En effet. Lorsqu'il y a eu mélange, il devient impossible de contrôler les corrélations. On croyait diversifier le risque en créant des « paniers », or, lorsque les prix d'actifs sous-jacents ont connu des chocs, une corrélation considérable s'est produite et a entraîné une explosion du risque que les concepteurs des titres eux-mêmes n'avaient pas prévue.
Une autre idée serait de dissuader les investisseurs institutionnels de prendre dans leurs portefeuilles des produits qu'ils ne connaissent pas ! La discipline de marché dépend de la capacité des acteurs de bout de chaîne à évaluer le risque que contient le produit et, le cas échéant, à ne pas l'acheter, donc à faire peser une contrainte sur les émetteurs.
En résumé, si l'on dispose d'un pivot macroprudentiel (le Conseil du risque systémique), si l'on dissocie de l'activité bancaire proprement dite des activités qui doivent relever d'entités capitalisées séparément, si l'on arrive à faire régresser le problème du too big to fail, si enfin on réforme le marché des dérivés, on disposera d'un ensemble qui devrait rendre la finance plus stable.
J'en viens aux questions relatives aux responsabilités des banques centrales.
Ceux qui critiquent Alan Greenspan sont des détracteurs a posteriori. Auparavant, ses capacités « surnaturelles » faisaient l'unanimité ! Quoi qu'il en soit, son idéologie était celle du marché efficient : l'économie fonctionne avec des chocs dont les banques centrales doivent gérer les conséquences après coup. Théoriquement, les crises doivent rendre les acteurs plus responsables, le banquier central évitant quant à lui des pertes trop importantes en injectant la liquidité nécessaire (ce qui a eu pour conséquence, après 2001, de relancer la spéculation sur l'immobilier).
Plus précisément, la Fed a commencé à remonter ses taux à partir de mai 2004, alors que l'on était à 1 % depuis le début de 2001. La remontée a été rapide puisque, au printemps 2007, on est arrivé à 5,25 %. Or, pendant tout ce temps, les taux longs n'ont pas bougé. « L'énigme des taux longs », pour reprendre l'expression de Greenspan, est facile à résoudre : c'est la globalisation. Les déficits massifs des États-Unis sont rachetés par la Chine et les pays pétroliers, lesquels réinvestissent dans les obligations américaines. Dès lors, le marché obligataire n'est pas entraîné par la hausse des taux courts, ce qui favorise les déséquilibres globaux et la spéculation. Le manque de concertation entre les banques centrales et les antagonismes entre préférences nationales sont à l'origine de ces phénomènes.