permettre à ces associations de prendre le relais des collectivités publiques lorsqu'un contrat d'AVS-i arrivera à échéance. L'État continuera à financer, mais ce sont les associations qui contracteront. C'est le moyen d'éviter un changement d'AVS-i, et donc une rupture douloureuse pour l'enfant handicapé et pour sa famille.

Toujours avec Nadine Morano, nous travaillons sur la professionnalisation des AVS-i. Faut-il recruter des personnels de l'administration pour exercer ces métiers ? Une telle question n'est pas sans impact sur les finances publiques. Aujourd'hui nous n'en sommes pas là, mais nous y réfléchissons. J'ai rappelé tout à l'heure que, dans ce budget, des crédits de formation sont prévus pour les AVS-i.

S'agissant des « Cordées de la réussite », une charte a été signée par l'ensemble des ministères. La journée des Cordées a donné un vrai retentissement à cette opération. Il s'agit de créer un lien entre des lycées et des classes préparatoires et d'attirer vers ces dernières des élèves du secondaire qui, en raison de leur environnement familial, n'auraient pas pensé, malgré leur potentiel, à les intégrer. L'objectif est de les détecter très en amont et de les pousser vers l'excellence.

Vous avez fait une proposition très intéressante de convention avec la SNCF, monsieur Lachaud. Des contacts ont été pris. Nous vous tiendrons informé de l'avancement de ce projet.

Mme Amiable a fait de nombreuses remarques, auxquelles je vais tenter de répondre.

Je confirme que les 196 millions d'euros ont bien été reversés : 153 millions ont été consacrés à des revalorisations en faveur des 190 000 professeurs se trouvant dans les sept premières années de leur carrière ; 26 millions l'ont été aux personnels non enseignants ; le reste a servi à financer la poursuite de certaines mesures : intégration des instituteurs, mesures spécifiques, nouvelles missions confiées aux enseignants.

S'agissant des effectifs dans les zones rurales, je tiens à vous rassurer : sur l'ensemble du système éducatif, 2 100 classes comptent moins de quinze élèves et 10 000 moins de dix-neuf. Cela signifie que nous ne cherchons pas systématiquement à imposer une moyenne arithmétique, et que nous travaillons avec discernement en adaptant l'offre de l'éducation nationale aux réalités du territoire.

Les enseignants non titulaires sont au nombre de 22 700, contre 28 000 en 2002-2003 ; cela ne fait que 5,6 % de l'ensemble des enseignants. Si l'on veut assurer aux usagers une continuité de service, le recours à des contractuels est inévitable : d'abord, il faut remplacer les enseignants titulaires absents une fois que l'on a épuisé le recours aux titulaires remplaçants ; ensuite, pour certaines disciplines, notamment dans la filière professionnelle, on a besoin de profils très rares et très ciblés ; enfin, dans certaines zones géographiques, il est difficile de pourvoir les postes.

Vous déplorez que les internats d'excellence touchent trop peu d'élèves. Je rappelle malgré tout que l'objectif est de permettre dans trois ans à 20 000 élèves motivés, qui ont des facilités mais dont l'environnement familial ne peut assurer le total épanouissement, de voir la réalisation de leurs espoirs et à l'école de la République d'aller au bout de ses engagements.

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