Globalement, Mme la ministre pourrait-elle nous expliquer comment stabiliser dans le temps les trois outils essentiels dont dispose l'État en matière de recherche, à savoir le crédit d'impôt recherche, les financements de l'Agence nationale de la recherche (ANR) et les financements des organismes de recherche ?
Qu'en est-il des engagements du Grenelle de l'environnement en matière de recherche, notamment de celui consistant à consacrer 1 milliard au développement durable ? Quel peut être l'impact de l'évolution budgétaire sur notre politique de recherche et sur la gouvernance qu'il faudrait adopter pour s'assurer d'une bonne utilisation des crédits ? Aujourd'hui, les crédits proviennent de moyens exceptionnels ou extrabudgétaires, à savoir le plan de relance et le grand emprunt.
Je me réjouis que la loi de programmation pluriannuelle sanctuarise en quelque sorte les crédits de recherche. Mais tel n'est pas le cas des crédits destinés à la politique de recherche dans le domaine du développement durable. Certains opérateurs majeurs voient leurs subventions de service public décrocher très fortement. Peut-on parler d'un effort quand les crédits baissent de 20 %, comme à l'Institut national de l'environnement industriel et des risques (INERIS) ? À l'IFP Énergies nouvelles, les crédits diminuent de 11 %. Quant à l'Agence de l'environnement et de la de maîtrise de l'énergie (ADEME), qui est l'opérateur majeur du secteur, ses moyens budgétaires sont en retrait de 23 % tandis que le projet de loi de finances lui affecte par ailleurs une fraction supplémentaire de la taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP).
Il faudra que la Commission des finances fasse la lumière sur cette politique qui consiste à remplacer progressivement les crédits de l'ADEME par une fiscalité affectée sur laquelle le Parlement perd tout contrôle.
J'ai bien reçu des services un tableau général de mise enoeuvre du Grenelle, qui chiffrerait l'effort supplémentaire à 902 millions d'euros dès 2010, mais je ne peux que constater un écart évident entre cette synthèse et les chiffres budgétaires annuels. Pourriez-vous nous donner des indications précises sur les moyens supplémentaires destinés au Grenelle ? Au-delà des chiffres, quelles sont les politiques nouvelles qui ont été engagées ?
Entre le plan de relance et le grand emprunt, des moyens exceptionnels et extrabudgétaires extrêmement importants sont affectés à la recherche, et c'est une très bonne chose. Si l'on en croit les conventions, les investissements d'avenir représentent 21,75 milliards de crédits nouveaux. Pour l'enseignement supérieur et la recherche, leurs opérateurs sont l'ANR et l'ADEME. Que doit-on penser quand la perspective de moyens nouveaux est systématiquement compensée par une baisse des moyens budgétaires ? La subvention de service public de l'ANR baisse cette année de 71 millions d'euros, c'est-à-dire de 8 %, et celle de l'ADEME chute de 20 %. Vous m'objecterez, madame la ministre, que le grand emprunt affectera à l'ANR près de 18 milliards d'euros. Certes, mais une grande partie de ces crédits ne sont pas consomptibles et le versement de cette somme sera échelonné sur plusieurs années. Au total, il n'est pas du tout évident que les moyens nouveaux soient aussi colossaux qu'on pouvait le penser compte tenu des coupes budgétaires. D'ailleurs, les opérateurs concernés, que nous avons auditionnés, ont du mal à voir clair dans ces évolutions contradictoires.
Par ailleurs, j'éprouve de grandes inquiétudes au sujet de la gouvernance qui préside à l'utilisation des moyens exceptionnels. Les choses ne doivent pas être simples pour votre propre ministère, madame la ministre. Pour le grand emprunt, la logique est totalement inverse à la logique budgétaire : on débloque des moyens importants dans une certaine urgence, sans stratégie claire des programmes sélectionnés et, surtout, sans réelle vision à long terme des moyens qui seront affectés.
Au total, je redoute que, dans la confusion qui règne, les crédits destinés à des investissements d'avenir ne financent des conventions en cours. D'ailleurs, plusieurs conventions ont déjà cet objectif : opération Campus, et Instituts Carnot par exemple. En somme, l'opération de communication autour du grand emprunt pourrait se solder par un financement par l'emprunt des politiques mises en route depuis 2006 ou 2007 et non financées pour l'instant. Financer à crédit des engagements passés, voilà un principe qui n'est pas sain budgétairement. Qu'en pensez-vous, madame la ministre ?