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Intervention de Philippe Nauche

Réunion du 27 octobre 2010 à 8h30
Commission de la défense nationale et des forces armées

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Nauche, rapporteur pour avis :

Je crois qu'il n'est pas utile de décrire ligne à ligne le projet de budget « Soutien et logistique interarmées » mais j'en évoquerai les points les plus sensibles.

Le premier d'entre eux concerne la politique immobilière. Le ministère s'est lancé dans un projet d'envergure visant à regrouper ses sites parisiens à Balard. Ce projet avance et les emprises libérées pourront être vendues pour contribuer aux fameuses ressources exceptionnelles. Mais les choses ne se sont pas tout à fait déroulées comme prévu.

En 2009 puis en 2010, le Gouvernement tablait sur près de 700 millions d'euros de recettes. Il n'en a obtenu que 170 millions environ, auxquels se sont opportunément ajoutés 215 millions versés par la société nationale immobilière sous forme de soulte. Je rappelle que cette soulte n'est qu'une anticipation de recettes, correspondant au versement de 10 années de loyers. Au total, nous sommes en dessous des 500 millions d'euros pour les années 2009 et 2010. Pour le reste de la programmation, le ministère affiche l'objectif d'un milliard d'euros de recettes immobilières, mais avec seulement 158 millions d'euros pour 2011. À supposer que tout se passe bien, il aura perçu à la fin de la programmation un peu moins d'un milliard et demi de recettes, quand la programmation reposait sur un objectif de deux milliards d'euros. Il manquera donc au moins 500 millions d'euros.

Si le projet de Balard paraît construit de façon intéressante, il n'en demeure pas moins un choix lourd pour l'avenir du ministère. Il s'agit d'un partenariat public-privé qui, outre la construction du bâtiment, inclut un ensemble de prestations d'entretien et de services pour la durée du contrat. Ce sont plus de 900 millions d'euros d'autorisations d'engagement qui sont inscrites cette année, avec des paiements étalés sur 30 ans. Et il faut bien constater qu'à travers son mode de financement –considéré par certains comme innovant, mais qui me semble inquiétant - l'État contracte une importante dette implicite.

Autre grand chantier : les systèmes d'information et de communication. Cette année a vu la mise en place du logiciel Chorus. Le ministère de la défense a été désigné ministère pilote pour mettre en oeuvre cette interface qui sera commune aux différents services gouvernementaux. Il a courageusement relevé le défi, malgré les difficultés que vous savez, en particulier des retards de paiement massifs, qui ont fait souffrir bon nombre de PME. Si aujourd'hui les choses semblent s'améliorer grâce, notamment, au recours à des intérimaires ou au paiement manuel de factures, il faudra débourser plusieurs dizaines de millions d'euros d'intérêts moratoires. Il me semblerait normal de faire jouer la solidarité interministérielle, le ministère de la défense ayant joué un rôle d'éclaireur utile à tous. La commission pourrait utilement créer une mission d'information sur la mise en place de ce système et ses conséquences.

Le point suivant concerne le rapprochement interarmées. Je note tout d'abord que la mise en place des bases de défense avance mais que nous ne disposons pas d'évaluations précises des gains attendus et encore moins de ceux générés faute d'indicateurs, alors que leur généralisation sera effective le 1er janvier 2011.

Parallèlement, des structures interarmées sont créées ou doivent l'être prochainement : le service interarmées des munitions, qui devait voir le jour le 1er juillet dernier mais ne devrait être en place qu'en janvier 2011, et le service du commissariat aux armées, créé en début d'année.

La réforme du ministère concerne également le service de santé des armées. La Cour des comptes a rendu un rapport assez critique sur le déficit de fonctionnement de ses hôpitaux sans être, contrairement à ce que l'on a beaucoup entendu, complètement à charge. De mon point de vue, il inclut des préconisations intéressantes mais qui ne prennent pas en compte une donnée fondamentale : la spécificité de la médecine militaire la rend très coûteuse et elle ne pourra pas s'aligner sur le coût du secteur civil.

Il faudra donc voir comment le SSA se réformera pour maintenir sa spécificité face à une pression budgétaire croissante, mais aussi comment il s'interrogera sur sa place dans notre dispositif sanitaire aujourd'hui et demain. C'est la question centrale : son rôle premier n'est pas de prendre en charge les civils, mais comme l'activité opérationnelle ne suffit pas à lui offrir un plan de charge suffisant, peut-être devra-t-il davantage s'intéresser aux besoins sanitaires de ses régions d'implantation. Le rapport s'interroge également sur l'adaptation de l'activité de certains personnels aux conditions dans lesquelles ils sont projetés en opérations extérieures.

Au titre des bonnes nouvelles, le Gouvernement semble se rallier aux préconisations que j'avais formulées l'année dernière sur le SEA : on devrait lui permettre à l'avenir de passer des contrats à option sur le marché pétrolier.

Quelques mots enfin sur les opérations extérieures, pour souligner que la forte croissance des moyens projetés en Afghanistan annule les quelques économies permises par la réduction de nos engagements sur d'autres théâtres. Il serait souhaitable que la commission engage une réflexion sur le dimensionnement de ces déploiements et surtout sur leur séquençage. Je note en particulier une difficulté à quitter complètement un théâtre.

En conclusion, compte tenu des interrogations qui marquent cette année encore le projet de budget, je m'en remets à la sagesse de la commission pour l'adoption des crédits.

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