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Intervention de Georges Tron

Réunion du 21 octobre 2008 à 21h45
Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012 — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGeorges Tron :

Ce projet de budget me semble répondre à de multiples exigences, ce dont on ne peut que se réjouir. Pour ma part, j'en discerne quatre.

Premièrement, la lisibilité est renforcée par la pluriannualité. Inutile d'insister sur la projection des finances publiques sur trois ans : tout le monde a bien compris en quoi consistait l'innovation de ce budget. Je soulignerai plutôt l'apport de différentes mesures nouvelles, pleines de bon sens. Monsieur le ministre, la fixation d'un socle pour la politique salariale dans la fonction publique, avec une augmentation prévue le 1er juillet de chaque année et des mesures de rattrapage prises en fonction de la garantie individuelle de pouvoir d'achat, me paraît bien évidemment aller dans le bon sens. On sort ainsi d'un cycle de discussion au sein de la fonction publique qui n'avait ni queue ni tête pour se projeter dans l'avenir avec la pluriannualité. C'est un excellent principe et je vous félicite de l'avoir ainsi respecté.

Deuxièmement, la transparence est garantie par la volonté de budgéter à leur coût réel des dépenses contraintes, que l'on tentait constamment de diminuer. Il s'agit de l'aide médicale d'État et des opérations extérieures, à hauteur de 1 milliard d'euros. Personne, je dis bien personne, ne pourra reprocher à nos budgets de manquer de transparence et de sincérité. À cet égard, Gilles Carrez a eu raison de souligner dans son intervention que nous nous étions toujours situés en deçà des prévisions de recettes fiscales que nous inscrivions dans le budget.

Troisièmement, la prudence vous a guidés. Vous avez eu raison, madame la ministre, de considérer que nos hypothèses sont plus « vulnérables », pour reprendre vos mots, qu'elles ne le sont d'ordinaire. Je ne peux que vous féliciter de vous fonder sur des prévisions modérées de croissance et de recettes fiscales. Nous ne pourrons être accusés d'avoir fait preuve d'un optimisme excessif en temps de crise. Je vous félicite également pour les mesures destinées à aider les entreprises à traverser la difficile situation qu'elles vivent actuellement : vous avez donné des instructions aux trésoriers-payeurs généraux et aux URSSAF pour alléger, voire « oublier », les pénalités de retard. De la même façon, je me réjouis que les salariés en difficulté bénéficient d'un assouplissement des durées maximales des contrats d'accompagnement dans l'emploi et des contrats initiative emploi.

Quatrièmement, vous affirmez très clairement une volonté politique. Ainsi pour encourager les économies d'énergie, vous instaurez un prêt à taux zéro pour les travaux de rénovation dans les logements et vous adaptez la règle de la déductibilité des intérêts d'emprunt pour les logements répondant à la norme « bâtiment basse consommation ». Je me réjouis que vous poursuiviez vos réformes malgré la crise.

Nous avons tous éviter le premier écueil, à savoir considérer que la crise financière n'avait aucune répercussion sur la situation économique et budgétaire. Cela étant, il ne faut pas se leurrer sur la situation budgétaire de notre pays. Les déficits n'ont jamais été aussi élevés et nous transférons la charge qu'ils représentent à nos enfants et à nos petits-enfants, comme vous le souligniez très justement, madame la ministre. Aujourd'hui, disons-le clairement, le déficit de l'État n'a quasiment jamais été aussi élevé et la dette publique s'accroît.

Dans ces conditions, les incantations ne servent à rien. Il faut avoir une vision claire de ce qu'il convient de faire. Je livrerai ici quelques réflexions, en qualité de co-président de la mission d'évaluation et de contrôle de la commission des finances, en soulignant que cette instance a l'avantage de nous faire travailler en bonne intelligence. En d'autres termes, il ne suffit pas qu'une chose soit dite d'un côté de l'hémicycle pour qu'on dise l'inverse de l'autre. S'il ne s'agissait que de cela, n'importe lequel d'entre nous pourrait le faire. Il faut savoir s'abstraire des contingences purement politiques.

Une piste fondamentale consiste à éviter les mauvaises orientations qui sont des solutions de facilité. Je ne reprendrai pas les propos d'Alain Rousset – il est président de région et moi pas, même si je suis maire et président d'une communauté d'agglomération – mais je voudrais vous alerter sur les précautions qu'il convient de prendre à l'égard des collectivités territoriales, qu'il s'agisse de la réforme de la DSU, du fonds de compensation de la TVA ou de la nécessité de leur appliquer une réflexion globale et non des mesures ponctuelles. Je tiens à préciser que rien ne doit être fait pour les pénaliser. Rappelons le chiffre cité hier par le rapporteur général : l'investissement des collectivités territoriales représente 75 % de l'investissement public civil de la nation. Prenons garde à ne pas prendre de mesures qui aboutiraient à pénaliser celui-ci au moment où la crise sévit.

Par ailleurs, trois grandes orientations doivent permettre de remettre de l'ordre dans les finances publiques afin d'aller plus loin.

La première consiste à renforcer le contrôle des dépenses publiques. Madame la ministre, monsieur le ministre, je vous le dis très clairement, je considère que le contrôle que nous exerçons sur les administrations, même si la mise en place de la RGPP a changé les choses, est totalement insuffisant. Je puis vous assurer – et je pourrais prendre à témoin n'importe lequel des rapporteurs ou des membres de la commission des finances ou de la MEC – que nous constatons tous les jours qu'au sein de l'État, des hauts fonctionnaires s'abstraient souverainement des consignes que vous leur donnez et continuent de penser que la dépense publique peut être illimitée. Je fais en particulier allusion aux opérateurs. À cet égard, je me réjouis que l'article 64 du projet de loi de finances pour 2008 les soumette aujourd'hui à un plafond d'emplois temps plein. Cependant, j'ai en tête de multiples exemples de dépassement.

Ces trois dernières années, nos collègues de l'opposition n'ont cessé de répéter qu'ils étaient scandalisés par la diminution des effectifs dans la fonction publique mais je me permets de leur dire, en ma qualité de rapporteur du budget de la fonction publique, que s'ils avaient examiné attentivement les chiffres, ils auraient constaté que nous avions voté à due concurrence l'augmentation des effectifs chez les opérateurs. Après trois ou quatre années de recul, nous pouvons dire, sans prendre le risque de nous tromper, que des transferts massifs ont été opérés et que certaines personnes se sont totalement soustraites aux règles. Il faut donc exercer un contrôle beaucoup plus sévère sur les opérateurs. Michel Bouvard l'a dit à plusieurs reprises très justement, je le répète ici.

La deuxième orientation consiste à renforcer l'autorité de la décision politique. Monsieur le ministre, je ne peux que me réjouir des mesures, dues à votre action, qui nous ont enfin permis de reprendre le contrôle sur la gestion immobilière de l'État. Néanmoins, je reste extrêmement prudent car je continue à constater dans les ministères des comportements incompatibles avec la rigueur que vous prônez. Certains d'entre eux élaborent des projets très dispendieux qui ne peuvent rentrer dans le cadre de cette maîtrise. J'y insiste, il faut aller beaucoup plus loin dans ce domaine, mes chers collègues. Pour un patrimoine d'une valeur de 80 milliards d'euros, l'État doit consacrer 2 milliards d'euros aux dépenses d'entretien.

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