Seulement, vous hésitez à l'avouer aux Français de peur de les affoler. Sachez qu'ils ne tarderont pas à découvrir que derrière les chiffres rassurants d'un taux de chômage de 5 % se cache une réalité plus contrastée avec l'explosion de la précarité et l'accroissement du nombre des travailleurs pauvres : un salarié britannique sur quatre connaît le chômage chaque année. Est-ce la mise en place d'un Jobcentre à la française que vous souhaitez ? Encore faut-il rappeler que cet organisme regroupe 75 000 salariés, soit près du double des effectifs que vous prévoyez.
Comment pouvez-vous croire qu'il suffise de fusionner deux réseaux pour que le chômage baisse mécaniquement jusqu'à 5 % et que le taux d'activité monte à 70 % ? C'est confondre l'outil et la politique qu'il est censé mettre en oeuvre. Comme l'a souligné la présidente de l'UNEDIC, votre projet met la charrue avant les boeufs, c'est-à-dire qu'il réforme l'outil avant le contenu. L'impréparation et l'improvisation risquent de limiter la portée du dispositif annoncé, voire de retourner son effet.
Venons-en aux objectifs que vous poursuivez et aux conséquences de votre précipitation.
Vous parlez de « flexisécurité », voie vers laquelle l'accord sur la modernisation du travail signé par les partenaires sociaux s'engage timidement. Mais vous bricolez à la hâte un outil qui sera uniquement un outil de placement et de contrôle des demandeurs d'emploi – et c'est l'un de nos principaux reproches. Votre projet n'apporte en réalité aucune réponse à la montée de la précarité.
Vous invoquez la nécessité de rendre le marché du travail plus fluide et plus flexible, mais savez-vous que, selon l'INSEE, le temps partiel concerne déjà 18 % des actifs dans notre pays et qu'un salarié sur quatre change d'emploi chaque année ? Entre 2000 et 2005, la part des salariés travaillant la nuit est passée de 4,6 % à 7,1 %, ceux travaillant le samedi de 25 % à 31,3 %, et le dimanche de 9 à 14 %. Mais j'ai l'impression que ces derniers chiffres ne vous inquiètent pas trop car j'ai cru comprendre que vous proposiez d'ouvrir les magasins tous les dimanches.