Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de François Pérol

Réunion du 15 septembre 2010 à 18h00
Commission d'enquête sur les mécanismes de spéculation affectant le fonctionnement des économies

François Pérol, président de la Fédération bancaire française :

Les banques françaises ne sont pas des acteurs majeurs sur le marché de la dette souveraine grecque, avec des positions de 9,5 milliards d'euros – elles sont plutôt exposées sur le marché économique, surtout par le biais de leurs filiales en Grèce. J'imagine donc difficilement qu'elles aient pu contribuer à la spéculation sur la dette grecque, d'autant qu'elles veillent à respecter l'ensemble de la réglementation. À titre d'exemple, l'exposition de l'établissement que je préside n'atteint pas 100 millions d'euros, ce qui est dérisoire pour une dette de plusieurs centaines de milliards.

À propos du portage d'actions, vous faites référence aux opérations par lesquelles des établissements financiers acquièrent des titres pour le compte d'opérateurs qui souhaitent demeurer discrets. À titre personnel, je pense que le marché doit avoir la meilleure connaissance possible des opérateurs qui interviennent sur chaque titre, y compris dans les opérations de portage. C'est une information utile pour les autres investisseurs.

La Volcker Rule établit une distinction entre les activités pour compte propre de la banque et ses activités pour le compte de sa clientèle. En pratique, c'est difficile. Certaines opérations relèvent clairement du compte propre : des positions directionnelles prises par une banque sur son bilan, par exemple. Mais la banque peut aussi utiliser son compte propre pour le service d'un client. Ainsi, la banque chargée d'une émission obligataire est le teneur de marché pour ce titre : elle intervient sur le marché pour contribuer à la formation du prix. C'est son compte propre et son bilan qui sont mobilisés pour cela, mais c'est indispensable pour proposer un service de qualité à son client – l'émetteur. Pour lui obtenir un bon prix de marché, il faut intervenir sur ce marché et, pour cela, il importe d'avoir des « livres » et d'être capable de vendre et d'acheter. Il en est de même pour une couverture de change : vous devez être capable de proposer un prix à votre client, et donc de prendre position sur le marché, le tout sur votre compte propre.

Voilà pourquoi la distinction entre compte propre et compte de tiers est en pratique difficile à effectuer pour les banques qui veulent rendre à leurs clients, et notamment aux grandes entreprises, tous les services qu'ils attendent, du crédit au financement de marché – puisque les entreprises connaissent toutes désormais, elles l'ont appris de la crise, la nécessité de diversifier leurs modes de financement. Nous attendons donc de voir comment la Volcker Rule sera appliquée en pratique. Chacune des banques de notre fédération a sans doute un pourcentage différent d'opérations pour compte propre dans le total de ses activités, sans compter les divergences d'interprétation. Chacune décide aussi de ce qu'elle veut faire de son bilan. À titre d'exemple, mon établissement a décidé de placer en gestion extinctive les activités de compte propre lorsque ce n'était pas utile à nos clients, d'abord parce que ces activités mobilisent des fonds propres importants, ensuite, il faut bien le dire, parce que nous n'avons pas été brillants par le passé en ce domaine et, enfin, parce que ces activités ne répondent pas à notre vocation. Mais d'autres peuvent faire des choix différents.

Je pense que, si une banque – ce n'est le cas d'aucune banque française – réalise l'essentiel de ses profits sur des activités de compte propre, un peu comme le fait un fonds d'investissement mais dans le cadre, pour ce qui le concerne, du mandat donné par ses clients, ses dirigeants doivent être confrontés à des décisions difficiles lorsqu'il leur faut intervenir dans l'intérêt de leurs clients. Mais ce n'est qu'une opinion personnelle. Pour le reste, nous attendons avec un grand intérêt de voir de quelle façon les États-Unis appliqueront la Volcker Rule.

Je ne suis pas très bien placé pour commenter la situation des banques espagnoles. Elle est contrastée : un certain nombre a parfaitement passé les tests de résistance, d'autres ont besoin d'une recapitalisation. Cela s'explique par le fait qu'elles sont très diversement exposées à l'économie domestique, parce que les très grandes banques espagnoles sont de très grandes banques internationales et qu'une grande part de leurs activités se fait hors d'Espagne.

Quant aux banques françaises, les tests ont montré qu'elles disposaient d'un « coussin » de fonds propres important, y compris dans le scénario le plus tendu, celui d'une double récession aux États-Unis. C'est dû au fait qu'elles ont déjà considérablement renforcé leurs fonds propres.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion